Mirror's Edge. Les aventures d'une petite messagère revêche aux chaussures colorées dont on comprend malgré sa mauvaise humeur atomique qu'elle est censée être héroïque furent l'une des batailles majeures de la décennie précédente dans le domaine de la critique vidéoludique. Certains vous diront qu'un chef-d'oeuvre est mort lorsque le petit peuple faillit aux canons majeurs de la discipline lorsque son désintérêt poli empêcha le titre de devenir le méga-hit qu'il méritait d'être.
D'autres - plus proches de ma manière de voir les choses - soutiendront au contraire que c'était précisément le type de jeu au gameplay bancal qui comptait sur une esthétique très léchée pour s'attirer les sympathies d'un peuple de gogos ayant oublié que le jeu vidéo est censé être plaisant à jouer. C'est un de ces titres qui divisent tout en soulignant chez le critique ce qu'il considère être important dans un produit de type ludique.
Or, je ne sais pas si vous le saviez, mais dans un jeu vidéo ce qui est le plus important... c'est le gameplay. La notion est d'ailleurs assez trompeuse. Elle l'est, autant l'admettre. Le fait que ce soit l'une des rares inventions langagières usitées du XXIème siècle devrait d'ailleurs vous donner une idée de la manière dont ce siècle aura utilisé ses penseurs. Quand l'on parle de gameplay - du moins, dans l'acception actuelle - l'on parle de "la manière spécifique dont l'utilisateur/l'utilisatrice d'un jeu vidéo interagit avec celui-ci". C'est une notion simple, efficace, élégante. Elle est dépourvue de toute ambiguïté dans ce qu'elle recouvre et cela même si elle décrit une sensation subjective. Le gameplay, pour faire simple, est un sentiment dont on sait instinctivement s'il est faux. C'est d'ailleurs la seule facette qu'il puisse se targuer d'avoir en commun avec l'amour.
Mirror's Edge, pour faire simple, est un concept qui ne fonctionne parfaitement que sur papier. En pratique... l'on se heurte soudain à la lourde réalisation que la vue subjective et les impératifs de la création d'un bon jeu de plateforme sont antinomiques. Pas qu'il soit impossible de faire se côtoyer deux notions diamétralement opposées; hein. Cela s'appelle un consensus - ce n'est pas sale - et cela permet parfois de mixer deux idées opposées pour en faire une soupe tiède dépourvue de la plupart des qualités des deux influences que l'on tentait de mélanger. C'est ainsi que l'on se retrouve dans ce reboot - qui, de manière étrange, est presque parfaitement similaire à son prédécesseur - avec une version un brin simplifiée et donc un poil plus efficace de ce qui avait été proposé autrefois. Les fondamentaux restent les mêmes, par contre, car le but de la manœuvre n'est pas forcément de produire un titre excellent... mais bien de prouver le bien-fondé de la théorie susmentionnée.
Pour ce faire : un inventaire. Vous avez un grappin doté d'un treuil pour vous démettre l'épau... pour vous permettre de réaliser de gigantesques bonds dans une ville futuriste maintenant open-world. Vos chaussures? Rouges. C'est très chic. Votre vue? Augmentée, ce qui permet au jeu de vous dire où aller. Pas que ce soit forcément la meilleure manière de faire; hein. Mais on vous donne ainsi une vague idée de ce que vous êtes censé faire. L'on ne voudrait pas que vous soyez foudroyé par tant de liberté. Le scénario reste égal à lui-même : fonctionnel mais étrangement générique. Vous avez votre petit couplet sur les corporations maléfiques qui organisent le labeur des masses pour les asservir. Vous, bien entendu, êtes en-dehors de leur sphère d'influence malgré le fait que vous portez des habits de fashion victim et êtes coiffée chez Olivier Dachkin. Ah, et on tué vos parents lors d'une révolte. Car, j'imagine, vous êtes Batwoman. Rajoutez à tout ceci - que certaines personnes s'évertuent à trouver profond car elles doivent avoir douze ans - un gameplay un brin plus fonctionnel que celui de la mouture précédente et vous obtiendrez Mirror's Edge Catalyst. La version la plus fonctionnelle d'une idée maladroite mise en chantier avec bonne humeur par un studio qui fait ce qu'il peut à partir d'un concept extrêmement compliqué à mettre en oeuvre. Cela fera 60€.