Lena avait tord, plus = moins

Aïe aïe aïe, petit accident de parcours pour cette suite de Lait dans un sac de lait dans un sac de lait. Il va falloir revenir en arrière d'un pas pour exactement poser le pied dans la trace laissée au sol (petit référence toi même tu sais).

Je ne vais pas passer par quatre chemins, le feu y est de toutes façons beaucoup trop long (punaise mes schémas mentaux commencent à être vraiment ravagés après avoir fait ces deux jeux d'affilée). Je veux dire de toutes façons il serait un peu abusif de pondre un pamphlet gigantesque sur des expériences qui se veulent à ce point comme des "courts-métrages vidéoludiques", des petits projets à savourer au bout d'un cure-dent curieux de parcourir la plateforme itch.io. Cette suite est l'illustration parfaite du jeu qui en fait trop, qui se développe trop pour perdre ce qui faisait le sel du précédent. Comme quoi on le dira encore et toujours, mais en art (comme partout ?) vouloir creuser toujours plus, densifier toujours plus, ajouter toujours plus n'est pas forcément le bon parti-pris pour susciter l'émotion la plus pure et qualitative.

Nikita Kryukov a pris la décision de beaucoup plus varier les cadres (et assumer la direction artistique "manga"), ce qui fait que même si la partie visuelle est formellement plus riche que son prédécesseur, on perd tout le côté claustrophobique et oppressant que dégageait ce cadre toujours fixe, ces formes délirantes qu'on peinait à réellement distinguer dans un fouillis de pixel mauves. Le fait qu'on voit la protagoniste explicitement parler aussi tue l'ambiguïté du premier jeu, où on doutait longtemps du statut des interactions entre elle et le joueur. Même les chara-design sont moins "brutaux", exit l'univers et les créatures foutraques du premier qui effectivement n'était pas sans rappeler Saya no Uta d'une certaine manière. Même mettre un Ø sur son pull après la sympathique histoire du O dans la première partie, j'avoue que je ne suis pas convaincu de la pertinence...

La plus grande perte étant vraiment dans l'écriture, beaucoup moins radicale. Là où le premier jeu comportait, je trouve, des tirades très bien senties sur le trouble mentale qui jouaient sur la répétition, le détaillage abusif de choses évidentes ou le passage du coq à l'âne sur des sujets pourtant simples. Il n'y avait pas besoin de tout ce ping-pong verbal futile et lambda avec le joueur.

J'ai vécu avec le premier une expérience viscérale et ambigüe, plus contemplative qu'interactive ce qui était bénéfique à l'ambiance et à la narration au détriment peut être du ludisme avec ses deux uniques fins. Mais à aucun moment pour la suite j'aurais voulu une sorte de jeu d'aventure où je fais équipe avec une psychotique dans des tâches aussi pertinentes que : "papoter pour ne rien dire sur le balcon" ou "fouiller sa chambre à la recherche de papillons dans la poubelle ou le parapluie".

On ne croirait vraiment pas que c'est le même auteur quand des tirades comme celles du nuage qui se forme au dessus la tête se sont faites remplacer par "Les comportements instables ne te mettent pas en valeur !", c'est le niveau zéro de la subtilité ! Ni même le même compositeur quand la musique est à ce point sereine, le chiptune 8bit était bien plus approprié à ce genre d'ambiance.

Et pourtant, j'étais assez hypé en découvrant une jolie cinématique animée au début du jeu... Mais vraiment, je ne vois pas à quel moment ce Lait hors du sac de lait hors du sac de lait arrive à frapper ne serait-ce que sur une réplique aussi juste que son prédécesseur sur le thème de la maladie mentale. Et c'est dommage car c'est un sujet définitivement creusable dans un visual novel de cet acabit. Le premier projet méritait définitivement une expansion en quelque chose de plus consistant, plus long, peut être plus interactif. Mais en tout cas il ne méritait sûrement pas ça...

Et je n'en ai rien à faire qu'il y ai un ARG avec les fins incompréhensibles ou des trucs bizarres dans les fichiers du jeu. Ce genre de choses sont censées être la cerise sur le gâteau d'une œuvre bien réfléchie en tant que telle. Là vraiment il va falloir m'expliquer à quel moment ce projet-ci dégage la moindre émotion. A refaire...