Simulateur de situations désespérées
Gods Will Be Watching est un OVNI vidéoludique au gameplay si inédit* qu'impitoyable, qu'il devrait obligatoirement pousser les amateurs d'expériences alternatives à s'y essayer.
Le but du jeu est de prendre une suite de décisions vous permettant la plupart du temps d'échapper à la mort. Tout se joue au tour par tour et chaque niveau, qui est en réalité un puzzle géant, vous propose diverses actions contextuelles telles que frapper un otage, lui hurler dessus, lui tirer dans la jambe, la tête, le calmer, etc., ce qui vous aidera tant bien que mal à accomplir votre objectif et à survivre... Sachant que le moindre choix est d'importance capitale car il influencera l'action globale d'une manière on ne peut plus chirurgicale.
Causes et conséquences, tel sera votre fardeau. Et il faut le dire d'emblée, ce jeu ne vous fera aucun cadeau, si on exclu ses excellentes notes d'humour.
Dès le premier chapitre, vous en chierez comme si c'était le dernier, au point de vous demander parfois si vous jouez à un jeu ou si vous résolvez un test d'entrée à la CIA. Le challenge est de haut niveau et dégoutera littéralement ceux qui s'attendent à un point'n'click classique ou dans la veine de The Walking Dead, un autre jeu ventant les choix du joueur.
Et je m'arrête là dessus, car si Walking Dead et GWBW proposent des jeux basés sur le choix, leurs interprétations sont radicalement opposées. C'est donc pour éviter de perpétuer la vague de frustration que subit ce jeu de la part des joueurs non avertis, que je ferai ces précisions :
- Dans Walking Dead, les puzzles sont simplistes et secondaires, exactement tout l'inverse de GWBW.
- Dans Walking Dead, vos dilemmes sont affectifs, dans GWBW ils sont vitaux.
- Dans l'un des jeux vous choisissez comment va se dérouler un évènement, dans l'autre vous vous défoncez le cerveau pour surmonter cet évènement.
- Et dans ces deux jeux, il faut l'admettre, vos choix sont d'ordre cosmétique puisqu'ils n'influencent pas le déroulement global des évènements.
Vous voilà prévenu.
Pour en revenir au jeu lui-même, il m'a fallu dix heures sadomasochistes pour le finir en mode normal. Il reste aussi des défis et je reviendrai surement sur certains chapitres pour tenter d'épargner tous les membres du groupe, mais certaines faiblesses de conception m'empêchent de prendre du plaisir sur tous, car si d'extérieur on pourrait croire que la difficulté constitue le défaut du jeu, c'est plutôt ce qui entoure l'expérience qui pose problème :
Il est impossible de sauvegarder en cours de partie. Sachant qu'elles sont plutôt longues (le chapitre 5...) cela devient frustrant de recommencer entièrement le chapitre où on bute. D'autre part, on a parfois la malheureuse impression d'avoir trop peu de feedbacks concernant la qualité de nos actions (encore cet ingrat chapitre 5), ce qui amène certains joueurs à dire que le jeu repose sur la chance. Ce qui est faux :)
GWBW est avant tout un jeu d'observation et de réflexion. Sans ça vous ne remarquerez jamais les patterns et ne pourrez pas élaborer de stratégie. Il faut tester différentes actions et analyser leurs effets, après quoi on peut combiner les informations dans notre esprit pour maitriser au mieux le déroulement des évènements. Bien sûr, ça implique de perdre un certain nombre de fois avant de trouver une tactique efficace, mais il n'y a rien d'insurmontable.
J'ai recommencé une dizaine de fois le chapitre 1 puis tous les autres ont été fait en trois, quatre parties, dans le pire des cas. C'est donc la compréhension du gameplay général qui importe.
De mon point de vue le charme du jeu tient essentiellement à ses situations plus incroyables les unes que les autres.
Avez-vous déjà géré une prise d'otage ? Survécu à la torture ? et j'en passe d'autres pour ne pas spoiler. Ce jeu vous plonge dans des moments que vous ne voudriez jamais vivre, sinon au cinéma, et vous propose de les surmonter, sans la moindre simplification, sans la moindre astuce, avec pour seul allié votre cerveau. Dans un sens vous êtes dans la peau d'un véritable héros, celui qui fait ce que personne n'aurait le courage et l'envie de faire soi-même, celui qui choisit.
Quant à l'histoire, le scénario semble sympathique avant de s'avérer étonnement mature, ce qui n'empêche pas de regretter que sa première fonction est celle d'emballer le gameplay. Il colle les différents chapitres entre eux, donnent progressivement du sens à cette aventure, puis finit d'une façon peut être un peu trop audacieuse, ou pas assez. Je veux dire par là que la fin est ouverte et qu'elle laisse le joueur se construire une interprétation toute personnelle de l'histoire.
Si j'apprécie cette ambiguité qui ouvre des portes plus profondes, je devine que ce choix servait avant tout de justification concernant la présence de personnages morts tout au long de l'histoire (...).
Pourquoi lui mettre seulement 7 :
Gods Will Be Watching est à l'origine un jeu créé en très peu de temps, à l'occasion d'un concours. Depuis il a eu droit à une fructueuse campagne kickstarter qui lui a permis d'exploiter en long et large son concept initial**. Et pour avoir suivi et financé le développement du jeu, je dois dire que mon coeur lui donnerait un grand 8, voire plus, car le résultat est bluffant d'imagination, honnête et bien consistant.
Ce qu'il manque finalement à ces jeunes développeurs, c'est l'expérience, l'expérience qui les aurait permis de rendre l'expérience d'avantage agréable et moins aride pour les joueurs non initiés tout comme les fans.
J'ai malgré tout une grande confiance en eux. S'il fallait faire une suite à un Gods Will Be Watching, je pense qu'ils gagneraient à enchaîner plus fréquemment le gameplay et la narration, de façon à rendre l'aventure plus dynamique, et donc encore plus épique !
(EDIT 08.08.14 : des nouveaux modes sont apparus pour rendre l'expérience plus facile (mode narratif, extra facile, sans évènements aléatoires)
*: Pour les plus courageux il y a aussi l'insurmontable Fate of the World.
**: La vieille version est jouable gratuitement ici : http://www.deconstructeam.com/games/gods-will-be-watching/
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