Après avoir cartonné en sortant une adaptation plutôt réussi d'une série à succès, quelle évolution plus logique que d'adapter LA série à succès de ces dernières années à la sauce Telltale ? Enfin évolution c'est un bien grand mot.
Autant jouer cartes sur table, je suis un lecteur des bouquins du Trône de fer et par conséquent cela peut influencer mon jugement sur l’œuvre. Toutefois je suis également conscient de l'impossibilité de retranscrire avec exactitude un univers aussi dense, surtout que le jeu se base sur la série, qui a déjà dut effectuer des simplifications. De plus je suis tout à fait réceptif au style de jeu Telltale.
Nous voilà donc propulsé a Westeros lors des noces pourpres, à ce propos il faut souligner qu’il est impératif d’avoir terminé la saison 4 de la série (ou l’intégral 3 de la série littéraire) pour éviter que le jeu ne vous spoil pas honteusement quelques-uns des évènements les plus marquant de l’histoire. On nous présente les Forester, maison noble du Nord créé pour l’occasion dont nous allons suivre les membres dans le conflit qui les oppose à leurs voisins, les Whitehills, eux aussi inventés pour les besoins de l’histoire. Alors commençons par ce qui est évident : c’est du telltale pur jus, si vous êtes rétif à la formule vous pouvez d’ores et déjà passer votre chemin, pour les autres vous pouvez rester. Pour le moment. Comme tous les telltales la technique est à la ramasse, mais avec une direction artistique pas trop mal et un peu d’indulgence ça ne pose pas vraiment de problèmes. Là encore le gameplay se sépare en plusieurs phases : des dialogues à choix multiples, des phases d’action à base de QTE, et des phases de point & clic.
Là où ça commence à être dommage c’est l’absence de nouveauté dans cette formule. Les dialogues, les QTE etc. suivent scrupuleusement la même mécanique que tous les anciens jeux telltale, mais après avoir joué à Life is Strange on peut déjà sentir le titre de Telltale à la ramasse. Le titre de Dontnod offrait un environnement riche et détaillé, nous invitant à le contempler et à interagir avec lui. Il proposait également quelques énigmes bien trouvées et des mécanismes de gameplay original mettant à profit le retour dans le temps. Ce Game of Thrones nous offre des environnements désespérément vides où les seules interactions ne se font qu’avec les éléments essentiels de l’intrigue. De plus les « énigmes » encore présentent dans les précédents opus sont définitivement passées à la trappe. Enfin comme d’hab les « choix » qui influence l’histoire n’en sont pas, celle-ci suit son cour peu importe ce que vous décidez. Çà je m’y attendais et quand on prend les choix non pas comme un moyen d’influencer l’histoire mais un moyen d’impliquer le joueur dans le récit on pardonne le procédé.
De toute façon le principale dans un jeu narratif c’est l’histoire. Et là ce gatte. Tout commence pas trop mal pourtant, créer ses propres protagonistes et des enjeux différents de la trame principale de la série permet d’être libre dans sa résolution et de pouvoir surprendre le joueur ayant déjà tout lut ou tout regardé. Le jeu reprend le style narratif des bouquins, suivre plusieurs personnages en plusieurs lieu avec plusieurs intrigues qui se rejoignent. Les phases à Port Réal sont plutôt réussies puisque les jeux d’intrigues de la cour se marient bien avec les jeux narratifs mettant de côté l’action au profit des dialogues. Cependant plus les épisodes passent et plus l’histoire, au lieu de prendre de l’ampleur, se rétrécie atout de son enjeu initial sans jamais le transcender. Au final j’ai surtout l’impression que les auteurs se sont contentés d’adapter un univers d’après ce qu’on leur a raconté. Et qu’est ce qu’on retient de GoT ? Les gentils qui s’en prennent plein la gueule ! Et là Telltale s’en donne à cœur joie, les Forester vont morfler à tel point que tout devient extrêmement prévisible, on est plus jamais surpris de les voir souffrir en continu et chaque action de leur part, chaque bonne nouvelle est accompagnée par la certitude qu’au final ils se feront avoir.
Et c’est bien ce qui ressort de ce jeu, la caricature d’un univers qu’ils n’ont pas compris. Dans Game of Thrones ce n’est pas les gentils qui morflent, c’est tout le monde. C’est une histoire ou personne n’est à l’abri, gentil comme méchants. D’ailleurs gentils et méchant est une distinction inutile dans les livres, si il y a des individus assez vertueux et quelques sociopathes, la majorité des protagonistes sont humains, avec leurs défauts et leurs faiblesses mais presque jamais diaboliques. La multiplicité des points de vue sert justement à voire l’histoire sous l’angle de vue de chacun, de connaitre leurs motivations et de les humaniser. Ici, rien, des gentils très gentils (et pas très malin) contre des méchants très méchants (et pas très malin) le long d’une histoire sans grand retournement de situation et prévisible (un comble). Le pire c’est qu’une fois le jeu terminé … Pourquoi la moitié des intrigues n’ont-elles servies strictement à rien ?
Là je vais faire mon lecteur tatillon mais j’ai également un gros problème quant à la cohérence du récit par rapport à son univers, comment un noble à la légitimité douteuse peut-il se permettre de tuer de sans froid et sans raison apparente des Lord et des héritiers ? Pourquoi un marchand de boiserie semble-t-il avoir un statut supérieur à des nobles ? Et pas mal d’autres trucs que je ne détaillerais pas ici pour ne pas rallonger une critique déjà longue.
Au final Game of Thrones de Telltale Games n’est pas un si mauvais jeu. Les amateurs de leurs précédents jeux moins exigeants que moi pourront y trouver leur compte. Je regrette tout de même que l’éditeur s’enferme dans un style sans jamais réussir à l’enrichir. J'ai surtout beaucoup de mal avec une écriture assez pauvre, très loin d’être au niveau. S’attaquer à GoT devait permettre de narrer une intrigue riche et complexe et de mon point de vu c’est un échec.