Far Cry 5 est, comme à peu près tous les Far Cry, un jeu d'auteur de petit malin. C'est un jeu schizophrène, à la fois une ode à la bonne vieille ultraviolence des FPS et une critique lucide de ce qu'elle représente.
En fait, à travers le voyage initiatique hardcore de l'adjoint au shérif que l'on incarne, c'est bien au joueur que l'on s'adresse ici, à son besoin de violence.
Le héros et le joueur sont manipulés par Joseph pour servir les croyances nihilistes de ce dernier. On passe des heures à faire exploser des trucs, à tuer des cultistes à la pelle, à chasser, à se perfectionner et améliorer les compétences de notre personnage mais, pourtant, on se rendra compte petit à petit que tout ça est fait avec l'approbation du prophète Joseph et de ses lieutenants (voir les monologues lorsqu'on se fait capturer, controversés et pourtant indispensables au propos). En effet, le joueur ne fait que servir sa prophétie apocalyptique, il y prend sa place sans demander son reste. Il sacrifie les faibles et les remplace par les forts en prévision de la fin du monde.
Far Cry 5 est un jeu méta, une arnaque géante. On y récompense le joueur et ses actions destructrices pour mieux le manipuler. A la fin du jeu, il sera trop tard pour faire machine arrière : la seule façon d'éviter (peut-être) le drame sera de na pas jouer (cf la fin alternative au début (!)).
Dan Hay disait vouloir parler des mécanismes de recrutement des sectes et de la fin du monde qui justifie leur existence, ce qui donne un remake de l'Apocalypse de Jean chez les rednecks fanatiques religieux. Dan est le Dieu dans la machine de ce petit univers, chef d'orchestre un peu pervers prêt à infliger toutes les frustrations possibles au joueur pour faire passer son message. Qu'on ne me dise pas qu'Ubi n'a pas eu de courage avec FC5.
Pour terminer, Far Cry 5 est évidemment un jeu qui parle des Etats-Unis, magnifiant le pays à l'image pour mieux détruire ses fondations de violence et de croyance aveugle. Quand c'est fait avec un gameplay aussi jouissif, c'est toujours un plaisir de se faire manipuler.