Fighting Angels sorti chez nous le 16 novembre 2005 est le nom occidental de The Catfight: Onna Neko Densetsu, le 55e volume de « The simple 2000 series » sur PS2. Développé par Tamsoft (papa entre autres des Toshinden), le principe du jeu (et son principal attrait) est de voir s’affronter deux jeunes demoiselles courtement vêtues sur un ring. Une sorte de Dead or Alive du pauvre version catch, en gros.
« The simple series » est une collection jeux japonais à bas prix mais qui ne manquent parfois pas d’originalité. Les braves gens qui lisaient Game Fan devraient voir de quoi je parle, une bonne partie de ces titres remplissait la rubrique Warp qui traitait de jeux japonais atypiques. En France, seuls quelques titres de cette collection très hétéroclite furent édités notamment grâce (où à cause) de 505 Gamestreet. Un éditeur alors spécialisé dans les jeux de seconde zone, des jeux parfois pas mauvais mais n‘intéressant aucun éditeur. Les restes en quelque sorte, avec les bonnes et mauvaises surprises qui vont avec.
505 Gamestreet est donc une petite boîte d’édition avec des moyens limités. Leurs jaquettes de cette époque sont souvent une ode à l’amateurisme le plus ridicule. Celle de Fighting Angels ne déroge pas à la règle. Le connaisseur avisé des icônes PEGI apprendra que le soft est interdit aux moins de douze ans, qu’il y a du contenu sexuel (comprenez: des filles en maillots de bain) mais aussi, plus surprenant, de la discrimination. Les autorités l’ont donc trouvé sexiste. Il est curieux de ne pas y trouver le logo indiquant un contenu violent alors que « Les anges qui se battent » se tapent dessus.
Il ne faut d’ailleurs pas manquer de lire la notice du jeu qui se termine par la galerie des personnages, une bonne matière à rire. Avec la photo de rigueur, chacune d’entre elle a une petite biographie ainsi qu’un tableau à douze entrées nous renseignant sur autant de choses inutiles. Sans surprise, le casting est un pot-pourri de différents fantasmes masculins japonais. Ce qui ajouté aux renseignements inutiles nous donne un mélange très croustillant. On trouve ainsi une jeune étudiante timide qui adore les gadgets en forme de raton laveur et qui déteste les fantômes, l’occidentale qui n’a pas froid aux yeux et qui déteste les étiquettes de marque (quelle iconoclaste !) ou la propriétaire d’un magasin dont l’endroit préféré est le centre commercial la nuit et dont le hobby est de boire (c’est du joli). Il y a bien sûr une enseignante affriolante, deux mannequins professionnelles et autant d’androïdes et encore une lycéenne. Ma préférence va à l’étudiante chinoise, Mei Ling Miao, qui porte des lunettes et participe au tournoi pour « devenir une conceptrice de lunettes et créer sa propre collection ». Elle est atteinte d’un léger strabisme, ce qui en rajoute encore une couche sur le cliché japonais de la chinoise qui louche.
Après ces longs préliminaires, je vous sens d’attaque. J’espère avoir fait monter en vous la curiosité à défaut d’autre chose et qu’une seule chose vous pend aux lèvres, cette question : ce jeu est-il aussi mauvais et ridicule que sa jaquette et sa notice semblent le présager?
La galette dans le mange-disque plus tard et le jeu nous propose déjà un petit écran pour tester si notre téléviseur est compatible 60 Hz. Qui choisit le 50 Hz est affligé d’un 50 Hz non optimisé avec grosses bandes noires en haut et en bas de l‘écran. Outch! L’écran titre est accompagné d’horribles feulements pathétiques, trois poitrails féminins viennent se placer derrière le titre puis une combattante prend place à droite le tout avec couleurs d’arrière-fond clignotantes. Un bijou de pop design, bien sûr. Une fois cet écran passé, on se retrouve dans les menus du jeu qui eux n’ont pas été altérés par 505 Gamestreet et sont dans des tons colorés clairs très réussis.
Bien conscient de son public, l’un des modes proposés est « View » qui permet d’observer les combattantes dans le costume du choix avec les animations que l’on souhaite. J’ai le regret d’informer aux gros pervers qui auraient voulu jouer avec la caméra pour admirer la modélisation que celle-ci n’est pas libre. Vu le public visé, c’est tout de même curieux de ne pas y avoir pensé.
Fighting Angels tient plus du jeu de catch que du jeu de combat classique. Les combattantes ne sont pas ciblés et peuvent ainsi se déplacer librement sur l’aire de combat délimité par des cordes. Le but du jeu est de vider l’énergie de l’adversaire le tout en maximum trois rounds.
Les coups sont les mêmes pour toutes, dans un éventail assez limité, comprenant des prises dits accrochages. Il est possible de se défendre en parant ou en esquivant les attaques. Des armes peuvent apparaître lors de certains affrontements annoncés au début par un très très laid « weapons on fight to the death » avec une police banale de traitement de texte tout de rouge criant vêtu le tout sur fond bleu (joli mélange!). Il y a quatre armes: la chaise en fer, le gourdin clouté, le sabre et le fusil d’assaut (oui, oui). Ces armes sont exagérément puissantes, qui les possède ne fera généralement qu’une bouchée de la malheureuse en face.
Le jeu inclut tout de même une petite spécificité avec la jauge sexy. Elle se remplit sous certaines conditions, notamment en provoquant l’adversaire. En plus de permettre d’esquiver, cette jauge une fois pleine vous permet de réaliser une danse sexy. Inutile de s’attendre à une attaque démentielle qui décollerait la rétine et vous rendrait les mains moites. Si le premier coup touche sa cible, l’arrière-plan devient noir avec le visage du personnage qui s’affiche et sa phrase perso parmi une sélection aussi recherchée que « I’m unstoppable! », « See my true power » ou « It’s a show time ». Puis une banale suite de coups de base s’enchaînent tandis que le personnage est auréolé de petites étoiles bleues. Question spectaculaire, c’est petit bras. Mais cette danse sexy a tout de même l’avantage d’enlever la moitié de la vie.
Si le nombres de coups différents est plutôt faible le jeu se rattrape par ses quelques subtilités. Le système de combat est assez simpliste, mais fait illusion. Il y a un plaisir malsain à regarder les combattantes se courir autour pour s’échanger quelques coups et autres prises au corps à corps. La libre circulation dans l’aire de jeux et la rapidité des déplacements (avec à la clé une animation encore trop exagérée pour ne pas en rire) fait que le jeu s’apparente souvent à un jeu de chat. Mais ce n’est guère suffisant face à un jeu au contenu bien vide.
En effet, il y a en tout quatre stages différents dont trois qui représentent le même mais décliné à trois différents moments de la journée. Ces décors sont très vilains, avec un public en 2D très grossier, mais ce n’est pas véritablement important puisque les angles de vue sont avant tout centrés sur les opposantes. Quant à la musique, c’est de la musique qu’on pourrait glisser dans beaucoup de jeux arcade des années 1990. Elle n’a rien de lyrique ou d’épique elle est juste sans prise de têtes même si là aussi les développeurs ont visé bas avec seulement cinq musiques différentes. Quant aux modes de jeux, le jeu va aussi à l’essentiel comme on a pu le voir. Pour un jeu vendu 2000 yens, Tamsoft n’allait bien sûr pas épater la galerie. Et les filles?
Si je vous dis que la plus grande partie du budget ô combien limité du jeu a dû passer dans la modélisation des combattantes ça ne devrait pas vous étonner. Il faut bien attirer l’amateur esseulé. Le tout est plus que correct. Mais une bonne modélisation ne fait pas l’habit du moine. Les seins se retrouvent ainsi avec une gestion physique très curieuse, très gélatineuse. Ça ne rebondit pas, ça remue. Il suffit qu’un personnage lève un peu le bras pour que le sein du même côté se retrouve en pleine tempête tandis que l’autre ne semble pas affecté (même pas solidaire, quel égoïste!). C’est particulièrement visible lors des poses de victoire bien centrées sur le torse. Difficile de ne pas esquisser de larges sourires ironiques devant ces poitrines irréalistes. De même devant les animations de certaines combattantes comme Mona une androïde qui fait l’hélicoptère avec ses bras en courant ou Riho une étudiante qui déteste le soja fermenté avec un très exagéré déhanché à se déboîter le bassin.
Mais de près, pour leurs petites tronches, le résultat est souvent assez piteux. Le nez et la bouche sont rarement réussis et on voit trop qu’il s’agit d’aplats de polygones sur le visage. De plus, Japon oblige, il a fallu remplir le quota de cheveux aux couleurs immondes avec du rose, du violet et du vert. Par contre côté corps si le tout est réussi c’est tout de même le même pour toutes (qui ont comme par hasard à peu près les mêmes mensurations dans les biographies). Avec la même ridicule poitrine gélatineuse pour toutes, youpi!
Il y a donc un seul corps pour toutes mais aussi un seul modèle d‘attaque avec seulement quelques variantes. Les « anges qui se battent » ont ainsi souvent les mêmes attaques et les mêmes animations. Elles ne distinguent que par leurs têtes, leurs postures, les quelques bruits qu’elles poussent et les traditionnelles phrases de début et de fin de combats au nombre de cinq. Elles ne sont donc vraiment différentes que dans la notice. Question variété de jeu, ce n’est pas en changeant de personnage que vous allez faire durer la flamme plus longtemps.
Il ne faut pas se faire d’illusions, c’est un jeu où chaque partie se ressemble beaucoup. L’envie de tout débloquer pourra guider le joueur quelques temps. Il y a un personnage et une dizaine de costumes à débloquer. Dix personnages avec chacun dix costumes à débloquer, ça aurait presque l’air alléchant si tous les costumes n’étaient pas les mêmes (et qui sont encore des clichés de fantasmes japonais). La difficulté du jeu étant toute relative même avec un tour dans les options et l’intelligence artificielle très limitée, mieux vaut se rabattre sur le mode versus. En compagnie de quelques amis peu exigeants (et alcoolisés, de préférence), les parties retrouvent un fun que le mode solo avait vite érodé. Pour quelques temps.
On peut blâmer Fighting Angels pour l’image qu’il donne de la femme avec ses potiches sans cervelle qui se tapent dessus. Mais sa réalisation est tellement légère voire maladroite (mon Dieu, leurs poitrines!) qu’il est difficile une fois la manette en main de ne pas prendre tout ça au second degré. Quant aux pervers qui voudraient s’émoustiller un peu, ils risquent de déchanter. Même pas de combats dans la boue, diantre. Bien sûr, Fighting Angels n’est pas le jeu du siècle et ferait hurler certains intégristes de jeux de combats. Pourtant, il est fidèle à ce qu’il est, un petit jeu sans prétentions, parfois amusant et souvent malgré lui, qui fut vendu à petit prix et qui se paye le luxe d’être plutôt agréable à jouer. Un bon petit jeu de seconde zone qui pourrait plaire aux amateurs prévenus.