Oh, the dreadful wind and rain...

De loin, Her Story semble suivre une des tendance à la mode du jeu vidéo : mettre la narration au centre du jeu, en prétendant la transformer grâce à l'interactivité qui fait la fierté du média. Pas forcément une qualité à première vue, car je n'ai pas l'impression les jeux de Telltale et autres Life is Strange aient bouleversé la façon dont on raconte une histoire (malgré des qualités certaines).

Mais lorsqu'on se penche un peu plus sur Her Story, on réalise qu'il prend à contre-pied les jeux précédemment cités. En effet, ici, pas question de dilemnes moraux, de fins multiples ou de "Machin se souviendra de ça...", car tout le scénario s'est déjà déroulé il y a plus de vingt ans. On ne fait que parcourir les témoignages d'une femme dont le mari a mystérieusement disparu, qui deviendra progressivement suspecte principale de l'affaire.

L'originalité centrale du jeu, c'est son mode de narration : les sept interrogatoires sont divisés en fragments durant de quelques secondes à deux minutes, même s'il dépasse rarement les 60 secondes. Ces fragments ne sont accessibles qu'en recherchant les mots qu'ils contiennent dans le moteur de recherche de la base de données, limité aux 5 premiers résultats dans l'ordre chronologiques : il faudra donc faire des recherches précises pour accéder aux extraits des derniers interrogatoires, souvent plus intéressants.

Ainsi, Her Story transforme la narration du jeu vidéo non pas grâce à des faux choix, mais grâce à son gameplay original. L'histoire de la femme que l'on a en face de nous n'est pas seulement non-linéaire, chose que l'on peut aussi trouver dans d'autres médias comme le cinéma ou la littérature, mais sa structure n'est complètement décidée par personne : ni par le créateur, qui ne peut pas s'assurer de l'ordre dans lequel le joueur verra les extraits, ni le joueur, qui est soumis aux contraintes du moteur de recherche du jeu et à son intuition. Ainsi, l'expérience de chacun est différente, et ce grâce à l'interaction entre le créateur et le joueur. Et est-ce que ce n'est pas ça, le jeu vidéo ?