Final Fantasy X-2 par Joro Andrianasolo

Comme beaucoup j'ai découvert Final Fantasy avec le septième sur Playstation. Comme beaucoup aussi, j'adhère totalement au culte général (mérité) voué à FF VI et FF VII. Deux sommets vidéoludiques en leur temps, symboles d'une certaine maturité pour le JRPG, ou au moins d'une avancée sgnificative en termes d'écriture scénaristique, de narration et de gameplay.

Mais ... (paradoxalement diront certains), je défendrais aussi toujours deux des épisodes de la série les plus haïs, les plus méprisés par les fans. Final Fantasy VIII (sur lequel je reviendrais en détails dans une autre critique) et Final Fantasy X-2 qui nous intéresse aujourd'hui (mais pas FF XIII par contre hein, faut pas déconner).

FF X-2 aura été la première suite directe d'un FF canonique. Même moteur graphique donc et même univers. C'est toujours assez beau pour l'époque. Mais le jeu choque. Il choque parce qu'il est en dans son ambiance générale opposé en tous points à l'épisode fondateur auquel il succède. Les gens sont joyeux, les personnages enjoués et la scène d'introduction résume parfaitement ce ressenti. La Yuna que l'on a connu timide et soumise à ses devoirs d'invoqueur se transforme sous nos yeux en idol j-pop, tout ce qu'il y a de plus putassier. A ce propos, les musiques du jeu sont globalement atroces, à 2 ou 3 exceptions près, mais j'y reviendrais.

Dans FF X-2, on suit les Albatros (Gullwings en VO) le girls ban... euh la bande de chasseurs de sphères que Yuna a formé avec Rikku (dont l'apparence physique a elle aussi pas mal été viol... euh évoluée), et la nouvelle venue Paine. Cette dernière prend en quelques sortes la place de Lulu de par son caractère taciturne. Notez que ce seront les seuls personnages qu'on contrôlera du début à la fin. Aidés par Frangin et toute une équipe, elles parcourent ainsi les quatre coins de Spira, à la recherche de sphères chargées d'images. Il faut savoir qu'à l'origine de cette aventure, Rikku trouve une sphère vidéo où l'on aperçoit quelqu'un ressemblant à Tidus (SPOIL à ceux qui ne l'ont pas terminé: ce dernier disparaissait à la fin du premier FF X). C'est ainsi que Yuna s'engage chez les Albatros, pour tenter de découvrir s'il y a une chance pour elle de le retrouver.

Le jeu pose un point de vue assez original. A ma connaissance, c'est le premier Final Fantasy à nous permettre de jouer ce qui se passe "après avoir sauvé le monde". Forcément, après des décennies à subir la tyrannie de Sin et les innombrables invoqueurs qui avaient été sacrifiés à travers les préceptes de Yevon, les habitants de Spira allaient changer. Nos anciens héros allaient forcément changer. Beaucoup de fans de FF X ont été dégoûtés par la mutation de leur héroïne en pétasse/magical girl/poseuse et on peut le comprendre. Moi j'ai joué le jeu, accepté que c'est ça, sa vraie personnalité, libre de s'exprimer pleinement après des années de soumission à la religion et aux traditions.

Le peuple de Spira, lui, s'est divisé en factions, certains rejetant massivement les anciens rites, d'autres plus conservateurs tentant de redorer l'image de l'église après la révélation des machinations derrière Sin. En cours de route, on découvrira (sans surprise) que les enjeux sont bien différents de ce qui s'annonçait. Et je dois avouer que c'est à ce niveau là que le jeu déçoit. Les personnages de Shuyin et Lenne, dont les destins tragiques ont été pensé comme un parallèle avec ceux de Tidus et Yuna dans le passé sont vraiment très mal amenés. Sitôt que les révélations à leurs sujets ont été faites, on ne suit plus trop l'aventure avec grand intérêt.

Vous l'aurez compris, le scénario et la narration de Final Fantasy X-2 sont décevants. Pourtant les bonnes idées ne manquaient pas. C'est le premier FF à proposer des choix scénaristiques (certes minimes) qui impactent vraiment la suite et la fin du jeu. Il propose aussi une progression non linéaire, dans le sens où, même s'il n'y a toujours pas de carte du monde, on a le choix d'aller où l'on veut assez tôt dans l'intrigue. Le jeu est en effet réparti en 5 actes, eux mêmes divisés en missions, que l'on peut plus ou moins accomplir dans l'ordre que l'on veut, bien que certaines ne soient pas toutes disponibles au même moment.

Les combats sont, par rapport à ceux du X, monstrueusement rythmés. Yuna ayant détruit ses chimères dans l'épisode d'origine, il n'y a plus d'invocations. A la place, nos 3 héroïnes disposent de vétisphères, des tenues qui leurs confèrent différents "jobs" semblables à ceux de Final Fantasy V. On a ainsi des mages blanc, mages noir, tireuses, voleuses, chevalier noir, guerrière etc. la transformation d'une tenue à l'autre se veut d'ailleurs étincelante, à la Sailor Moon. Beaucoup n'ont évidemment pas apprécié, mais ce style de jeu apporte un dynamisme assez rare dans la série. Quant à l'évolution des personnages, on retourne au système de niveaux classiques (ce qui me ravit, n'ayant pas aimé le sphérier).

Je parlais plus haut de choix scénaristiques, ils sont certes très peu nombreux, mais apportent une replay value conséquente. Cet épisode propose en effet un New Game+: une fois l'aventure terminée on peut la refaire en gardant tous ses objets, ses armes, mais pas ses niveaux.Il faudra d'ailleurs avoir terminé le jeu au moins deux fois pour pouvoir espérer la fin "parfaite". Car oui, en fonction de certaines actions, le jeu se termine différemment. D'un autre côté, en considérant la déception scénaristique que j'ai évoqué plus haut, c'est un peu moins motivant. Pour ma part, j'y suis allé à fond (3 New Game+ et plus d'une centaine d'heures de jeu), plus par curiosité de découvrir les différentes conclusions possibles que par réel engouement pour l'histoire. Les quêtes annexes sont nombreuses, bien différentes de celles quasi-infaisable dans FF X, mais proposant un challenge de taille (vétisphères ultimes, Méga-boss cachés ...).

Les musiques que j'ai déjà mentionnées sont ouvertement orientées j-pop du plus mauvais goût qui soit. Les seules raretés à sauver étant le superbe "Abyss of the Farplane" que l'on peut entendre dans l'avant-dernier donjon, la délicate "Eternity - Memory of Light and Wave" au tout début ainsi que les deux morceaux qui concluent le jeu.

Final Fantasy X-2 est pour moi un exemple parfait du cas: "scénario perfectible+gameplay péchu et hyper-rejouabilité". Aussi surprenant que ça puisse être, j'adore le jeu, en dépit de ses faiblesses scénaristiques, de sa bande son qui me sort par les yeux. L'affect influence sans doute mon jugement, car même si je ne suis pas le plus grand fan d'FF X qui soit, j'ai été touché par cet univers particulier. Le retrouver travesti par "l'aura post-sauvetage du monde" m'a fait accrocher. C'est quelques part, une parodie de Final Fantasy, on garde les codes de la série et on le maquille avec des artifices de djeunz japonais moyen.

Certains n'ont pas voulu voir plus loin que l'imagerie grossière et exagérément fan-service, on ne peut pas le leur reprocher. Mais pour ceux qui n'ont pas une vision figée de ce que doit être Final Fantasy, ça mérite d'être essayé.


PS: au Japon uniquement (hélas) il existe également la version "International + Last Mission" qui comporte de nombreux ajouts, dont la mission ultime, se déroulant chronologiquement après la fin d'FF X-2. Cette partie permet d'explorer un nouveau lieu: la Tour de Yadonoki, mais aussi d'effectuer de combats au Monster Colosseum. Des fois j'enrage de ne jamais avoir pris le temps d'apprendre le japonais.