L'odeur de Paris en jeu vidéo

J'aime les jeux d'enquêtes, les jeux indés et les visuals novels : ce jeu est parfait pour moi. En vrai, cela faisait un bon moment qu'il était sur ma liste de jeux à suivre et je l'ai acheté lors des soldes Steam.

Une très bonne écriture :

Se présentant comme un jeu d'enquête dans lequel on joue un chauffeur taxi parisien qui doit enquêter sur des meurtres en parlant avec les clients, NightCall n'a pas menti sur son étiquette. S'il on a le droit à un jeu d'enquête un peu bancal (on y reviendra) où l'on doit chercher des pistes sur un sérial killer (trois enquêtes différentes sont disponibles) le principal coeur de son gameplay reste les rencontre avec les clients dans notre taxi qui sont tous très différents : certains sont récurrents, d'autres ne reviendront jamais.

On a donc sous forme de dialogue de visual novel, ces rencontres avec les gens formant des petites histoires parfois drôles et parfois tristes. Parfois vous aurez un rôle à jouer permettant à la personne ne prendre la bonne décision ou parfois être une oreille attentive suffit. Et tout le sel du jeu est là : j'adore les personnages récurrents entre le vieux flic qui va vous raconter une sale affaire de sa carrière, l'éditorialiste réac façon Yvan Rioufol en plus boomer (si si c'est possible), la vie des quelques SDF qui viennent vous parler de leurs difficultés et les gens un peu ivres. Bon, parfois, ça tourne un peu au ridicule (vous faites une partie de jdr dans votre taxi, un chat utilise votre taxi et il y a des passages surnaturels) mais dans l'ensemble c'est vraiment bien raconté et prenant. Apparemment, j'ai vu certains avis anglais se plaignant d'un problème d'écriture, mais je pense que ça doit être la traduction qui est au fraise, tant sur Night Call j'avais justement été impressionné par l'écriture.

Là où il peut devenir un bouffe temps, c'est avec le Passidex : un index de toutes les rencontres avec les passagers dans lequel figure certains succès et montre les différents passages importants que l'on a débloqué ou pas lors des conversations. Une nouvelle peur nous guette alors : celle de foirer la rencontre avec les passagers uniques qui ne viennent qu'une fois. (Le jeu préférant ne pas remettre deux fois la même rencontre et privilégiant les personnages et les dialogues que l'on a déjà vus, y compris d'un run à l'autre, ce qui est tout à son honneur, le but c'est de voir le plus de gens possibles, pas de collectionner les rencontre au hasard.) Mais c'est vrai qu'il m'est arrivé d'être sec avec un personnage un peu trop facilement ou de ne pas jouer le jeu ce qui m'a fait éviter un succès.

Un jeu d'enquête un poil frustrant :

Le côté enquête se présente de façon plutôt sympathique on a six nuits pour éliminer les 5 suspects et trouver des indices qui nous permettent de savoir qui inculper. En plus de discuter avec des potentiels suspect dans le taxi, on peut enquêter sur place, lire le journal ou écouter la radio. Or, c'est du temps qu'on ne prend pas à transporter des clients... ce qui peut nous faire perdre de l'argent. Car on a des frais qui tombent tous les jours (et il faut mettre de l'essence dans le taxi) et arrivé à zero c'est Game Over. Même si c'est un élément de gameplay assez secondaire, c'est une épée de damoclès assez puissante pour nous forcer à jouer le jeu de faire le taxi de temps à autre en ne prenant pas forcément des gens liés à notre enquête.

Il arrive parfois que le jeu soit coupé et qu'alors qu'on pensait atteindre un client ou un indice, on ai l'apparition d'un fantome, d'une visiteuse du futur ou de nous-même en introspection. Ces parties sont certes, super bien écrites (le fantome vous donne un court d'histoire sur le passé tragique de Paris, le double de vous meme en raconte beaucoup sur le passé torturé du protagoniste et la visiteuse du futur peut nous donner un indice) mais comme on est un peu coupé dans notre élan, il arrive qu'on déteste leur intrusion. Mais je suppose que ça fait aussi partie de l'expérience de jeu.

Autre frustration (et je pensais que mon jeu avait un bug) on n'a pas vraiment les dossiers complets des meurtres et des suspects que l'on doit interroger. La flic nous donne les dossiers, votre personnage en extrait les passages qui donnent des indices mais on a pas les données complète (je m'attendais à un faux dossier d'autopsie par exemple) et c'est à nous de comprendre l'affaire à partir des quelques indices et du caractère des personnages lorsqu'on va les prendre dans le taxi. (Il est bien trop gentil, ça peut pas être lui.)

De plus, le jeu m'a induit en erreur par le gameplay je pensais qu'un personnage ne pouvait pas être le meurtrier car trop récurrent. En vrai, il chaque enquête est une sorte de reboot, on fait comme si les autres serial killer n'avaient jamais agit et comme si c'était la première fois que vous vous retrouviez à enquêter pour le compte de la police.

Vie parisienne simulator :

Comme tous les provinciaux, j'ai un rapport compliqué à Paris. Je n'y ai jamais vraiment vécu, mais je connais plutôt bien certains coins : j'ai déjà visité la ville plus d'une fois, j'y ai bossé plusieurs semaines au cours de ma vie, je l'ai traversée à l'occasion d'un transit, d'un événement, d'une soirée. Est-ce que je connais Paris ? Je ne sais pas, mais le jeu m'a évoqué cette ville.

Il y a une retranscription assez fidèle de Paris que ce soit sur la forme (on se balade sur le plan de Paris, on voit les grandes avenues à l'arrière de notre Taxi et de temps à autre l'image se fixe sur un coin de rue, une terrasse de café, un bar tabac sous la pluie) ou dans le fond, avec ces ultra-riches qui se payent un taxi pour sortir de bar luxueux, ces gens qui ne font que passer, et tout un tas de gens qui ne sont rien et se paye le luxe d'une balade en taxi de temps en temps parce qu'ils n'en peuvent plus (vous acceptez parfois de transporter des SDF.) Le tout se déroule à une époque qui doit être le mois d'octobre/novembre : il pleut beaucoup, il fait froid et ça déteint beaucoup sur l'ambiance du jeu. Le tout est magnifié par une super B.O. de Corentin Brasart.

Le jeu parle parfois du Paris historique (des fantômes viennent parfois dans votre taxi pour vous raconter les morts les plus célèbres de la ville) mais surtout du Paris actuel. Il y a évidemment un discours social assez intéressant, notamment dans le traitement des minorités et des classes sociales les moins aisées. Autant le dire, le jeu ne fait pas de mystère sur son message politique : c'est clairement un jeu de gauche dans son traitement où les gens porteur d'un discours réactionnaire étant souvent les plus ridicules et où le joueur est récompensé d'avoir d'être bienveillant avec les gays, les prostitués, les sans-papiers, les sdf, etc...

Il y a aussi tout un discours autour des attentats du 13 novembre à Paris (cela revient de temps à autre) ce qui est d'autant plus poignant que notre personnage principal est fils d'imigré et ancien musulman et qu'il est sous-entendu que son frère a fini par devenir terroriste. Il y a une reférence cachée à Fillon et une intrigue secondaire du jeu parle d'un batiment qui aurait flambé parce qu'il n'était pas aux normes. Hélas, un jeu qui parle d'actualité c'est un jeu vidéo qui vieillit vite et le jeu prend ses 3 ans dans les dents rien que parce que la cathédrale notre Dame de Paris est toujours debout et que personne ne parle de Covid.

Un Post-game parfois laborieux :

Chaque enquête prenant entre trois et quatre heures, finir les trois est possible au bout d'une dizaine d'heure. Mais ça m'a laissé un peu frustré, car il restait encore pas mal de passagers que je n'avais pas pris, de succès non débloqués et de rencontre que je voulais refaire. Je me disais que j'aurais l'impression d'être passé à côté du jeu si je n'avais pas au moins rencontré tous les personnages. Le jeu possède un mode "balade" dans lequel vous pouvez prendre des clients juste pour dialoguer, mais il est un peu buggué (il va vous reproposer des gens que vous avez pris trois clients plus tot et qui débiteront les mêmes lignes de dialogues) mais surtout les heures ne s'écoulent pas, ni les jours ce qui fait que les rencontres régulière ne peuvent s'enclencher.

Cela m'a reforcé à refaire des enquêtes, même si j'en savais l'issue (au moins je perdais moins de temps à chercher des indices.) Or, c'est en faisant tout ce post-game que j'ai vu les bugs apparaitre : certains événements sont dans le désordre, notamment l'histoire du prêtre qui commence sur la deuxième fois que vous le voyez et fini sur votre première rencontre avec lui. C'est d'autant plus bizarre qu'il fait parti des personnages débloquant un sucès. Pareil, en voulant faire les 100% j'ai appris sur les guides de jeux que certaines lignes de dialogues du Passidex sont impossible à atteindre. Je comprends pourquoi certains sont arrivés au 100% au bout de 200h.

On sent aussi que certains éléments avaient été implémentés et enlevé : ainsi une dame vous demande de ramener certains miséreux dans son centre d'hébergement... et on ne reparlera plus jamais de cette histoire. (Idem pour Busset qui parle sous-entend que vous avez une liaison avec une fille et on ne reparlera plus jamais d'elle.)

Après, j'ai apprécié quand même refaire ce post-game (avec quelques guides de jeux sous les yeux) notamment le plaisir de changer une ou deux réplique et de m'apercevoir que certaines rencontres peuvent être complètement différentes selon notre attitude, ce qui m'a impressionné sur la richesse du jeu. Le fait que je joue au jeu la nuits quasiment au même horaires que mon personnage fut vraimetn un plus dans l'immersion.

Pour ma part j'ai arrêté après 21,5 heures de jeux et 42 succès sur 45 de débloqués (93%) les deux restant étant basés sur des éléments arrivant au pif ou sur la complétion complète de tous les dialogues (ce qui demande parfois de refaire trois ou quatre fois la rencontre avec certains clients dont une partie n'apparait qu'au hasard.) Ok, on va dire que j'en ai fait le tour.