Katana Zero
7.6
Katana Zero

Jeu de Askiisoft et Devolver Digital (2019Nintendo Switch)

Des années que je me le fantasmais, ce Katana Zero. En même temps, du peu que j'avais pu en voir, il semblait condenser deux choses qui ont su rendre ma vie un peu moins fade : la synthwave et Hotline Miami. Le tout avec des katanas. Ça doit vraiment envoyer du lourd que je me disais. Mouais.


Pas mal de spoils dans cette critique. Je mettrais des encarts spoil quand nécessaires, mais la lecture risque d'être un peu pénible si vous n'avez pas encore fait le jeu. Voilà, z'êtes prévenus.


Première chose à laquelle je ne m'attendais pas, c'est que Katana Zero est un jeu qui mise beaucoup sur sa narration. Bien plus que Hotline Miami 1 en tout cas. C'est avant tout matérialisé par ses dialogues. Ils sont mine de rien assez nombreux, et interactifs qui plus est. Ce qui, suivant nos choix de réponse, peuvent mener à des embranchements un poil différents. Rien de foufou, mais j'ai pris plaisir lors d'un second run à tester de nouvelles options.


Pour l'exemple le plus marquant, j'avais, lors de mon mon premier run, été sympa avec la femme à l'accueil, en rentrant un peu dans son délire d'animés. Dans mon deuxième j'ai vite expédié la conversation, et suis rentré dans le tas à la sortie du niveau, tuant les deux policiers. J'ai été assez surpris d'apprendre dans le debriefing que la femme avait dû être exécuté par la suite, au prétexte qu'elle en aurait trop vu. Elle est donc remplacée par un vieux lors de notre supposé deuxième rencontre avec elle.

L'idée selon laquelle on peut avoir une posture agressive dans ces derniers pour les passer plus vite est bienvenue aussi. Ça change un peu de l'habituel "passer le dialogue", ou le bourrage de touche de validation. Si on s'en cogne du scénario, et qu'on veut aller à l'essentiel, c'est possible.


Qui dit narration, dit donc aussi scénario. Pour ma part, je l'ai trouvé ok. Il est intéressant à suivre, et est très bien servi par les différents effets visuels. On prend plaisir à essayer de rassembler les pièces du puzzle, séance de psy après séance de psy, contrat après contrat, et à attendre fébrilement de voir ce qu'il va se passer à la fin du décompte de jours. Je l'ai toutefois trouvé un peu... fouillis. Et frustrant vers sa fin.


L'idée de nous faire voir différemment les rêves et actions de Zero à la fin marche bien. Le lien gameplay/scénario avec nos pouvoirs et la drogue que l'on prend aussi. Mais les emprunts de Hotline Miami sont trop présent et malvenus, comme avec le discours sur le "peut-être que aimes tuer autant de gens" et les tirades sibyllines avec les masques. Je ne pense pas que c'était véritablement nécessaire comme implémentations. Aussi, je n'ai pas trop adhéré à cet espèce d'entre-deux réalité/songe pour la relation avec la petite fille. On pense d'abord qu'elle est réelle, pour comprendre par la suite que c'est une matérialisation des remords de Zero, pour tout de même au final comprendre qu'elle s'est faite... kidnapper ? Avec cette note laissée dans l'appartement à la fin, nous faisant comprendre que c'est parce qu'on a décidé de vivre et non de mourir qu'il fallait alors "prendre une autre vie". J'ai cru comprendre que les dev avaient annoncé un DLC, ce qui justifierait le "to be continued", et donc ces portes ouvertes béantes laissées dans la narration. Personnellement, j'ai trouvé que ça déservait plus qu'autre chose le propos.

Pour le gameplay, la prise en main est immédiate, ce qui est un plus indéniable. La palette de mouvements est suffisamment riche pour que l'on puisse se permettre quelques folies, et s'implémente bien dans le rythme très soutenu des affrontements. J'ai pris globalement plaisir à parcourir les différents niveaux, à me frayer un passage, tenter des trucs. Il y a quelques variations de temps à autre aussi, ce qui fait qu'il y a toujours un plaisir de découverte latent.


Gros problème pour moi cela-dit : le jeu est trop facile dans l'ensemble. A partir du moment où on a compris qu'en abusant de la roulade on pouvait très facilement se frayer un chemin dans quasi n'importe quelle situation, bah ça incite un peu moins à se triturer les méninges. Surtout que les ralentis sont très permissifs. Une barre complète nous laisse pas mal de temps devant nous, et elle se recharge mine de rien assez rapidement. En soit, je n'ai jamais eu l'impression d'avoir été contraint de vraiment m'adapter, complètement changer mon approche. Au contraire, j'ai plusieurs fois été surpris de finir un tableau sans vraiment utiliser tel ou tel élément environnemental, objet, ou passage dérobé. Il y a des petits pics de difficulté arrivé en bout de course, mais de mon côté, je suis un peu resté sur ma faim.


J'ai cela-dit été ravi de voir qu'un mode de difficulté difficile se débloque une fois le jeu terminé. Pour me rendre compte après quelques tableaux que cela implique surtout d'abuser un maximum du ralenti, tellement il y a d'ennemis à l'écran. Ce qui clairement casse trop le rythme pour moi. Le mode speedrun en normal se tient bien cela-dit.

Et cette difficulté un peu gentillette pose problème concernant un autre élément du jeu : le fait de pouvoir revoir nos actions une fois un tableau terminé. C'est rigolo les premières fois, mais très (trop?) rapidement je me suis mis à juste tout passer. L'intérêt de revoir quelque chose dont on est pas forcément fier étant assez, disons, limité.


Enfin, dernier point : j'ai trouvé ce Katana Zero infiniment moins jouissif qu'un Hotline Miami. Le game juice est là, mais je n'aurais pas craché sur quelques exécutions, comme lorsque par exemple un ennemi de type corps à corps est à terre après qu'on ait paré un de ses coups. Voir même sur quelques effets visuels en plus quand on enchaîne les victimes. La musique aussi, bien que très correcte, m'a toujours semblé un peu distante. Frustrante même par moment, comme pour le niveau dans la boîte de nuit, où le beat endiablé donne envie de sauter partout, sauf qu'au début... on doit se cacher. Un poil étrange pour ce qui est peut-être la musique la plus punchy du jeu.


En résumé, je dirais que ce Katana Zero m'a clairement laissé sur ma faim. Tout se suit assez bien, on ne s'ennuie jamais trop, mais sitôt qu'on a un peu posé son cerveau, on perçoit vraiment les maladresses d'un jeu qui peine à véritablement se retrouver parmi ses idées, et surtout, sa grosse source d'inspiration étant Hotline Miami. Une inspiration dont il en reprend les codes entre autre dans son scénario, sans justification particulière, et dont il ne parvient pas suffisamment à s'en rapprocher dans son gameplay, alors que c'est ça qui lui aurait vraiment permis d'être une expérience marquante.


J'ai longuement hésité entre lui mettre un 6 ou un 5. Mais le fait de me rendre compte qu'il n'y avait pas de fin secrète suivant nos actions, alors que le jeu semble nous suggérer plein d'embranchements, et que le mode difficile était mal pensé... et bien ça a fini par me décider sur mon 5.

Gyaran
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le 16 janv. 2023

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