Précision : Il s'agit d'une critique de la "Royale Edition", et je n'ai jamais joué à la version vanilla de FFXV.
La saga Final Fantasy est atypique dans le paysage vidéoludique, dans le sens où à chaque numéro, on change d'histoire, de personnages, d'univers, d'ambiance et même parfois de genre (le 11 et le 14 sont des MMO). Je prends donc chaque épisode pour ce qu'il est : un nouveau jeu.
Ou plutôt, comme un nouveau JRPG. Car j'aime tous les types de RPG, qu'ils soient occidentaux ou japonais, mais pas pour les mêmes raisons. Dans un JRPG, je recherche des personnages hauts en couleur, des paysages exotiques, des moments épiques, un peu de drama… et en général, les Final Fantasy font tout cela plutôt bien.
Voyons comment s'en sort cet épisode.
Après une courte cinématique, c'est sur l'image de nos héros poussant une voiture en panne, paumé en plein désert, qu'apparaît le titre à l'écran. Maintenant que j'ai fini le jeu, l'ironie de cette image me paraît terrible. Car tout dans FFXV ressemble à cette voiture en panne : une jolie carrosserie qui cache un moteur qui tousse.
On incarne donc Noctis, jeune prince de Lucis accompagné de sa garde rapprochée, Gladiolus, Ignis et Prompto. Ce quatuor seront les seuls personnages que nous jouerons tout le long du jeu, et nous sont donnés d'entrée de jeu. C'est dommage car cela nous prive du plaisir de les découvrir progressivement et de composer notre équipe. Heureusement, ils sont plutôt attachants. Même Prompto, le rigolo de service, n'est pas une tête à claque. Par contre, ils seront peu développés. On finira le jeu sans en connaître beaucoup plus sur eux qu'au début. Et c'est encore pire pour le reste du casting, insipide au possible. Aucun personnage n'est marquant, à deux exceptions près : Aranea, parce qu'elle a un chara design qui sort du lot, et Ardyn. Il est l'élément central du scénario, alors je n'en dirais pas plus, hormis qu'il est le seul personnage intéressant du jeu.
Quant à l'histoire, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle est très mal racontée.
Noctis quitte la capitale de son royaume pour se rendre à Altissia, où il doit épouser la princesse Lunafreya. Je passe les détails, mais à un moment, on doit passer une nuit à l'hôtel et se déclenche alors une cinématique des plus étrange. On voit la capitale de Lucis se faire attaquer et des gens se battre. On reconnaît le roi Régis parce qu'on l'a vu deux minutes dans l'intro, mais à part ça, on ne nous explique rien. Le montage est complètement lunaire. Une vague musique d'ambiance couvre des images sans dialogues ni même un seul bruitage. Qu'est-ce que j'ai vu ? Une bande annonce ?
Presque. Après m'être renseigné, il s'avère que cette "cinématique" n'est qu'un montage d'extraits du film Kingslaive. Donc Square Enix, au lieu de faire une belle cinématique dans leur jeu, pour illustrer un moment crucial de l'histoire – celui qui doit impliquer le joueur dans la quête principale – a préféré la remplacer par un montage fainéant d'images tirés d'un film. Le pire c'est que pour comprendre quelque chose à ce montage, il faut avoir vu le film, mais si tu l'as déjà vu, tu n'as pas besoin de voir ce montage. Honteux.
Et ce côté chaotique se retrouve tout le long du jeu. Dans la première moitié, en open world, la quête principale, diluée dans le contenu secondaire, peine à nous impliquer. Puis le jeu devient d'un coup beaucoup plus linéaire et l'histoire plus intéressante, même si on a toujours l'impression qu'il en manque des bout ici ou là.
Enfin le dernier chapitre est sans doute le meilleur. Il enchaîne les twists scénaristiques et les scènes épiques et on se dit qu'on a enfin un grand jeu, sauf qu'on est déjà à la fin.
Pendant la partie open world, le contenu secondaire n'est franchement pas terrible. Les quêtes optionnelles sont inintéressantes au possible. Par exemple, un gars nous demande de récupérer des médailles de chasseurs tombés au combat. Dans les faits, cela consiste à se rendre dans une zone indiquée sur notre carte et à scruter le sol jusqu'à repérer un petit point lumineux. Ensuite on clique dessus et on retourne voir le gars pour toucher la récompense. On reverra le même gars cinq ou six fois, toujours pour la même quête. Et il y en a des tas d'autres dans le genre : trouver des grenouilles, des pierres précieuses. prendre des photos… toutes enrobés de dialogues insipides.
Les quêtes de chasse sont à peine mieux. Pour le coup, ils ne se sont même pas embêtés avec les dialogues. On choisit un monstre (ou un groupe de monstres), ça indique sur notre carte où il se trouve, on y va, on le tue, et c'est plié. Les monstres sont juste des swap color de ceux qu'on trouve habituellement dans la région, et souvent on les retrouvera ailleurs plus tard dans le jeu.
Il y a très peu de quêtes secondaires intéressantes. De tête, je n'en ai retenu que deux : la quête de Mortœil, qui est bien mise en scène et qui en plus débloque l'accès aux chocobos, et la quête des armes fantômes, parce qu'elle est liée à la quête principale (on en récupère automatiquement une partie, mais pour le reste, il faudra les chercher nous-même) et qu'elle nous fait visiter de chouettes donjons.
Pour le reste des activités secondaires, la pêche est cool, si comme moi on aime ça, par contre les courses de chocobos sont navrantes. Des un contre un sur un terrain vague sans public ni ambiance. Par contre, les chocobos sont super cool pour l'exploration.
Les graphismes sont très beaux, mais la direction artistique est assez inégale.
Le bestiaire est plutôt réjouissant. Les monstres sont superbes et bien animés. Certains sont d'une taille impressionnante. On retrouve avec plaisir les ennemis emblématiques de la série comme les Tomberrys ou les Ekarissors, par exemple. Il y du swap color, bien sûr, mais le bestiaire est suffisamment varié pour éviter la monotonie.
C'est au niveau des environnements que je suis le plus mitigé. Quelques lieux sont magnifiques, mais ils ne sont pas si nombreux. On passe bien plus de temps dans du désert, de la plaine ou de la forêt très générique. Les stations-service, qui font office de villages, sont toutes identiques, avec leur fast-food et leur mobile home en guise d'hôtel. Par moment, on a plus l'impression d'être dans un GTA moddé que dans un Final Fantasy. Les deux seules villes du jeu sont Lestallum, d'inspiration vaguement cubaine et Altissia, clairement vénitienne. Pour cette dernière, à notre arrivée, on a un "effet waouh", parce que la cinématique nous promet une ville gigantesque, mais on déchante très vite car on a accès qu'à un quartier minuscule.
Pour voyager dans cet open world, on a notre voiture, la Regalia, qu'on préfèrera laisser en conduite automatique, tant la conduite manuelle est horrible. La voiture suit la route comme sur des rails, on ne peut que ralentir ou accélérer. Gauche et droite ne servent qu'à choisir la direction aux carrefours. Pour l'exploration, on aura le choix entre la marche à pied ou les chocobos. Attention au cycle jour/nuit car la nuit les monstres sont beaucoup plus dangereux. Ça pique la première fois !
Les combats sont en temps réel. Même si on a une équipe, on ne dirige que Noctis. Nos alliés font ce qu'ils veulent et on a aucun contrôle sur eux. Une fois la mêlée engagé, la caméra bouge dans tous le sens et les ennemis sont tellement mobiles que les affrontements sont vite brouillons. En plus, les combat s'articulent autour de l'attaque éclipse, la capacité de Noctis de donner des coups en effectuant des mini téléportations, ce qui n'arrange pas la lisibilité de l'action. Au final on s'en sort malgré tout et ça reste sympa à jouer.
Quant à la magie, elle est uniquement offensive et se limite à trois effets : feu, foudre et glace. On peut en faire varier l'intensité, la zone d'effet et la durée, mais c'est quand même très limité. Et qui a eu l'excellente idée de gérer le friendly fire dans un jeu où on ne contrôle pas les alliés ? Bilan des courses, on jette un gros sort en début de combat, et ensuite on ne s'en sert plus.
Pour les invocations, c'est encore plus simple, on ne peut pas les lancer nous-même. C'est le jeu qui décide. De temps en temps, et selon d'obscures conditions qu'on ne connaît pas, un message apparaît lors d'un combat nous invitant à lancer une invocation. Pour tout dire, dans ma partie cela ne m'est arrivé que deux fois. Et toujours pour des combats que j'aurais pu gagner sans. Frustrant.
Pour les musiques, le constat est sans appel. J'ai le souvenir qu'il y en a de très belles, lors des cinématiques ou des combats de boss, mais je n'en ai retenu aucune. Le problème, c'est qu'on passe tellement de temps en voiture, avec l'autoradio, qu'on écoute plus souvent les OST des anciens FF que celle de celui auquel on est en train de jouer. Si vous me demandez quelles sont mes musiques préférées dans FFXV, je vous répondrais "One Winged Angel" et "Liberi Fatali". C'est tout de même triste ! (ce sont des musiques de FF7 et FF8, pour ceux qui ne le sauraient pas.)
Au final, si je mets un 6 à ce jeu, malgré sa longue liste de défauts, c'est que je me suis tout de même amusé. Ma partie a duré un peu plus de 120 heures, et je ne resterais pas aussi longtemps sur un jeu si il n'avait aucune qualité. La direction artistique est inégale, mais il y a de beaux donjons et un chouette bestiaire. Les combats sont brouillons, mais tout de même plaisants à jouer. L'histoire est mal racontée et peine à démarrer, mais elle devient de plus en plus intéressante et le final est excellent.
Bref, un jeu clairement pas à la hauteur de ses ambitions, mais que je suis content d'avoir terminé malgré tout.