12 longues années d’attente…12 années émaillées d’opus intermédiaires sortis sur à peu près toutes les consoles possibles et imaginables. 12 années après l’exceptionnel Kingdom Hearts II qui a bercé toute mon enfance et une grande partie de mon adolescence, le troisième opus de la franchise fait son entrée fracassante ne serait-ce que sur un plan commercial en battant le record des ventes au Japon sur la première semaine de sortie (25 janvier). Il aura fallu tout ce temps à Tetsuya Nomura et toute son équipe de développement et de production pour nous concocter le tant convoité épisode final de l’arc scénaristique du Chercheur des Ténèbres.
Je ne sais pas par quoi commencer honnêtement tant il y a dire. Je ne pourrais pas me lancer dans un résumé de l’histoire, des intrigues, des personnages, des liens qui les ont façonnés, des mondes et des enjeux depuis le début car la critique dépasserait probablement le seuil acceptable de Sens Critique (si tant est qu’il y en ait un). Déjà peut être dire avant toute chose que je suis un grand fan de la saga depuis dix ans et que j’attendais cet opus avec une impatience presque irraisonnée. Maintenant que je l’ai entre les mains je peux enfin découvrir si l’attente et si la durée de développement en valaient la chandelle au-delà des problèmes dont tout le monde a déjà parlé de changement de moteur graphique du jeu en début de développement (passage à l’Unreal Engine 4).
Le jeu est, objectivement, beau, très beau. Cette diversité des textures et des couleurs propre à chaque monde que Sora parcourt est tout simplement saisissante (même sur PS4 classique…). Les décors sont sublimes (Arendelle, Les Caraïbes), les mondes vastes et cohérents dans leur structure (Raiponce, Monstropolis, etc…) et même le mode Gummi, talon d’Achille de la saga depuis ses débuts, propose un contenu divertissant et original par son côté open-world novateur dans la série. Sa fluidité est remarquable malgré quelques ralentissements du frame rate lorsque beaucoup de personnages et d’ennemis sont présents à l’écran s’il on veut être tatillon. A ce titre, on peut comprendre en partie la longueur du développement tant le travail sur le design et le gameplay a dû être colossal. Le gameplay, parlons-en justement : il est… disons explosif, on en prend plein les mirettes et c’est tant mieux. Les combats intenses et quasi-permanents en temps réel ont toujours contribué à la force de cette franchise même si dans ce troisième opus tout le monde s’accordera à dire que ce dernier ne présente pas de difficultés insurmontables même pas en mode expert. Le panel d’attaques et de compétences à notre disposition est conséquent et cela est bien sûr lié aux liens que le joueur peut activer (qui fonctionnent en réalité comme les invocations des opus précédents), aux attractions dérivées du parc Disney et aux différentes keyblades que l’on obtient tout au long du jeu (mention spéciale à celle de Monstropolis) qui activent autant de possibilités d’attaques différentes sans oublier les coopérations disponibles avec tous les acolytes de Sora dans chaque monde. La force du gameplay (qui va de pair en réalité avec l’aspect esthétique que j’évoquais plus haut) est qu’il s’adapte à chaque monde et à son environnement. La mécanique générale est la même (difficile qu’il en soit autrement) mais elle s’inscrit dans le style et le design propre à chaque univers grâce à la Keyblade que l’on manie ou grâce aux interactions avec l’environnement. Toutefois, le jeu conserve les fondamentaux qui ont fait le succès de la saga : des accessoires, des armes et des protections à équiper, des objets à mettre dans son inventaire et des compétences à activer grâce à des PC (dans cet opus, les keyblades peuvent être améliorées dans la forge et trois clefs peuvent être équipées en même temps). L’autre élément novateur du gameplay est l’utilisation du gummiphone avec lequel le joueur peut prendre des photos (notamment pour la quête des emblèmes fétiches à trouver dans tous les recoins des mondes). Cet apport bien que divertissant et original ne présente pas un grand intérêt par rapport au reste, il faut bien l’avouer.
Mais Kingdom Hearts, ce n’est pas seulement un gameplay riche et des mondes à explorer : c’est une histoire, et cela n’échappera à personne qui s’est un tant soit peu intéressé à la série, aux tonalités enfantines avec l’intégration des univers Disney mais à l’intrigue bien plus sombre et aux rouages complexes jouant sur les thèmes du cœur, des souvenirs et des rêves.
Et sur ce plan, le jeu ne déçoit pas : les cinématiques s’enchainent et sont longues (peut-être même trop). Indispensables pour apporter les réponses que les fans de la série se posent depuis le début de l’aventure (pas toutes les réponses malheureusement), elles nous emmènent progressivement à mesure que l’on progresse dans les mondes vers la fin du jeu et la conflagration finale tant attendue entre les sept gardiens de la Lumière et les treize chercheurs des Ténèbres. A ce titre, les plans qui montrent les deux groupes antagonistes face à face dans la Nécropole des Keyblades, monde aux vastes étendues poussiéreuses gardant les stigmates de la grande guerre d’antan, sont tout simplement épiques. Les combats par groupe de trois dans le labyrinthe final contre les membres de l’Organisation sont bien pensés et sont autant de clins d’œil aux opus précédents lors desquelles nos héros avaient déjà affronté plus ou moins les mêmes adversaires. Cette fin, forte en émotions (j’en ai presque eu les larmes aux yeux et pourtant je n’ai pas la larme facile…) et spectaculaire est une réponse quelque part aux commentaires que certains pouvaient faire sur les dialogues insipides des personnages tout au long du jeu.
Petit rappel : tous ceux qui critiquent ce troisième opus en parlant justement de dialogues insipides et en même temps d’une intrigue trop tirée par les cheveux n’ont sans doute pas compris grand-chose car c’est le fondement même de la série comme j’ai pu l’évoquer plus haut.
Quant à ceux qui se lamentent de ne plus voir des personnages de Final Fantasy, je considère pour ma part qu’ils n’auraient pas apporté grand-chose de plus mis à part peut être un monde intermédiaire dont je déplore l’absence également (un monde qui aurait la fonction de la ville de Traverse dans le I et de la Forteresse oubliée dans le II). En outre, on a déjà eu affaire à ces personnages (Léon, Cid, Youfie etc…) dans tous les autres opus, la place a clairement été laissée ici à Pixar et c’est un point que je trouve positif.
Le contenu end game proposé est plus pauvre que les opus précédents. Cependant, les portails de combat, le boss secret, les trésors et les emblèmes à chercher, les missions Gummi et le petit bistrot sauront ajouter quelques heures de jeu au fichier de sauvegarde et vous tenir en haleine.
Finalement, cette fin clôture parfaitement l’arc scénaristique de Xehanort et distille ça et là les indices de l’intrigue du prochain épisode avec une fin secrète encore plus énigmatique et surprenante qu’à l’accoutumée. De nombreuses questions restent en suspens néanmoins (pas de précision sur le Maître des Maîtres, où est passé Kairi ? qui est cette personne à qui Sora parle en forme d’étoile dans le monde final et enfin qu’y a-t-il dans cette fichue boîte noire que Luxu transporte partout, on ne le sait TOUJOURS pas …) et la frustration m’a gagné dès les premières secondes du défilement des crédits. Mais une saine frustration car j’ai déjà hâte de la suite : soit avec le prochain épisode (espérons qu’il n’y aura pas encore 12 ans d’attente) soit avec des DLC qui arriveraient en cours d’année selon certaines rumeurs en une forme de Kingdom Hearts III Final Mix pour respecter la « tradition ».
J’ai adoré jouer à cet opus malgré tous les défauts qu’on peut lui trouver (trop facile, trop court semble-t-il, problèmes de caméra dans certains mondes, une « happy-end » peut être forcée, l’intrigue principale trop concentrée sur les dernières heures de jeu, etc…), j’ai retrouvé l’esprit de la franchise avec bonheur et émotion surtout la fin. J’ai été ému, j’ai été heureux, j’ai été captivé et les qualificatifs me manquent… Quand toutes les émotions sont suscitées et que la seule chose à laquelle on pense en terminant le jeu est la suite c’est que le pari est réussi. Kingdom Hearts III n’est peut-être pas le chef d’œuvre que Square nous avait vendu, il souffre de l’attente et des fantasmes qu’il a lui-même générés et que les joueurs ont eux-mêmes projeté sur l’épisode mais il me suffit amplement. En hommage au meilleur crossover de tous les temps (oui j’assume cette subjectivité) et en remerciement pour tout ce que cette franchise m’a apporté depuis que je l’ai découverte, je ne peux me résoudre qu’à mettre la note maximale.