Oméga, terre de contrastes
Tout amoureux de la Mass Effect qu'on puisse être, la politique de DLC de la trilogie de Bioware n'a pas toujours réservé que de bonnes surprises et a accouché de DLC inconstants alternant entre les réussites (le Courtier de l'Ombre, Suprématie et surtout Citadelle), les déceptions (Zaeed, L'Arrivée) voire les foutages de gueule (From Ashes en day one, Pinnacle Station). Cet Oméga ne traîne pas quant à lui la meilleure des réputations, réputation qui, sans être totalement injustifiée, est quand même un chouïa excessive. Oméga n'est certes pas le haut du panier de ce que Bioware peut nous offrir, mais n'est pas non plus si infamant.
Oméga fait partie de mes planètes préférées de l'univers Mass Effect, avec ses quartiers interlopes, ses sous-sols miteux, ses bars mal famés et ses gangs de crapules. Sans compter que c'est l'une des rares planètes avec la Citadelle où l'on peut trouver aussi bien des Vortchas, des Butariens, des Turiens, des Asaris... J'ai toujours cependant eu un gros problème avec Oméga : Aria T'Loak. Ce personnage m'a toujours laissé froid. Hormis le fait qu'elle soit l'antithèse des Asaris avec lesquelles Shepard traite généralement, Aria est un personnage assez peu intéressant, enfermé dans le cadre stéréotype du chef de gang arrogant et fort en gueule. La retrouver pour un DLC entier n'était donc pas forcément la perspective qui m'enchantait le plus. Cela se confirme tout au long du DLC : Aria bénéficie d'une mise en avant beaucoup trop importante par rapport à ce qu'elle apporte à l'aventure et même à l'univers Mass Effect en général (présente dans les deux derniers volets vidéoludiques, on la retrouve aussi dans trois comics et deux romans de l'univers étendu). Le personnage reste toujours en surface, on n'apprend quasiment jamais rien de son passé, rien qui ne creuse sa personnalité, on se retrouve toujours à buter sur la carapace, ce qui est réellement frustrant à la longue.
Ce DLC se voulait en tout cas une expérience clairement en marge de la trame principale, bien que la lutte contre Cerberus serve de fil conducteur. De nouveaux ennemis apparaissent dans ce DLC, et ne feront plus jamais parler d'eux : les Méca RAMPART (des mécas évolués, pas très puissants mais beaucoup plus véloces) et surtout les adjudants. Les adjudants, tiens, un des autres petits gâchis d'Oméga. Au final on les croise peu et à l'inverse des autres créatures endoctrinées (brutes, fantômes ou furies), ils n'ont pas toujours le caractère exceptionnel qu'on leur prête. Et surtout, aucun membre de votre commando ne vous servira dans ce DLC qui met toutes les intrigues environnantes entre parenthèses, y compris les romances. Ce choix semble néanmoins beaucoup plus motivé que dans L'Arrivée par exemple : Aria étant une control freak soucieuse de toujours avoir la main, on peut comprendre qu'elle voie d'un mauvais oeil de devoir traîner quelques membres du commando de Shepard (on pense tout de suite à Garrus de toute évidence).
Dans son déroulement même, Oméga est un DLC très générique, une succession de couloirs et de fusillades pas toujours passionnante, entrecoupée de cutscenes qui n'apportent que très rarement un peu d'envergure à l'ensemble. La grande ligne directrice consiste à vous positionner par rapport au comportement d'Aria en prenant son parti ou en vous opposant à elle par l'intermédiaire d'une tierce, la Turienne Nyreen Kandros (première représentante féminine de cette espèce à apparaître dans le jeu d'ailleurs, on en reverra une seule autre dans le DLC Citadelle). Même si le DLC est entièrement construit autour d'Aria, Nyreen parvient à exister et s'impose comme un très bon personnage, qui en à peine quelques cutscenes laisse entrevoir un gros potentiel, sans oublier le fait que le chara design de la demoiselle, très inspiré, rend cette dernière vraiment classe. Sans trop spoiler, disons que la réussite du personnage de Nyreen ne rend que plus frustrante la fin du DLC.
L'autre réussite du DLC concerne les capacités d'Aria au combat, qui offrent réellement une expérience différence. Aria est une combattante féroce et une puissance biotique, aussi ses pouvoirs ont-ils été soignés à son image. Elle possède en effet deux pouvoirs inédits très sympathiques : Frapper, une sorte de lasso biotique qui rabat l'adversaire vers le joueur, et Fusée, une explosion biotique assez badass, de loin le pouvoir le plus puissant du jeu quand il est bien utilisé. Heureusement, la force d'attaque d'Aria est contrebalancée par des temps de rechargement de pouvoirs globalement très élevés, ce qui oblige à la jouer plus fine que prévu. Par exemple, foirez une Fusée, et vous en prendrez pour près de 20 secondes sans pouvoirs, une éternité dans Mass Effect. De ce point de vue, Aria apporte une expérience de jeu un peu en marge, ce qui n'est pas une mauvaise idée ; on regrette juste encore une fois que cela ne dépasse pas les bornes des trois heures que vous prendra en gros ce DLC.
Le dénouement est à l'image du DLC dans son ensemble : de bonnes idées qui au final sont un peu gâchées par des choix créatifs douteux. On retiendra cette séquence de combat final très nerveuse qui vous donnera des sueurs froides si vous ne jouez pas en Facile (ce qui n'est pas un cas isolé dans un DLC de Mass Effect, comme on peut s'en rendre compte dans L'Arrivée et sa mission survie quasi infaisable ou le boss final de Citadelle). Malheureusement, la confrontation avec le grand méchant de cet Oméga est déceptive, tout comme les conséquences de cette confrontation.
Enfin, en terme de conséquences sur la suite de Mass Effect 3, Oméga n'est pas un DLC inintéressant. La campagne apporte un nombre de ressources de guerre assez conséquent (plus de 300/350 War Assets) et posséder Oméga est quasiment indispensable si vous voulez obtenir la “meilleure fin” de ME3. De plus, la quantité d'XP délivrée par ce DLC étant assez hallucinante, votre Shepard gagnera au moins cinq niveaux pendant cette mission, ainsi que quelques armes assez intéressantes. Ce ne sont que des détails cependant, qui ne parleront qu'à ceux capables de rejouer plusieurs fois à Mass Effect pour débloquer de nouvelles fins/succès... Léger pour justifier le prix trop élevé de cet Oméga, clairement l'un de ses plus gros défauts.
Mass Effect 3 : Oméga est en somme un DLC plein de défauts, certes. Il est assez dirigiste, balisé, n'apporte pas grand chose au personnage d'Aria, n'a que trop peu de conséquences sur le reste de l'aventure. Vaut-il ses 1200 points? Dans l'ensemble pas vraiment. Il n'empêche qu'en regard de la production d'ensemble des contenus additionnels de la trilogie Mass Effect, Oméga n'est pas forcément ce qui s'est fait de pire, même en incluant la variable rapport qualité/prix. Les combats sont plutôt nerveux et dans l'ensemble assez sympas, la durée de vie est correcte, et le personnage de Nyreen Kandros mériterait à lui seul d'avoir son propre comic book un de ces jours. Contrairement au très bon Léviathan et au fantastique Citadelle, Oméga est un DLC qu'on peut aisément zapper et à ne réserver qu'aux fans hardcore et passionnés de Mass Effect. Néanmoins, ces derniers y trouveront quand même par instants, de quoi se sustenter. Pas de quoi crier à l'opprobre donc.