Metal Gear 2: Solid Snake
7.5
Metal Gear 2: Solid Snake

Jeu de Hideo Kojima et Konami (1990MSX 2)

« Le vaincu quitte le champ de bataille, le vainqueur y laisse une partie de lui »

Alors que la première suite à Metal Gear, Snake’s Revenge sur NES, était sortie exclusivement à destination du marché occidental par une partie de l’équipe du premier Metal Gear, Hideo Kojima reprend les rênes de la saga dont il perçoit l’engouement avec Metal Gear 2 Solid Snake, la suite officielle de nouveau sur MSX 2. Pour information, j’ai fait le jeu sur la version inclue dans Metal Gear Solid 3 Subsistence, fidèle à la version MSX 2. Ayant déjà bien apprécie le premier épisode, je m’attendais bien sûr à un jeu au moins aussi bon, voire meilleure. Je vous propose l’écoute du thème Tears pendant la lecture pour voir si ce fut bien le cas.



GAMEPLAY / CONTENU : ★★★★★★★★☆☆



Telle une suite directe sur une même génération, Metal Gear 2 reprend le game-design global de Metal Gear 1 en l’amenant toujours plus loin. Tout d’abord, il y a plus de comportements des ennemis différents selon la phase de repérage (repéré, en fuite ou suspecté), ce qui permet d’enrichir l’essence même des phases d’infiltration. Les ennemis sont beaucoup plus mobiles d’un écran à l’autre et force à toujours être vigilant pour ne pas déclencher l’alerte. Si ça demande un petit temps d’adaptation en début de partie, où je me faisais sans arrêt repéré car je me laissais surprendre par ces déplacements, le radar en haut à droite de l’écran et une connaissance progressive du level-design permettent de totalement maîtriser cette partie du gameplay au bout d’un moment.


Mais l’infiltration à gagner en intérêt grâce notamment à un autre ajout : la gestion du son qui prend en compte les surfaces sur lesquelles on se déplace et pour lesquelles les bruitages sont très justement retranscrits par le sound-design, notre position de déplacement qui peut être accroupie pour la première fois de la saga, le fait qu’on peut même éternuer après être resté trop longtemps dans l’eau... le sens du perfectionnisme est assez fou sur la question. Le jeu ne manquera pas d’idées pour exploiter cette gestion sonore, même dans des phases d’action, d’ailleurs le jeu ne manquera pas d’idées dans l’ensemble de ses mécaniques de jeu.


Si quelques passages sont longs et frustrants sans aucune raison à l’image de la traversée des marais, beaucoup d’indices sont disséminés un peu partout pour que la progression soit fluide, en combinaison d’un système de checkpoints assez permissif, et beaucoup de passages originaux viendront rythmer l’aventure avec beaucoup d’objets et de situations de jeu différentes répartis dans un level-design très bien étudié avec ses raccourcis, zones annexes, points de ravitaillement... Metal Gear 2 regorge d’idées originales, qui seront reprises pour la plupart telles quelles dans les Metal Gear Solid, l’item clef changeant de forme en fonction de la température d’une pièce, le serpent que l’on peut avoir dans son inventaire...


Vaincre un boss peut aussi bien être un pur jeu d’adresse et de réflexion que consister à résoudre une énigme qui comprend ses indices à glaner ici et là pour la résoudre. Ces boss illustrent parfaitement la diversité des mécaniques de jeu et ils sont tous réussis, là encore les MGS viendront très souvent puiser leur inspiration dans cet épisode pour plusieurs des boss les plus emblématiques de la saga. De plus, quelques rééquilibrages viennent perfectionner les mécaniques qui existaient déjà : la jauge d’oxygène distincte de la jauge de vie pour les phases de gaz toxique, le respawn des items consommables plus espacés dans le temps pour éviter les abus...


L’ergonomie a également été revue de manière à être moins problématique, à commencer par les cartes qui devenaient de vrais calvaires dans le premier épisode assez vite. Bien que le concept d’un item équipé à la fois soit ici strictement le même, ce que je ne comprends pas, les cartes seront largement moins contraignantes puisqu’elles pourront être regroupées dans des cartes de trois numéros, du coup on a rarement plus de 4 cartes en même temps dans l’inventaire. Si le mapping des touches ne m’a jamais dérangé avec la Dualshock 3 sur la version remasterisée à laquelle j’ai joué, il paraît que sur le clavier original certaines commandes devaient se faire par de curieuses et inutilement complexes combinaisons de touches, c’est tout de même à souligner pour les puristes.



RÉALISATION / ESTHÉTISME : ★★★★★★★★☆☆



Faisant partie des derniers jeux sur MSX 2, 5 ans après sa sortie originale, la réalisation de ce Metal Gear 2 s’inscrit parmi les plus belles œuvres sur la machine avec des décors riches en détails et en couleurs variées, plein de petites animations sur les personnages pour renforcer les feed-back, des sprites de grande taille pouvant être en mouvement… Il y a tout de même quelques limitations techniques avec le nombre maximum de 4 ennemis à l’écran, des temps de chargement entre les zones, l’absence de scrolling… mais le jeu étant toujours systématiquement pensé pour que ça n’entache pas l’expérience de jeu, ce n’est pas très grave.


Le générique d’introduction trahit déjà des ambitions de mise en scène élaborée lorgnant du côté du cinéma, ce qu’on retrouvera aussi dans certains passages narratifs réalisés avec le moteur du jeu et qui fonctionneront plutôt bien, rien de surprenant à ça néanmoins étant donné que c’était déjà une réussite du premier Metal Gear à mon sens quant à ce sens de la mise en scène. On retrouvera donc cette ambition de mise en scène des situations de jeu aussi développée que dans le premier épisode avec des redites mêlées à de nouvelles idées, ce qui me va très bien.


La direction artistique nourrira aussi bien le ton décalé du jeu, comme avec l’écran humoristique aux temps de chargement, que ses ambitions plus serious business comme avec l’artwork de fin absolument magnifique avec un coucher de soleil se reflétant sur l’eau, c’est un peu cliché je vous l’accorde mais ça reste un incroyable rendu pour la machine. C’est une ambition que l’on peut entrevoir dès la jaquette du jeu qui fait apparaître la démesure de l’action face aux personnages humains qui semblent simplement essayer de survivre dans une magnifique nature ravagée par la guerre.


Le chara-design est tout particulièrement soigné pour les portraits dans le codec pour clairement différencier chaque personnage, il l’était déjà auparavant mais je pense qu’on a encore franchi un cap qualitatif et ça s’accorde très bien avec les personnalités plus développées des personnages, comme on le verra en abordant le scénario. La version originale japonaise comprend même des animations avec mouvements des lèvres, clignotement des yeux… ainsi que différentes versions d’un même portrait selon des actions en jeu, comme Snake la clope au bec si on vient de s’en griller une.


L’OST 4 fois plus longue que celle des premières aventures de Snake permet d’une part de conférer une certaine identité à chaque grande zone du jeu, d’autre part de diversifier son utilisation avec les premiers thèmes musicaux mélancoliques de la saga qui font leur apparition avec des mélodies lancinantes très efficaces, à l’image du thème Tears qui porte très bien son nom. Le sound-design est quant à lui tout aussi efficace que le premier, peut-être même un peu mieux avec la disparition de quelques bruitages un peu énervant à la longue, comme pour l’ouverture du codec.



SCENARIO / NARRATION : ★★★★★★★★☆☆



Si le premier Metal Gear arborait un scénario très léger, malgré quelques bonnes idées, les ambitions ont été revus à la hausse là aussi pour cet épisode. L’introduction beaucoup plus riche en informations opte pour un choix assez osé, elle place l’intrigue dans un contexte géopolitique très caricaturé où une petite nation militaire se retrouve à la fois en possession de tout l’arsenal nucléaire mondial et de la seule ressource énergétique capable de remplacer le pétrole qui a disparu de la surface de la Terre.


Évidemment, c’est un petit peu ridicule pris au premier degré mais ce ton décalé se retrouvera sur l’ensemble du jeu et en deviendra donc pleinement cohérent avec ces personnages assez fantasques notamment pour les boss, ces répliques quelques peu tendancieuses, ces blagues et références brisant le quatrième mur, ces idées de game-design qui sont cocasses si on les transposaient telles quelles dans un cadre réaliste… mais aussi ce qui fait l’identité du jeu et rétrospectivement de la série, mais ici c’est plus assumé qu’auparavant et ça n’empêche pas pour moi les moments plus matures d’être réussis.


Si tout ça prêtera à sourire, ce contexte sera aussi l’occasion d’évoquer avec sérieux des thématiques audacieuses telles que les conflits géopolitiques dégénérant en des guerres dont les soldats sont des victimes, les orphelins de guerre pouvant devenir enfants soldats fanatisés, l’éthique dans la recherche scientifique qui pose aussi bien la question de la pertinence de telle ou telle découverte que des raisons pour lesquelles ces recherches sont menées, le manque de reconnaissance des soldats revenus du front traumatisés et rejetés...


C’est la première fois que les thématiques principales de la série seront développées, même si on pouvait en retrouver des traces dans le premier jeu ce n’était vraiment pas grand-chose à mes yeux, ici l’idéologie si particulière de Big Boss est expliquée, des répliques cultes de la saga sont dites pour la première fois… Des personnages récurrents comme Roy Campbell font leur apparition mais beaucoup de personnages sont propres à l’intrigue de Metal Gear 2, ce qui n’est vraiment pas plus mal rétrospectivement.


Les ambitions visant à véhiculer des émotions se font bien ressentir avec des discussions posées visant à développer la personnalité des personnages, des personnages eux-mêmes scénarisées et attachants mis en danger et parfois tués... L’intrigue à gagner en intensité dramatique mais aussi en complexité avec des personnages jouant double jeu, aussi bien des alliés étant en fait ennemis que le contraire, des scènes à deux niveaux de lecture… Le seul inconvénient à ça c’est que les nombreux dialogues que cela implique viendront imposer la partie narrative du titre aux joueurs uniquement intéressés par le gameplay, moi ça ne me dérange pas mais c’est à souligner.


Metal Gear 2 est bien une suite directe avec pas mal d’événements qui font écho à ceux du premier volet, se permettant même quelques clins d’œil à Snake’s Revenge sans pour autant l’inscrire dans la continuité de la saga. Sachant qu’une suite n’était pas initialement prévue, Hideo Kojima a vraiment bien su gérer comment développer cet univers sans avoir à rayer le premier Metal Gear de la chronologie, laissant la question ouverte à savoir qui de Metal Gear 1 ou de Metal Gear 2 a vraiment poser les bases de la saga, mais qu’importe la réponse, vous vous doutez bien si à ce stade de la critique j’ai été conquis par le jeu quant à ses qualités.



CONCLUSION : ★★★★★★★★☆☆



Si Metal Gear premier du nom avait de bonnes idées et une solide réalisation pour initier de bien belle manière sa saga, la barre est encore placée plus haut pour cette suite officielle avec un gameplay encore plus abouti, un contenu encore plus conséquent, un rythme toujours aussi soutenu, une OST bien plus diversifiée, un scénario davantage ambitieux, une narration mieux élaborée… Metal Gear 2 Solid Snake est un des meilleurs jeux de son temps et de sa machine et ses magnifiques héritiers en 3D lui doivent beaucoup.

damon8671
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le 5 mai 2020

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damon8671

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