Il était particulièrement audacieux pour moi de me lancer dans une aventure comme Hellblade. En effet, j'ai un penchant bien marqué pour les univers à tendance au moins confortable si ce n'est colorée. A l'inverse, j'ai beaucoup de mal avec les ambiances glauques et trop sombres, enclines à me déprimer et à me bloquer toute envie de continuer (c'est la raison pour laquelle je n'ai jamais pu jouer plus de quelques heures aux jeux de la série des Souls, par exemple). Alors un jeu basé sur les enfers et la folie, autant vous dire que je suis aux antipodes de ma zone de confort ! Mais la curiosité et l'intérêt pour cette mythologie l'emportant sur le reste, j'a acheté et joué à Hellblade : Senua's Sacrifice. Mais j'imagine que si vous lisez cette critique, ce n'est pas par envie d'en savoir plus sur ma noble personne. Passons donc au sujet qui nous intéresse.


Toi qui entres ici abandonne toute espérance


Hellblade est aussi sombre qu'il en a l'air. Vous ne rirez pas une seule fois en traversant les enfers scandinaves avec une fille névrosée (c'est étonnant, tiens), vous n'esquisserez même pas un sourire ! Quand on s'attaque à ce genre de thématique, on a intérêt à soigner son ambiance. Et autant vous dire que les gars de Ninja Theory l'ont particulièrement bien soignée. L'ambiance visuelle et sonore réussissent à créer des environnements et des ambiances extrêmement oppressants, flippants et glauques. Qu'on soit en bord de mer, au milieu du brouillard ou dans des villages ravagés par les flammes, on est complètement dedans, à tel point que j'étais incapable de faire des sessions de jeu de plus de 1 heure (c'est pas mon truc, j'vous dis) tellement l'ambiance peut être oppressante.


En plus de cela, le jeu est techniquement et esthétiquement très réussi. Alors forcément, on traverse surtout des couloirs maquillés en espaces plus ou moins ouverts, mais rappelons quand même que c'est une petite équipe qui a développé Hellblade. Pour arriver à une telle qualité graphique, ils n'ont pas d'autres choix que de cloisonner le terrain de jeu. En revanche, les mêmes éléments de décor sont réutilisés à foison, tout au long du jeu, ce qui est un peu dommage, mais ce n'est pas bien grave.
J'ai été particulièrement impressionné par certains ennemis, essentiellement certains boss. Je me sentais réellement devant des dieux, tellement ils dégageaient une aura de puissance et de terreur. Pourtant, ils ne sont pas forcément très grands, mais leur design et l'ambiance visuelle autour d'eux sont tellement bien réalisés qu'on se sent tout à coup ridicule face à ces divinités impitoyables.


L'ambiance sonore est aussi réussie que son penchant visuel, à tel point que l'horreur de certaines scènes, la terreur et l'épuisement (physique mais surtout mental) de Senua nous attaquent de plein fouet, accentuant encore la brutalité de l'univers. Les voix que Senua entend constamment sont toujours là, à nous entourer, pour bien nous signifier sa folie, de manière un peu insistante d'ailleurs. Ce n'est pas l'aspect le plus réussi du jeu, tant il est facile de montrer la folie par ce biais. C'est même assez agaçant au bout d'un moment. D'autres moyens utilisés dans le jeu sont à la fois plus subtils et plus marquants.


Encart : quid de la mythologie nordique ?


N'étant pas connaisseur, mais tout de même très intéressé par le sujet, j'étais curieux d'en apprendre davantage sur la mythologie et les enfers nordiques. Malheureusement, il se trouve que peu de lieux traversés se sont avérés marquants, de sorte que ça n'a pas pu alimenter réellement mon imaginaire de Hel et de Niflheim. La majorité des environnements sont assez lambda et pourraient apparaître dans à peu près n'importe quel univers sombre. Impossible non plus de me dresser une carte mentale des enfers avec les principaux lieux. En revanche, j'ai pu apprendre un certain nombre de choses sur les passages clés de la mythologie nordique, grâce à une voix off que l'on entend fréquemment tout au long du jeu. Honnêtement, je m'attendais à mieux dans le traitement du sujet.


Promenons-nous dans les Enfers


Le système de combat n'est absolument pas expliqué dans le jeu. On apprend sur le tas, de manière assez intuitive puisque les contrôles sont logiques. Les combats sont assez simples, même s'il faut tout de même rester attentif, mais ils deviennent plus compliqués vers la fin du jeu. Ils sont d'ailleurs extrêmement jouissifs, tant les effets sont bien fichus et la puissance des coups bien rendue, avec des animations d'une grande qualité. Je ne m'en suis jamais lassé et je les ai trouvés très prenants tout le long du jeu. En revanche, une fois les premiers combats passés, vous continuerez à voir les mêmes animations, à effectuer les mêmes stratégies et à vous battre contre les mêmes ennemis (à une ou 2 exceptions près). Ça ne m'a pas dérangé, tant les combats sont rares au cours de l'aventure, sauf à la fin. On passe en réalité 80% du temps à simplement se déplacer (marcher, courir, chercher, fuir) et très peu de temps à combattre. C'est particulièrement ambitieux de la part du studio d'avoir choisi de ne pas rentrer dans les carcans du genre, en réglant les combats comme du papier à musique pour rythmer le jeu. Ils ont visiblement décidé de s'éloigner de cette règle tacite, ce qui est tout à leur honneur. Si vous arrivez à plonger dans cette ambiance rude et violente et à vous délecter de la douleur et la cruauté ambiante, ça ne devrait pas vous déranger (mais ça devrait vous inquiéter, parlez-en à un psy). En revanche, si vous avez, comme moi, un peu de mal à rentrer dans cet univers (par souci de survie, en ce qui me concerne), vous risquez de trouver le rythme bien trop lent et de trouver le temps long à force de marcher, marcher et encore marcher.


Et ce ne sont pas les "énigmes" jonchant votre parcours qui vont réussir à éveiller votre intérêt. Ces passages sont souvent laborieux, et franchement chiants à la longue, surtout qu'on se tape les mêmes de la première à la dernière heure de jeu. Chercher des formes dans l'environnement pour ouvrir une porte, ça va bien les 3 ou 4 premières fois, mais après ça devient lourd. Surtout que certaines formes sont particulièrement compliquées à trouver. Cet élément de gameplay n'a absolument rien de fun et aurait franchement dû être remplacé par autre chose, histoire de varier un peu.


Un dernier point mérite d'être soulevé : le HUD, ou plutôt l'absence totale de HUD. J'ai mentionné plus haut l'absence d'explications dans les combats, mais c'est en réalité le cas pour tout le jeu. Il est vrai que le gameplay très basique permet cela sans difficulté puisqu'il n'y a aucune complexité dans la prise en main de Senua. Mais c'est un parti pris particulièrement bienvenu qui renforce d'autant plus l'ambiance en jeu, puisque rien ne vient vous rappeler d'appuyer sur telle ou telle touche, ou que vous avez tant de vie, infligé tant de dégâts, etc.


J'ajouterais, pour finir, que la dernière partie du jeu (les 2 dernières heures environ), augmente d'un gros cran la qualité générale, tant ces passages sont haletants, les combats plus nombreux et le rythme bien plus soutenu. Cette dernière partie est dantesque !


Au final, Hellblade est un jeu imparfait, avec des défauts qui entachent nettement l'expérience de jeu, mais aussi des moments de grâce qui font vraiment plaisir à voir. Cette aventure, dans sa majeure partie, se rapproche presque plus d'un simulateur de randonnée sombre et glauque, jonché de quelques combats, plutôt que d'un jeu d'aventure/action. Heureusement, la dernière partie vient ajouter un rythme soutenu plus que bienvenu et rehausse le niveau du jeu. L'ambiance noire et rude est extrêmement soignée, notamment grâce à une qualité visuelle et sonore de haut niveau et ses combats sont superbement mis en scène et extrêmement prenants. J'ai trouvé cependant regrettable que la mythologie nordique ne soit pas mieux traitée. Mais si vous aimez ce genre d'ambiance, Hellblade pourrait vous plaire si l'absence d'action ne vous fait pas peur et si son gameplay peu inspiré dans les phases d'énigmes ne vous rebute pas.

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le 18 oct. 2017

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roifingolfin

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