Pour évacuer immédiatement le côté humour potache et débile, rien à voir ici avec le jeu dansé dans lequel le principal enjeu est de passer sous un bâton ou une barre désespérément plus basse ... Pas de folklore à la tendance brésilienne ... Bien au contraire ! Limbo, c'est la référence aux limbes, un univers noir et blanc, avec quelques niveaux de gris, souvent vide mais parfois peuplé de façon inquiétante. En tout cas, c'est le dernier représentant du monde dit du "jeu indépendant", dont le nombre de représentants est en traint d'augmenter de façon significative avec le développement des plate-formes de téléchargement, notamment sur consoles. Genre particulièrement prisé de la critique, Limbo a reçu un accueil particulièrement chaleureux dans la communauté du jeu vidéo.
Donc, dans Limbo, vous incarnez un jeune garçon partant à la recherche de sa soeur perdu, et qui devra se freiller un chemin dans un univers inquiétant. Ça, c'est pour ceux qui ont pris le temps de lire - j'allais dire la notice mais non - le descriptif qui accompagne l'achat du jeu sur le PSN. Pour ceux qui se lancent directement dans l'aventure, ce sera plus simple ! Vous incarnez une ombre avec des yeux brillant dont le but apparent est de se déplacer de gauche à droite dans un univers monochrome. Et oui, Limbo n'est pas un titre explicitement narratif, loin de là.
En effet, le parti pris de Limbo est à la fois simple, ambitieux sur le fond comme sur la forme, et c'est ce qui fait la principale force du jeu : le choix d'un design volontairement épuré mais esthétiquement très marquant. A peine passé l'écran titre du jeu, on démarre, seul, perdu au milieu d'une forêt bien lugubre, et surtout pas en technicolor ! C'est triste, inquiétant, macabre, dangereux, mais qu'est-ce que c'est beau ! C'est la force de Limbo. Conjuguer une grande simplicité dans la représentation mais en faire un élément captivant de l'expérience de jeu.
Passées les premières secondes, on s'aperçoit que le macabre est très présent. Car votre chemin - si tant est qu'il mène quelque part - est semé d'embûches et de nombreux pièges mortels. Rochers en mouvements, pics acérés, précipices, puits sans fond, tout ou à peu près sera propice à une mort douloureuse, seule manière de voir vos deux yeux luisant s'assombrir. Et dans Limbo, mourir, ça va un peu devenir votre quotidien. C'est l'essence du gameplay : Die & Retry ! Et c'est sur la base de chaque erreur que vous serez amené à avancer dans votre quête.
De plusieurs manières, Limbo me rappelle un autre titre de la mouvance indépendante : Braid. Ils partagent une même ambiance particulièrement esthétique (le choix de base étant néanmoins quasiment à l'opposé, monochrome et lugubre pour Limbo, toute en couleur pastelle pour Braid) mais également très inquiétante (bien qu'affichant plus de couleurs, les personnages et la motivation du héros de Braid étaient bien inquiétants. Ce n'est pas le seul point de comparaison : un héros mystérieux à la recherche d'une belle disparue dont on ne sait pas grand chose, un gameplay basé sur des énigmes assez rotor. Ca se ressemble pas mal sur le fond.
Expérience faite, je trouve que Limbo ne va pas aussi loin que Braid dans le concept. Outre le jeu en lui même, une grande force de Braid était sa fin, sorte de dénouement / récompense d'une recherche bien mystérieuse, tirant très judicieusement parti du gameplay du titre basé sur le retour dans le temps de quelques secondes (je n'irai pas plus loin dans le spoil pour ceux qui n'y ont pas joué). Dans Limbo, ce n'est pas le cas. Mis à part quelques maigres effets métaphoriques, et sans vouloir vous gâcher la fin, vous finirez globalement le jeu au même point que vous l'aurez commencé. La narration est particulièrement absente, et c'est un peu dommage, car ça aurait pu rendre un peu plus consistant le déroulement de l'histoire.
C'est d'autant plus regrettable que la technique du jeu et l'ambiance issue des choix graphiques et esthétiques permettaient, sans rentrer dans la débauche de commentaires ou de cut-scenes, de produire un titre particulièrement dense. Au lieu de cela, Limbo reste - mais c'est déjà beaucoup - un jeu marquant par son originalité mais sans début et sans fin, sans autre objectif que celui de survivre aux nombreux pièges dressés sur votre route, sans explication des quelques autres ombres que vous croiserez le long de votre périple et qui chercheront, pour un grande majorité, à raccourcir encore votre espérance de vie.
A titre personnel, j'ai été particulièrement réceptif à l'ambiance de la première moitié du jeu, qui correspond globalement à la partie forestière avec la rencontre d'un ami arachnoïde très réussie (à jouer le soir tard dans le noir) et aux rencontres avec les autres petits personnages. Tout ceci laisse la place dans une seconde partie à un monde beaucoup plus mécanique et vide. Toujours réussi, mais un chouille moins oppressant ...
Ne vous méprenez pas sur mon propos ! Limbo est un jeu auquel il faut jouer, rien que pour récompenser le courage des développeur à livrer un jeu si simple, si épuré mais si prenant, aux mécaniques de jeu à la fois simple et efficace, et surtout mortellement beau. Il lui manque juste un peu de ... raison d'être (même Flower était plus scénarisé ...).
Au-delà de ça, Limbo est un titre également très court (comptez environ 3 heures de jeu) mais présentant un challenge intéressant pour celui qui cherchera à obtenir le Trophée "Je fais le jeu en une fois en ne perdant que 5 vies en tout" (et le pire c'est que ça n'est pas un Trophée d'Or ...). C'est tant mieux, plus long et en l'absence d'une narration plus présente, Limbo aurait pu commencer à tourner en rond.
Bravo néanmoins pour un jeu qui marque l'histoire du jeu vidéo et démontre qu'on peut faire de bons jeux indépendants, vendus pas trop trop cher sur nos plate-formes de téléchargement.