Mettons les choses à plat tout de suite et levons les doutes et les ambiguïtés : le travail sur l’ergonomie d'un jeu n'est pas synonyme de casualisation. On peut estimer que faire de la pétanque avec des gants de boxe rajoute un fun précieux à cet instant magique, mais on peut aussi dire qu'il faut chercher à se faciliter la vie pour se concentrer sur l'essentiel.
Par le passé, la saga Monster Hunter nous a offert un boss rush dont le concept était finalement assez proche d'un Diablo, PSO ou World of Warcraft : se faire un avatar pour le monter au sommet de sa puissance, en farmant les meilleurs monstres pour se faire les meilleurs sets d'armure mais également les meilleures armes. Mais le génie de la saga tient dans un paradoxe : celui d'un gameplay abrupt et difficile, voir pénible à prendre en mains les premières heures, mais qui se révèle être d'une richesse incroyable, que les mots parviendrons difficilement à retranscrire aux profanes. Toutefois, la saga a souffert d'un nombre conséquent de lourdeurs, tant dans le craft, tant dans l'approche de la chasse (on pense à la nécessite de marquer les monstres pour en garder la trace), tant dans les débuts de l'aventure, nécessitant 3 à 4 heures de quêtes finalement inutiles.
La série devait-elle changer ? Sûrement pas ! Les bases sont trop solides pour s'aventurer à en discuter la pertinence. La série devait-elle évoluer ? Oui, mais plus que de la faire évoluer, le coup de génie de Capcom a été de sublimer son jeu pour en faire à la fois quelque chose d'accessible, de sublime, d'exigeant... De génial, tout simplement ?
Génial, et diaboliquement efficace, car Monster Hunter World est une synthèse de tout le savoir-faire du studio, pour une ergonomie et un plaisir de jeu optimal : plus besoin de passer par des missions-tutos longues et pénibles, on commence directement par la chasse aux monstres, le tout servit dans une histoire cohérente qui ne perd pas de temps à poser de grandes bases qui nous nous intéressent de toute façon pas dans ce type de jeu. On enchaîne nos missions avec une fluidité déconcertante, comme on (re)découvre un système d'exploration bien plus intuitif et jouissif que dans les opus précédents : les maps fragmentées en diverses zones laissent la place à plusieurs grandes régions d'une richesse visuelle et architecturale époustouflante. Mention spécial à la zone Val Putride, très probablement la meilleure région de l'histoire de la saga, qui fait le tour de force d'être d'une très grande diversité dans sa faune, sa flore et sa géologie tout en restant cohérente et logique.
Le sentiment de progresser et de faire évoluer son héros se fera à chaque instant : au sein du magnifique hub du jeu, vous sera donné la possibilité de choisir des requêtes : ces dernières peuvent être faites n'importe quand, et s'apparentent aux contrats d'un Destiny : des minis objectifs qui viennent se greffer à l'objectif principal d'une quête scénario ou libre. Cueillir un tel nombre de fois, miner tel ou tel minéral, ou encore capturer tel ou tel monstre, vous aurez toujours cette sensation de faire quelque chose avec un intérêt, sans temps mort, pour une intelligente course sans fin à la puissance et à l'évolution d'un avatar qui en aura bien besoin. Les armes, dont je n'ai pas la prétention de pouvoir vous parler avec exhaustivité, ont pour la plupart fait l'objet d'un sain ajustement (voir d'un remaniement complet pour l'arc notamment, pour le coup plus "noob friendly" dans son approche, mais restant extrêmement difficile à très bien maîtriser sur le long terme) pour une prise en main jouissive, et la possibilité de satisfaire le plus large panel de joueurs possibles en terme de styles disponibles. Là encore, le nouveau système de craft (qui s'apparente à un arbre de talents avec plusieurs embranchements) participera de cette montée en puissance, puisqu'il faudra obligatoirement faire évoluer vos armes pour espérer pouvoir vous défaire des ennemis les plus redoutables du jeu.
Véritables icônes de la saga, les monstres du jeu (essentiellement des dragons, des wyverns, et des "démons") seront à la hauteur de ce qui a été fait précédemment : ils présentent une opposition certaine, nécessitant un équipement adéquat comme précisé ci-dessus mais aussi une indispensable anticipation, qui passera nécessairement par la compréhension des patterns de chacun de la petite trentaine d'ennemis présent. C'est sans doute moins que les opus précédents : mais Capcom s'est engagé à nous livrer du contenu régulièrement, et d'ici là, vous aurez affaire à l'impitoyable endgame, livrant au joueur la version le plus violente de Monster Hunter World.
Je pourrai détailler chacune des mécaniques, chacune des nouvelles bonnes idées, parler du online et du multijoueur extrêmement bien amené, bien qu'un peu abscons par moment (mais vous allez vite prendre le coup, croyez moi) ou encore de cette science du détails propre aux grands jeux, mais Monster Hunter World est le genre de titre qui ne peut que se découvrir manette en mains, se vivre avec l'émerveillement d'un enfant qui découvre un monde sublimé pour un jeu qui fera date.
Les joueurs voulaient une évolution, ils ont eu un chef d'oeuvre.