Grim Fandango nous emmène au Pays des Morts, un monde rempli de corruption, de gens véreux prêts à tout pour s’enrichir, où les gens se tirent dessus, où tous les casinos trichent et où la mort n’est pas si désagréable, en attendant l’après-mort. Une sorte de purgatoire en somme, où les âmes attendent leur jugement et peuvent encore profiter un peu du temps qu’il leur reste, en reproduisant tous les vices entrevus au cours de leur vie.
Et tout bascule quand Manny Calavera, vendeur de tickets pour l’Au-Delà, flegmatique, mais audacieux, cynique et dragueur, tombe sur une cliente et se trompe sur son sort, partant alors à sa recherche pendant quatre ans. En soi, le scénario de Grim Fandango est assez simple, mais ce qui fait sa force, ce sont tous les dialogues à côté, l’ambiance qui règne sur le Pays des Morts, ses délicieuses musiques qui swinguent et au final tout le background qui se constitue et complète intelligemment l’intrigue.
Tous les personnages semblent être des caricatures : du grand patron tyrannique et corrompu, de l’avocat véreux, du gentil simplet costaud, du révolutionnaire bolivarien idéaliste, et pourtant ça fonctionne. Parce qu’ils sont drôles, parce que les doublages sont excellents, parce que le tout est superbement écrit et rempli de réflexions sur la mort, sur la repentance qui en découle, sur plein de petits aspects de notre société, sur l’homme en fait. Grim Fandango parvient à être drôle et intelligent, et le tout sans tomber dans l’emphase pompeuse.
Et au fond c’est ce que j’en attendais, une belle aventure, variée dans ses situations, dans ses challenges, avec une excellente narration et une écriture plutôt fine. Le seul souci de ce jeu vient de ses énigmes, souvent logiques conformément au background du jeu (tout est pratiquement évoqué dans les dialogues pour aiguiller le joueur, mais d’une manière subtile), mais parfois complètement improbables (recevoir un bateau mis en bouteille, remplir celle-ci d’alcool pour la donner à Glottis qui va vomir sur des dominos ???). Au final, elles cassent parfois le rythme de l’aventure, même si c’est un élément que j’estime nécessaire pour que le joueur s’approprie bien les lieux et s’en imprègne, et en ce sens la « difficulté » des énigmes est essentielle pour l’immersion du joueur. Mais même en sachant cela, et en connaissant l’humour du studio et de l’univers, elles ont un peu sapé mon appréciation du jeu en général.
Du coup, mettre 8 à un jeu en dénonçant ce qui fait principalement son gameplay, ça peut sembler hypocrite ou indulgent, mais en considérant Grim Fandango avant tout comme une aventure au sein d’une terre inconnue (et originale pour le coup), qui mise clairement plus sur son ambiance, ses personnages et son histoire que sur son gameplay, il est difficile de ne pas le trouver excellent. Mais compréhensible de ne pas adhérer et d’arrêter un peu dès le premier chapitre tant ça peut être décourageant.