A la première prise, il faut bien le reconnaître, les graphismes sont dégueulasses, le scénar inexistant, le gameplay banal à crever. La musique vous agresse, les hit box sont douteuses, les portes rebondissent hystériquement; ça vous les brise. Chaque mort est un échec. D'ailleurs, vous êtes sur le point d'abandonner: si vous mourrez cette fois vous ragequittez, c'est bon. 16, 17 tentatives plus tard (hu?) vous dépassez enfin ce passage ou vous étiez bloqué(e), finissez la map, jubilez une demi seconde avant de charger le niveau suivant et de repartir pour un nombre incalculable de morts foireuses ...
Et puis, doucement,vous prenez le pli. Mourir c'est rien. Il vous a fallu seulement 150 tentatives pour finir ce niveau mais HEY, c'est quoi 150 tentatives dans la vie d'un joueur?! Le tout, c'est d'accepter. Et quand vous aurez accepté, vous serez en paix avec le jeu, super speed mais ... super stone. Tout ce que vous entendrez, c'est la musique qui ponctuera le bruit de vos coups de machette sur les ennemis (ou l'inverse, can't say) et c'est un hymne aux drogues dures, aux bains de sang et aux délires psychotiques. Vous hochez la tête en rythme en courant dans tous les sens, en sautant sur tout ce qui bouge et en mourant pour une erreur infinitésimale. Mais mourir c'est rien; tant que la musique ne s'arrête pas, vous êtes dans le coup. Les couteaux, les machettes, les balles, les briques volent de g(e)orges en g(e)orges et finalement, c'est un carnage, c'est tout sanglant et un peu monstrueux à la fois et, somehow, c'est absolument ni choquant, ni troublant, ni émouvant. Ça passe à des milliards de kilomètres au-dessus de votre sensibilité. Le seul truc qui dérange, c'est ce moment où vous avez fini votre sale besogne où la musique change. Votre bulle est crevée, vous êtes comme dans un rêve un peu mou du genou, comme un psychotique en pleine redescente qui commence quand même à se poser quelques questions, alors vous courrez comme un fou furieux jusqu'à la voiture, parce qu'il faudrait surtout pas casser le rythme et laisser les questions se émerger.
En fait, Hotline Miami c'est la drogue dure et pas coupée, cuisinée à l'arrache dans sa caravane en plein désert, par un camé en slip qui voulait juste vous offrir un gros trip qui pique. Enfin, en moins néfaste pour la santé. Peut-être. C'est pas dit. Elle vous insupportera probablement la première fois mais avec la garantie de quelque chose de tout à fait fou si tu vous arrivez à vous y faire. En tout cas, il vous faudra sans doute déployer un peu de patience pour apprécier pleinement le machin, d'autant que vous ne serez pas retenu par l'histoire (sommaire) ou le charisme du personnage principal (clairement inexistant), l'intensité des dialogues (incompréhensibles) ou les enjeux de votre quête (cryptique, au mieux). Le jeu ne vous sert rien de tout ça, mais très franchement, on s'en fout, parce que ce qu'il propose à la place, c'est le droit naturel, inaliénable et sacré de massacrer son prochain et de se faire massacrer en retour. Pour no reason. Et pour ça, vous n'aurez besoin que d'un beat et d'un masque en latex.