Après un 7ème épisode qui a fait basculer une partie du monde occidental des gamers dans la dimension J-RPG, Squaresoft était attendu au tournant à la sortie de Final Fantasy VIII, avatar voulant à la fois faire table rase du passé technique (la PS1 avait de la réserve), du passé gameplay (les matérias, c'est tabou, on en viendra tous à bout), et du passé scénaristique de son aîné.
Au moment de se lancer là-dedans, mon âme totalement dévouée à l'immonde Sephiroth est pourtant abasourdie devant la cinématique d'introduction de FF VIII :
[Insérez ici le juron le plus fort que vous connaissez], que c'est beau !
Cette scène, relevée par une musique d'un niveau épique, envoie du pâté. Et soyons francs, même en 2015, elle ne fait pas pitié techniquement.
C'est d'ailleurs une remarque générale concernant le niveau technique de ce jeu : les décors vieillissent bien, les modélisations ne sont pas ridicules (coucou la SD de FF VII), les invocations en envoient encore pas mal dans la tronche, l'OST claque fort bien dans les oreilles, bref, que ce soit en 1999 ou en 2015, il est parfaitement inutile de consulter si on trouve l'ensemble agréable à regarder et à écouter.
En parlant d'invocations, tiens, passons maintenant à la partie gameplay. Et là, les choses se corsent un peu.
- Le niveau des mobs qui s'adapte au vôtre ? Pas bête.
Sauf que dans les faits, l'adaptation se fait plus ou moins par tranches de niveau. Résultat, il m'est arrivé plus d'une fois de changer de niveau et de me retrouver d'un seul coup en grosse difficulté face à un monstre qui, le combat précédent, se faisait latter la gueule dans le plus grand des calmes.
- Utiliser la magie pour booster ses persos ? Excellente idée.
Sauf qu'on est rapidement tentés par le grinding des magies les plus puissantes... et qu'une fois bien équipés, il n'y a en fait strictement plus aucun intérêt à utiliser la magie. Des coups normaux, des invocs pour les gros mon-monstres qui refusent de se faire one-shot, et ça suffit, merci, au revoir.
Et ça rend d'ailleurs l'adaptabilité du niveau risible : si votre équipe est bien pourvue, il n'y aura guère qu'un ou deux boss qui seront en mesure de vous poser des problèmes (le boss final étant, comme dans l'épisode précédent, plus longuet que vraiment compliqué), le reste se destinant à servir de chair à gunblade, et ce, peu importe votre niveau.
- Des invocations liées aux personnages qui s'en servent et qui se détestent entre elles ? Génial !
Sauf qu'au final, cela implique surtout de se retaper des CUT-SCENES NON-COUPABLES D'UNE LONGUEUR PARFOIS TOTALEMENT DÉMESURÉE (Orbital, les vrais savent) juste pour diminuer le temps d'invocation et augmenter la puissance balancée dans la tronche de l'ennemi. C'est beaucoup d'emmerdements pour si peu, et priez pour ne pas avoir à switcher entre Ifrit et Shiva sur un même perso, par exemple...
C'est d'autant plus dommage que pour le reste, les limit breaks et les petites subtilités de gameplay (la touche qui double les dégâts chez Squall par exemple) rendent les combats relativement nerveux et sympas, et que les mini-jeux proposés (Triple Triad, mises en scène pour le scénario) sont assez rafraîchissants.
Abordons enfin la partie qui fâche le plus : le scénario.
Certains personnages jouables ne sont absolument pas travaillés (et raccordés au reste par un twist particulièrement douteux), et quand aux autres...
Entre la sorcière-directrice d'orphelinat-méchante-pas-très-gentille-enfin-je-sais-pas et toute cette racaille adolescente d'un réalisme criant (le héros trod4rk qui au fond de lui a un petit kokoro tout guimauve, sa future amoureuse qui conjugue badasserie et débilité crasse, l'antagoniste euh... juste con comme une chaise, et j'en passe), les personnages qui se greffent en dernière minute dans l'histoire, et le trio de bons losers qui semble être la seule équipe à inspirer quelque chose d'autre que de longs soupirs de consternation... voilà, que ce soit à 15 ou à 30+ ans, au bout d'un moment, ça finit par me gonfler.
Le déroulement du scénario ? On finit par s'en foutre, tant l'histoire d'amour adolescente étalée finit par saborder tout ce qui aurait pu être un tant soit peu épique.
Je dis bien "on finit par s'en foutre", car durant les deux premiers CD, on se dit qu'un gros truc est en train de se préparer. Les notions de géopolitique sont traitées par-dessus la jambe, les thèmes abordés le sont assez grossièrement, mais il y a quelque chose qui se précise, les twists sont raccords, certains passages sont vraiment cools, ça peut finir dans des proportions assez épiques. Mais en fait, splouch.
Pour conclure, peut-être que cette critique vous paraîtra dure, d'autant plus si FF VIII est votre premier JRPG.
Mais elle est à la hauteur de la déception que j'ai pu avoir après 40h de jeu. Déjà à l'époque, j'ai trouvé le dernier tiers du jeu pénible et la fin quasiment dépourvue d'intérêt, au point finalement de bousiller totalement l'enthousiasme des premières heures.
Et le recul de l'âge me conforte malheureusement dans l'idée que ce jeu est un gâchis intersidéral qui aurait mérité tellement mieux comme scénario... même si quelques équilibrages de gameplay auraient aussi été bienvenus.