On y incarne 47, un tueur à gage frankensteinesque ayant acquis une conscience anormalement ingénieuse et qui, par des procédés qui échappe au joueur ou d'autre part qui sont des spoilers, va devenir le " silent assassin ".
Le grandeur de ce jeu, c'est la théâtralisation grotesque de son aspect tragique. Hitman, cet " homme qui frappe", silencieux, imprévisible, impartial, est l'incarnation même de la mort. Il y a quelque chose de cadavérique chez 47, quelque chose émanant une angoisse teinté de ridicule. On se permet d'ailleurs d'en rire car c'est un jeu vidéo, un espace virtuel, issu de l'ingéniosité créatrice de quelque hommes, eux-mêmes mourants. La mort se déguise, joue des rôles, interprète l'identité quelle vient d'usurper pour agir avec plus d'aisance, plus d'élégance, même si elle est parée d'un ridicule bleue de travail ou d'un nez rouge, c'est elle qui va venir chuchoter la première note du Grand repos, elle correspond à l'imaginaire collectif de la faucheuse, sombrement encapuchonné à en paraître risible. Et expérimenter ça en tant que joueur, c'est jouissif. Le propos du jeu - si tant est qu'il en ai un - est décalé, ironique. L'ambiance est pesante, la mise en scène puissante, la tension vibrante, la moindre erreur peu être fatale et nous faire recommencer la mission; encore, et encore jusqu'à en devenir énervant, voir même ennuyeux. C'est une expérience vidéo-ludique fondé sur la patience, et ce qui en résulte, entre autre la longévité de l'attente, la persévérance du vouloir et de l'accomplissement du meurtre de personnages eux-même en attente, évoluant dans une routine aux possibilités ironique, à savoir marcher, parler, pisser pour ce qui est du principal. On prend vite un amusement cynique à abattre froidement ces vies excentriques, ridiculement sérieuses, pauvrement magnifiés des structures qui les environnent, tout comme des gardes qui leurs offre une importance médiocre, théâtrale tout au plus. Tous sans exception prennent une dimension tragique et donc de gravité, de profondeur si l'on veut car elles vont mourir, par notre "faute" ou non.
L'iconographie de hitman est plaisante, en ce sens qu'elle est iconoclaste, un prêtre qui se bourre la gueule dans un coin sombre, tenant dans sa main gauche une bible creuse d'où il vient de sortir une gourde suspecte, sa n'a pas de prix. Ou encore une actrice pornographique contrainte de s'habiller en tenu très légère, et qui, désirant fumer un cigarette ou faire un tour, se les gèle, car on et en hiver dans les massif, l'est tout autant; et le jeu est truffé de petits clins d'oeils à cette étrange comédie dont nous sommes à la fois complice de par notre investissement, mais distant de par notre but.
Nul états d'âme, aucune empathie pour 47, indifférent devant les masque qu'il aperçoit, s'agitant dans la farce de leurs existences qu'ils tentent péniblement d'éterniser, de sublimer, de transfigurer en s'inventant bandits, artiste, commerçant ou politique. Le plus étrange, c'est qu'on associe rarement 47 à la cruauté, il n'élimine ces cibles qu' en échange d'argent mais n'est pas sensé en faire d'avantage, ce qui lui attribue une certaine neutralité. Aucune transcendance n'est immanente au jeu, une immersivité jubilatoire à n'en pas douté, mais les arcanes du jeu semble mettre en exergue avant tout l'absurdité totale du monde, comme si ce monde façonné par les hommes était plus cruel encore que la mort elle-même, muette à en être rassurante.
La dernière mission ( spoiler !) où l'on assiste au préparatif de la crémation de 47 est pour moi le paroxysme de la série, en effet, la ou les hommes s'affairent pour célébrer tristement la mort de quelqu'un, personne n'est respectueusement présent lors des funérailles de la mort elle-même, en ce sens que toute civilité consciencieuse disparaît si la mort est oublié et par conséquent toute théâtralité, toute sacralité, toute humanité, toute illusion, enfin, toute beauté.