Firewatch est un "beau" jeu, le genre de jeu qui parle d'une expérience humaine et qui va toute en sobriété parler de la vie, de ses hauts, de ses bas... tout en abordant tout un tas de petites choses que l'on a tous déjà vécues ou que l'on vivra tous. Et c'est pour ça que Firewatch est aussi réussi qu'il est dirigiste et rigide.
Parce que oui, même si je n'ai rien contre le fait qu'il soit dirigiste, notre personnage est assez lent, il ne peut grimpouiller seulement à des endroits précis pas toujours identifiables, souvent, du moins au début, on ne sait vraiment vers où aller, ce qu'on doit faire précisément alors on se promène, on essaye de regarder le ciel pour voir où sont ces feux d'artifices que l'on doit arrêter, les routes ne sont pas réellement tracées sur la carte, donc on se retrouve à se bloquer dans des ronces, contre des cailloux en se demandant si on peut passer... ou pas...
et c'est le défaut du jeu. On peut faire un jeu dirigiste, sans donner d'indications précises en mettant une flèche sur une carte et un gros point "objectif", avec une belle ligne entre la flèche et l'objectif, ce qui aurait de toute façon fait perde à ce jeu son côté réaliste, mais il faut que ça soit fluide dans les déplacements, surtout que là on se traine vraiment et même si la carte n'est pas bien grande, lorsqu'on est pas entrain de parler avec D. et bien c'est un peu gavant. Surtout que bien souvent je ne savais pas si j'étais sur le bon chemin.
Mais voilà ces défauts, qui en sont malgré tout, ne donnent jamais envie d'arrêter de jouer où ne nuisent pas réellement à l'expérience de jeu proposée, car on a vraiment quelque chose d'assez touchant et de très juste dans ce qu'il décrit. Car ce jeu c'est avant tout une relation à distance entre deux personnes qui ne se voient pas, isolées chacune dans une tour de guet pour surveiller qu'il n'y ait pas de feu de forêt...
Et j'aime beaucoup cette idée, le fait qu'ils ne se voient pas, on est obligé d'imaginer, le fait qu'il se passe des choses mystérieuses et que comme les personnages on laisse notre imagination s'emballer. Je trouve ça très réaliste et très bien amené.
Si bien amené et si réaliste que comme dans la réalité, la fin est décevante et c'est parce qu'elle déçoit que le jeu est marquant, sans ça on aurait perdu de la crédibilité, du réalisme et finalement de l'émotion car on ne serait plus dans une situation à laquelle, nous, gens normaux, pourrions vivre dans les mêmes conditions. L'amertume de la vie.
Alors j'ai lu des tas de théories sur le jeu... Je suis totalement atterré... ça me tue les gens qui sont obligés de chercher des théories sur rien, il n'y a rien à comprendre, c'était juste une belle aventure humaine. Certes quelques points restent obscurs, notamment un coup de téléphone que passe D. au début, ou bien des documents que l'on trouve... Mais rien qui ne vienne justifier une surinterpréation et qui flingue totalement ce qui fait la beauté du jeu, c'est-à-dire sa simplicité.
D'ailleurs j'avais vraiment peur à un moment (tout en était paradoxalement assez excité) que l'histoire parte totalement en couille façon Lost (du moins les premières saisons, lorsque c'était du partage en couille encore tolérable)...
Et je ne comprends même pas cette envie de surinterprêter quand l'explication logique la plus simple se tient parfaitement, ça montre à quel point notre société n'a plus de sens, les gens cherchent du sens là où il n'en a pas au lieu de se contenter de la vie et de la douce amertume qu'elle nous laisse comme arrière goût.
Je pense qu'il faut se laisser immerger par les relations qu'on nous propose... j'aime beaucoup l'introduction du jeu où l'on nous "narre" la rencontre avec notre femme... c'est tout simple et pourtant en 5 min, avec juste du texte on arrive à nous faire éprouver de l'empathie pour notre héros. Et je trouve ça vraiment bien.
Et j'éprouve de l'empathie car, comme le disait Rousseau, je peux me reconnaître vu que j'ai déjà vécu la même chose, ou j'ai peur que ça m'arrive également...
D'ailleurs tout le jeu suinte l'été, ce moment où l'on fait des rencontres comme dans un film de Rohmer, mais aussi là où on va s'imaginer des choses, où on est seul et on laisse son imagination divaguer...
Et je trouve ça bien de proposer ça et de réussir à le proposer, même si j'aurai aimé que ça soit plus long, avec encore plus de discussions à propos de tout et de rien... Le fait que ça soit un jeu et pas un film permet de multiplier ces petites discussions, les petites blagues qui ne servent pas l'intrigue et de je divaguer... tout en se sentant forcément impliqué étant donné que c'est nous qui répondons (même si ça n'a pas une grande importance dans l'histoire), forcément on s'implique et on veut passer un bon moment... et vu que cette voix est notre seule interlocutrice, on va s'attacher à elle.
Bref, c'est vraiment pas mal, malgré la lourdeur du gameplay.