Forza Motorsport 4, le début d'un règne
Dès les premiers tours de roues, j'ai craint que le public et la presse ne passent trop rapidement sur ce qui me semblais déjà être une petite merveille et un véritable choc pour l'ancien amateur de simulation que j'étais. L'industrie du jeu vidéo dévale aussi vite les pentes du marché que les bolides que vous allez pouvoir piloter dans Forza 4. De nos jours, on passe d'un jeu AAA à un autre sans se poser ou remarquer l'impact que peut avoir un jeu sur l'industrie, ou plus important, sur les joueurs.
Je disais donc : Forza 4 m'a totalement renversé et, en un instant, réconcilié avec la simulation automobile. La demande du public d'en avoir toujours plus – une pelleté de voiture alignées comme argument salvateur ne m'excite pas plus que ça -, m'avait éloigné de l'asphalte. En effet, cette surenchère de contenu, ce manque d'immédiateté m'apparaissait comme un détour fallacieux des développeurs afin d'éviter le cœur du jeu : la conduite. Puis Need for Speed Shift m'a doucement titillé. Sa nervosité et son parti pris recentrait le débat sur l'essence même du genre. La série des Forza s'inscrit dans cette démarche d'instantanéité et dans cette ébullition de sensations. Car le jeu prend réellement aux tripes. On ressent littéralement la voiture entre ses doigts, la conduite est jouissive, quasiment viscérale. Au delà des graphismes sublimes du titre, c'est le travail sur le son qui m'a totalement estomaqué. Ce dernier est tout bonnement exceptionnel. Frappant ! C'est vraiment le mot, car une fois dans le cockpit (une vue parfaite, dynamique et très jouable) c'est l'atmosphère sonore qui va vous mettre une claque et vous transporter dans la peau d'un pilote. Délectables et assourdissants, les vrombissements des voitures sont grisant, ils hérissent le poil et nous intiment de pousser plus loin la gâchette d'accélération pour entendre un peu plus fort ce doux ronronnement.
Mais Forza 4 va plus loin qu'une simple démonstration auditive. Ca volet tire de son chapeau le lapin que toutes les grandes franchises révéraient de posséder : une alchimie magique, capable de convenir à tous les joueurs. Forza 4 réalise le miracle de séduire l'amateur de belles voitures, tout en rendant totalement amoureux les allergiques. Le jeu rassemble, sans exclure. Ce qui pourrait s'apparenter à un slogan politique représente en fait une formule qui s'applique à merveille à Forza 4. Le titre gratifie le puriste une fois l'ensemble des aides désactivées, tout en accompagnant les moins avisés, de façon naturelle et agréable. Profond, mais abordable, Forza 4 ne vend pas son âme au diable sur l'autel de l'ouverture et parvient à faire le grand écart entre les joueurs. Un exploit qu'un Gran Turismo 5, trop rouillé, sclérosé et renfermé sur lui même, n'arrive malheureusement plus à réaliser. Avec une constance remarquable, Forza 4 renvoie son concurrent dans les corde pour asseoir une domination néanmoins présagée depuis le précèdent épisode.
Cet épisode prend le meilleur des deux mondes : l'immédiateté et la nervosité de l'arcade, le tout construit sur des fondations directement puisées dans le patrimoine de la simulation. Ses couleurs criardes, sa gestion de la lumière saturée (empruntée à une technologie de chez Pixar) et son accessibilité de façade rappellent inévitablement les heures passées sur une borne. Mais la magie s'opère quand l'amalgame avec ces éléments se mêlent à une rigueur insolente du pilotage. Parfois le goût prononcé de Forza 4 à la flexibilité peut déranger. Pour plus de fluidité, le jeu oubli la notion de challenge en ne rendant pas la victoire obligatoire pour évoluer dans le mode carrière. De plus, les contraintes imposées pour chaque épreuves, celles-la même qui nous astreignaient à certains bidouillages des voitures et autres allers-retours entre les concessionnaires, sont à présent absentes. Une ritournelle brillamment imaginée par le premier Gran Turismo qui évoquait un brin le RPG. À présent, seuls les niveaux du pilote et d'affinité avec les constructeurs perdurent tels les derniers vestiges d'un joli mariage.
Ce Forza est une réussite quasi parfaite détrônant ainsi sur presque tous les points son concurrent Gran Turismo 5. Mais même si Forza 4 devient le nouvel étalon du genre, j'ai un petit pincement au cœur. Le basculement des franchises japonaises m'attristent. Les icônes que sont PES et GT choient désormais lourdement face à leurs homologues occidentaux. Il faut reconnaître l'évidence, FIFA et Forza sont indubitablement supérieurs à ces pionniers déchus. Mais ayant été bercé par les productions de Seabass et Yamauchi, j'ai un peu de peine à les voir passer le flambeau. À l'époque, les PES ou le premier Gran Turismo m'avaient à ce point bouleversé qu'expérimenter à nouveau une émotion (quasi) équivalente aujourd'hui est presque dérangeant. Il faut vivre avec son temps. Le Roi est Mort. Vive le Roi !
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