J'avais beaucoup envie d'aimer cet Indiana Jones, notamment pour sa prise de risque: il a choisi de ne pas être une copie d'Uncharted, mais plutôt un titre concentré sur la l'exploration, les énigmes et même une certaine liberté d'approche imitant l'inventivité du plus psychopathe des archéologues, en s'inspirant d'illustres et moins populaires modèles. Mais le problème, c'est que le jeu ne veut pas essuyer le coup d'une proposition un tant soit peu osée, sans doute pour pas effrayer l'audience. Et Uncharted c'est quand même sympa aussi, alors bon, on va essayer. Sans oublier qu'il faut aussi être un film Indiana Jones, parfois avant même d'être un jeu. Ironiquement, c'est dans cette dernière partie que le titre se débrouille le mieux.
S'il faut dire que le titre ne prend pas beaucoup de risques côtés scénar, il rend une copie sans faute. Prenez l’histoire du premier, un bout de celle du troisième et le ton grand-guignolesque de ce dernier, vous aurez une bonne idée de tenants et aboutissants de cette aventure un brin vieillotte, compétente mais sans aucune surprise. Voss est un méchant plutôt réussi et finalement très approprié pour cette aventure: obsédé par l'héritage d'Indiana Jones sans être vraiment capable de s'en montrer digne. Quand bien même, le tout est bien joué, mis en scène et souvent drôle, c'est très chouette à regarder, à défaut d'être joué. A un point où ça en devient agaçant. Je crois avoir rarement regardé autant de bastons et de séquences d'action sans pouvoir y participer dans un jeu vidéo. Alors de temps en temps, le jeu se rappelle que c'est censé avoir une manette dans l'histoire, alors vous demandera d'effectuer une action triviale complètement déconnectée de ce qu'il se passe à l'écran entre deux cinématiques de cinq minutes. A ce niveau, Uncharted peut dormir sur ses deux oreilles.
Mais comme évoqué plus haut, Indy rêve plus grand. Le gros de ce qui est jouable se découpe en deux catégories: les tombeaux et les cartes ouvertes à explorer. Les tombeaux sont une déception. La présence d'une carte pour chacun d'entre eux et les nombreuses interactions avec l'environnement laissent entrevoir une expérience portée sur l'immersion, l'exploration et la jugeote. Mais ce n'est qu'apparat, une couche d'originalité superficielle. Déjà parce que les tombeaux sont désespérément linéaires, un enchainement prédéterminé de salles à traverser en ligne droite, où la solution de chaque énigme se trouve à 4 mètres de la question. L'exploration du mystérieux tombeau n'est qu'un chemin balisé par des ficelles grosses comme des cordes. Utiliser la carte ne rend que plus confus un parcours pourtant limpide à l’œil nu. Ridicule.
Par conséquent, le seul intérêt des tombeaux se résument aux défis présentés les uns après les autres. La plupart du temps, c'est de la plateforme et des énigmes médiocres (mais pas nulles, ceci dit), et dès que ça devient intéressant, c'est Indy qui prend les commandes. Vous pensiez pouvoir repérez et éviter un piège par vous même ? retournez jouer à Tomb Raider, ou même Thief (The Black Parade, sorti l'année dernière, a deux niveaux géniaux dans le thème). Les seuls dangers à éviter ici sont signalés par un visuel, un commentaire du héros et sont très simples à éviter. Le reste du temps, c'est scripté.
Reste les gros niveaux, qui sont plus des mini-open worlds avec petites activités et merdouilles à collecter. Y a même un système de voyage rapide, ce qui est quand même un sacré aveu d'échec pour des cartes aussi petites. La navigation est aussi indigente que dans les tombes. Je donne un bon point pour la carte diégétique, mais pour qu'on se retrouve au final avec un gros marqueur jaune à suivre comme partout ailleurs, ça valait pas la peine. Par ailleurs, c'est dans ce contexte que vous aurez le plus l'occasion de jouer des poings. Le jeu offre en effet une certaine liberté d'approche et récompense dans une certaine mesure l'improvisation. Y a eu des comparaisons avec Dishonored, alors permettez moi d'enchérir avec une autre: si Dishonored est une piscine, Indiana Jones, c'est le pédiluve. Le titre a tôt fait de montrer tous les tours qu'il a dans son sac. L'infiltration est sommaire, les ennemis cons comme des tables (bon, c'est des nazis mais quand même), le combat a de la patate mais s’essouffle vite... Ce genre de système pas très profond peut fonctionner avec des titres comme Uncharted ou Riddick, un ancêtre spirituel, car de gros efforts sont faits sur la variété et la construction de chaque scène. A travers les scripts, le level design ou des twists de gameplay, on peut faire sans un système de jeu très complexe. Mais Indiana Jones n'a pas cette approche. C'est soit des rencontres dans le sandbox qui tournent très vite en rond, soit des grosses scènes d'action dans des cinématiques que les développeurs n'ont pas réussi à retranscrire en jeu.
Indiana Jones et le Cercle Ancien aurait pu être un grand jeu. Sa proposition un peu plus originale que la moyenne, ses mécaniques sympathiques et son sens du détail au profit de l'immersion auraient pu, et dû, largement suffire. Mais ces qualités ne s'intéressent qu'à la surface sans véritablement impacter l'expérience de jeu. Sans jamais rien faire de mauvais, ce n'est ni un bon jeu d'action, ni un bon jeu d'exploration, mais un produit de commande coincé le cul entre les chaises de ses modèles, trop peureux pour s'investir pleinement dans une direction. On se retrouve face à avalanche de médiocrité bien présentée qui échoue complètement à honorer sa promesse initiale: celle de véritablement incarner le plus grand des aventuriers.