Cadavre exquis

Koudelka est un jeu de rôle japonais développé sur Playstation par le studio "Sacnoth" et constitue le premier jeu de ce qui deviendra sur Playstation 2 la série "Shadow Hearts".

Aux commandes de Koudelka, le fondateur de Sacnoth, Hiroki Kikuta, qui endosse ici à la fois les "casquettes" de créateur, scénariste, et compositeur du jeu.

Avec Koudelka, Kikuta souhaitait créer un jeu de rôle d’horreur adulte et sombre aux antipodes de ce qu'il se faisait alors dans les jeux de rôle d'alors ; lassé d'un genre (le JRPG) qu'il estimait stagnant et trop juvénile.

Se déroulant en 1898 au Pays de Galles, le jeu suit les événements mystérieux entourant le monastère de "Nemeton" et la rencontre fortuite de trois personnes en son sein ( Koudelka Lasant, Edward Plunkett et James O'Flaherty) qui vont s'allier pour révéler les sombres secrets qui planent sur le monastère.

Koudelka est un jeu doté d'un gameplay qui combine des éléments de jeu de rôle avec des éléments d’horreur, de survie, d'exploration, et de résolution d'énigmes.

Oui tout ça à la fois. ;)

Mais il s'agit avant toute chose et principalement d'un jeu d'ambiance d'horreur gothique et le monastère de Nemeton constitué un écrin (peut être classique) magnifique pour ce conte/drame gothique.

Cela va vous paraitre cliché mais le monastère constitue le personnage principal du jeu.

La réussite de l'ambiance ou son échec dépend de la qualité de son cadre principal.

Et ici, j'ai pris un plaisir immense à parcourir en long et en large le monastère de Nemeton : ses nombreuses pièces hantées, ses souterrains, ses passages secrets, sa prison ...etc

Tout ces éléments forment un labyrinthe exquis à arpenter.

Concernant le scénario, ce dernier est d'un classicisme assumé mais bien écrit et justifiant à lui seul l'essai du jeu.

Et surtout le jeu est bien "joué" ; car oui les dialogues sont intégralement doublés, ce qui représente une sacrée rareté pour l'époque.

Aux doublages s'ajoutent également un paquet de cinématiques (FMV) toutes réussis.

Ces dernières accusent évidemment leur âge à l'heure ou j'écris ces lignes mais elles demeurent toujours agréables à l'oeil en 2024 avec ce petit charme suranné des cinématiques "vintage".

Les trois protagonistes principaux sont intéressants. Ils disposent tous d'un passé et de raisons propres qui les ont poussés à se rendre au monastère. Une grande partie de l'intrigue reposera sur la découverte de leurs histoires personnelles, toutes tragiques.

Le ton est résolument adulte, le comportement des personnages s'écartent des clichés habituels des JRPG.

Ici point de bons sentiments, personne n'est là pour sauver le monde ou gloser sur le pouvoir de l'amitié, chaque personnage agit en fonction de ses intérêts propres. On voit ces derniers régulièrement se disputer, leur alliance de circonstance parfois se briser, il y a des morts , plusieurs personnages connaissent un destin funeste...etc

Cette absence totale de lieux communs est assez unique (même encore actuellement) et particulièrement rafraichissante.

Enfin un petit point sur la musique qui est agréable sans être complètement mémorable.

Par contre je suis un fan absolu du thème de combat qui est bien entêtant.

Plusieurs jours après avoir fini le jeu, j'entends encore sa petite mélodie me trotter régulièrement dans la tête.

Du côté du gameplay, la ressemblance avec Resident Evil est évidente.

La boucle de gameplay de Koudelka ressemble en effet traits pour traits à une (grosse) différence prêt à celle de Resident Evil. (RE)

Tout comme RE, Koudelka est un jeu d'exploration (du Manoir/Monastère), où l'on recherche des objets clés pour avancer dans le scénario , dans lequel on résout également des énigmes, et où l'on dispose d'un inventaire limité sans toutefois être un jeu de survie.

La principale différence se situe au niveau du combat : le combat en temps réel face à des monstres à emplacements fixes est ici remplacé par des combats aléatoires au tour par tour.

Koudelka dispose également d'une composante "jeu de rôle" avec des personnages qui gagnent des niveaux lors d'affrontements, et l'attribution à l'issue de ceux-ci de caractéristiques et d'équipements modifiant la puissance de vos personnages.

Certaines armes nécessitent des munitions pour être utilisées, d'autres se cassent à l'usage.

A noter enfin que les sorts et les armes disposent d'un niveau d'expertise et de puissance qui s'améliorent à l'usage.

Arrivé à ce point de la critique, vous vous dites que ce jeu n'a que des qualités et vous vous demandez légitimement pourquoi ce jeu n'est pas plus connu.

La réponse tient en deux mots : Lenteur et Combat.

C'est simple : les affrontements sont d'une lenteur absolue. Tout est lent, le déplacement des ennemis, les coups, l'incantation des sorts...Etc

De mémoire, je n'ai pas souvenirs de combats aussi lents que ceux de Koudelka.

Koudelka est un jeu qui met votre patience à rude épreuve et peut constituer, pour ce seul fait, une expérience pénible et éreintante.

Pour ma part, j'ai démarré le jeu sur ma vieille Playstation et au bout de quelques heures j'ai tout repris à zéro pour y jour sur émulateur. (Oui je suis faible)

Et vous savez quoi? Même sur émulateur et même boosté raisonnablement, c'est toujours lent... C'EST LENT LENT LENT LENT LENT LENT...

Il faut vraiment faire tourner le jeu à 200% 120 IPS pour que le rythme des combats soit agréable.

En fait, le jeu aurait été une véritable pépite si il avait été codé comme cela.

Nonobstant cet élément, Koudelka est un jeu profondément singulier. Il emprunte à plusieurs genres avec plus ou moins de réussite.

Son gameplay est bancal pour ne pas dire plus, son ambiance démente, les personnages sortent des lieux communs du genre, le ton est adulte.

Le mix de tous ces éléments accouche d'un un jeu inédit qui ne ressemble vraiment à rien d'autre qu'à lui même.

A tout amateurs d'expérience singulière, "vieux bourlingueurs blasés" par le jeu vidéo ou jeunes pousses simplement curieuses, je vous recommande chaudement ce plongeon dans le passé qu'est Koudelka.

C'est un jeu délicat, à la saveur capiteuse pour qui sait l'apprécier, mais inaccessible à la plupart des palais ; un jeu qui se mérite, où il faut savoir faire fi de ses éléments les plus bancals.

En revanche, si le jeu crée ce je ne sais quoi, ce déclic, chez vous comme cela l'a été chez moi, je vous promets alors une expérience de jeu tout simplement unique dans le paysage vidéoludique.