I'm no hero, never was, never will be.
C'est sur une de ces phrase que débute le jeu. Snake nous explique alors, d'un ton nostalgique comment notre monde s'est transformé, et nous dit que sa place y devient également désuète.
C'est donc dans un sentiment de nostalgie que nous plonge MGS4. Et nostalgie, c'est peu dire ... Ce jeu est véritablement déprimant. Pour tout dire, je me rappelle pas avoir joué à un jeu si triste et tragique finalement.
[ Attention spoil dans la suite ]
On nous demande de mener à bien une mission, la "dernière mission de Snake". On nous pousse à contrôler un personnage, qui est une icône, une légende, vieillissante et qui court vers la mort. Le plus tragique dans ce jeu, c'est que nous n'avons pas d'autres choix que d'amener Snake vers sa propre mort, c'est de là un des ressors les plus tragique du jeu vidéo : savoir qu'à la fin, malgré tous nos efforts, notre héros mourra. C'est d'autant plus tragique et difficile, car l'on se rend bien compte que cette icône du jeu vidéo, qu'est devenu Snake, n'est en réalité pas immortelle , et le jeu casse donc cette image que nous avons de cette sorte de "messie", intemporel et immortel, qui continuera de vivre sa vie dans un monde virtuel. Non non, là on nous fait bien comprendre du début à la fin, que Snake va finir par s'éteindre. Criant de réalisme, car oui, rien n'est éternel, cela met le joueur dans une position toute particulière. Et pendant tout le jeu, on nous remémore sans cesse ce moment inévitable. Snake au visage ridé, cinématiques multiples où on le voit souffrir à chaque retour de mission, ces souffrances sont d'autant plus douloureuses car on sait où elles vont mener.
Tout de suite, lorsqu'on joue, on se retrouve à être plus prudent, on peine à voir Snake se plaindre de douleur au dos alors qu'il est juste accroupi ...
Le gameplay, très bien pensé et dynamique, nous offre une belle continuité aux opus précédents. Notre héros vieillissant reste très agréable à contrôler, très souple. Le déroulement de l'histoire est manié avec brio. Usant, sans chercher à faire mieux, des ficelles cinématographiques pour nous donner un rythme effréné et sans temps mort. Pour ma part, j'arrivais difficilement à lâcher ma manette.
Bien évidement, le scénario vient clore les autres épisode, et même si le gameplay se veut relativement accessible, et la difficulté bien dosée et réglable selon son niveau, je vous déconseille fortement de jouer à MGS4 si vous n'avez pas joué aux précédents. En effet, ce jeu est pure nostalgie. Références répétées aux anciens épisodes, flashback incessants ... Ces flashback à la fois visuels et auditifs nous plongent bien dans ce sentiment de "dernière fois". La cerise sur le gâteau est le retour sur l'île de Shadow Moses ... Là, c'est carton plein à la déprime. On nous fait des rappels au premier volet dans tous les sens, voilà, on était là il y a 9 ans, c'est ta dernière mission, c'est peut-être la dernière chose que tu vas voir ...
MGS4 repose donc essentiellement sur la fibre nostalgique des fans. Même si ça aura comme effet inévitable de diviser le public, je pense que tous les fans de la première heure se retrouveront plus qu'impliqué dans cet épisode.
Simplement, j'ai dû pleurer pendant toute la phase du dernier acte. Et surtout, on nous y montre l'image la plus traumatisante que l'on peut voir dans un jeu : le suicide de son héros. Même si au final, on remarque qu'il ne l'a pas fait, on est juste traumatisé d'avoir vu Snake, un flingue dans la bouche et entendre juste le coup de feu ! C'est une image juste horrible, car on a conduit notre héros jusqu'à la mort mais c'est lui-même qui se l'inflige et nous ne pouvons strictement rien faire.
J'ai tendance à penser que le jeu aurait dû s'arrêter là ... C'était un ressort tragique assez beau et bien amené et surtout, une expérience traumatisante pour le joueur. Mais c'est justement ce traumatisme qui est intéressant ... Ce sentiment amère d'avoir accompli sa mission mais que l'on doit définitivement dire au revoir à Snake ...
Je trouve le comeback de Big Boss assez maladroit et bizarrement amené. Pour moi c'était peut-être de trop. D'un autre côté, le discours que tient Big Boss à son "fils", n'est pas des plus inintéressant. "Dorénavant, tu ne seras plus la poupée, ni le jouet de personne". C'est vrai, on ne pourra plus diriger Snake comme bon nous semble. Car au final, dans le scénario, Snake n'était qu'un soldat, trimbalé à droite et à gauche dans le monde pour accomplir ses missions, mais il était aussi un pion pour nous, joueurs. Même si c'était un personnage propre, c'est "nous" qui tirions les ficelles. Il y a là une sorte de mise en abime plus qu'intéressante du joueur dans le jeu. Dans un jeu, nous devenons le héros, mais nous prenons aussi en partie sa place et nous agissons sans prendre compte de sa volonté propre finalement ...
Donc finalement, à la fin du jeu, Snake est libéré du combat et libéré de notre emprise de joueur. Et on nous annonce donc que Snake va vivre ses derniers jours, seul. Il va pouvoir vivre sous l'emprise de personne, pas même du joueur. On doit se résoudre à le laisser partir. Et là encore, c'est une situation assez dramatique. Car d'un côté, si Snake a passé sa vie à se battre, c'est bien parce que nous étions là pour tenir la manette et l'amener au combat ... A la fin du jeu, on le laisse donc s'en aller et mourir seul.
Ce sentiment d'avoir achevé une mission, d'avoir trouvé des réponses, d'avoir "sauvé l'humanité" est grisant ... Mais le tout est franchement mis en demi-teinte avec ce héros, à qui nous avons fait subir tout et n'importe quoi, qui a finalement la liberté qu'il mérite, seulement c'est trop tard. Le joueur est donc vraiment remis en question quant à sa position dans le jeu, à la manipulation d'autrui et la manipulation de ce monde virtuel. Pour réussir, pour finir le jeu, on doit sacrifier son héros et c'est là que ce jeu est profondément marquant.