J'avais beaucoup aimé Frostpunk 1, sans y avoir passé des dizaines d'heures pour autant car la campagne principale est très bien ficelée et l'alliance scénario / gestion de communauté était à mon sens un super équilibre. Frostpunk avait réussi à proposer quelque de rafraichissant avec un jeu de gestion classique dans beaucoup d'aspects (production de ressources, gestion d'une petite population, construction,...) mais en y incluant un environnement et un climat contraignant nous poussant à faire des choix parfois un poil borderline... Oups les enfants envoyés travailler dans les mines pour pallier le manque de main d'œuvre et oups encore les migrants qu'on ne peux pas accepter dans notre ville parce qu'on a déjà plus rien à manger...
C'était évidemment là que le premier Frostpunk prenait tout son charme, on se sentait assez proche de notre communauté et les choix qu'on faisait était régulièrement visibles directement dans notre petite ville, on ressentait le froid qui endort nos travailleurs ou le mécontentement du rationnement en nourriture avec un système d'info-bulle narratif plutôt réussi. Avec ce sentiment de prendre des décisions inévitables mais tellement contraire à nos idées.
C'est sur cet aspect en particulier que le deuxième opus du studio polonais se détache un peu, terminée la gestion par bâtiment et place à la création de quartiers entiers, terminé le choix quasi au cas par cas concernant les habitants et place à la gestion d'une grande, très grande masse d'individus. Le choix a clairement été fait de garder le même schéma narratif et le même environnement tout en élargissant la partie "jeu de gestion" et cela selon moi au détriment de ce qui faisait un peu plus l'essence de Frostpunk c'est à dire la proximité avec les habitants de notre communauté.
C'est le passage d'une forme de micro gestion à quelque chose de plus "classique" à l'image d'un Simcity / City Skyline avec de nouveaux quartiers qui ajoutent de la profondeur dans la construction de la ville, de nouveaux bâtiments, de nouvelles productions. La dessus le jeu n'est pas radin et c'est tout de même très réussi. L'aspect gestion de ressource fonctionne, on a toujours le sentiment de pouvoir basculer en quelques minutes de l'opulence à la crise selon la météo ou quelques évènements inattendus ou planifiés. On est sur la corde en permanence et jamais à l'abri que tout s'écroule.
C'est d'ailleurs sur ce point là que Frostpunk 2 marque le plus de point par rapport à son prédécesseur, on est bien servi niveau décisions à prendre. Politiques d'abord avec un tout nouveau système de lois et de gouvernement, il faut s'adapter aux demandes des différents groupes communautaires qui composent notre ville et donc jongler entre la diplomatie et l'autorité avec constamment des négociations à mener pour remporter les votes au parlement. Cet aspect est bien réussi même si on sent le scénario sous jacent qui pousse parfois dans un sens ou un autre, la partie peut être perdu suite à de mauvaisse ou trop ambitieuses décisions de même qu'il faut parfois se résoudre à aller "dans le sens de l'histoire" pour avancer. L'arbre des lois est complexe et l'on peut également affirmer son autorité avec des politiques clairement fasciste, mais eh faut bien faire ce qu'il faut pour suivre nan ?
Niveau économie on est un peu plus proche du 1 mais c'est bien plus fourni et il faut très vraisemblablement plusieurs parties pour pouvoirs explorer toutes les possibilités, comptez d'ailleurs une quinzaine d'heures pour la campagne principale. Chaque technologie choisie se retrouve plus ou moins supportée par un des groupes composant notre communauté et on a vraiment le sentiment de faire des choix de société intéressants. L'intrication des choix politiques et technologiques est super prenant et demande à regarder en détails les conséquences de nos choix. C'est d'ailleurs parce que ce système est un succès que je regrette de ne plus me sentir aussi proche qu'avant de la population, même en zoomant la carte au max on ne distingue plus que les trainées de lumières laissées par leurs passages. La dessus, le jeu aurait gagné à nous faire interagir avec des personnages tout au long de la campagne, renforçant ainsi les relations humaines qui sont trop absentes du jeu.
L'aspect exploration est lui aussi renforcé avec toujours cette étendue gelée à découvrir mais avec une grosse différence, la possibilité de développer deux nouvelles villes, qui auront une existence bien précise (production d'un type de ressource notamment), on se retrouve alors dans le jeu à devoir jongler avec trois villes et leurs enjeux. Si cela rajoute de la profondeur à l'aspect gestion, elle nous éloigne d'autant plus de notre communauté d'origine et de l'attachement à sa survie.
La survie d'ailleurs, j'avais adoré Frostpunk 1 pour sa capacité à me faire comprendre que tout peux s'effondrer rapidement, que mes rues se vident quand je n'ai pas bien géré la distribution de chaleur, que les habitants tombent malades et meurt par exemple. Un sentiment de survie au cas par cas qui disparait dans ce jeu au profit de la survie de la ville face au chaos politique qui pourrait être engendré par de mauvaises décisions et par les révoltes menées par un des groupes de la ville. Un changement d'échelle encore une fois mais qui marque une vraie différence dans le ressenti qu'on a en jouant.
Points positifs :
- Un gameplay enrichi dans l'aspect jeu de gestion,
- Un système de décisions politiques + complexe et + engageant,
- La gestion de nouvelles villes,
- Ambiance sonore,
- Direction artistique très réussi,
Points négatifs :
- Le sentiment d'être déconnecté des habitants de notre communauté (c'était la force de Frostpunk 1)
- La gestion de deux autres villes (on se sent comme un magnat de l'immobilier + que comme le leader d'une communauté qui survie),
- Un scénario intéressant mais dont on sent parfois peut être un peu trop ou il nous emmène (surtout en late game)