Difficile de faire une suite à un jeu qui a autant marqué les esprits que l'excellent Ori and the Blind Forest (2015). Un jeu qui est considéré à juste titre comme un des points d'orgues du revival du vénérable genre du Metroidvania débuté dans les années 2010, porté par l'explosion du nombre de projets de petits studios indépendants. Moon Studios, l'un d'entre eux, a pu compter sur le soutien de Microsoft durant le développement, et a proposé un jeu visuellement éblouissant avec une bande son magistrale et quelques idées géniales de game design (en particulier le bash).
Difficile de faire une suite, et Moon Studio le prouve avec Ori and the Will of the Wisps (2020). Car cette suite ne m'aura pas convaincu.
Disons le tout de suite : Ori and the Will of the Wisps est un bon jeu (d'où sa note). Il m'a bien accroché, je l'ai fini en trois jours, la maniabilité est plaisante, etc. Mais il est pris entre deux terribles tentations.
La première est celle de se reposer sur ses lauriers. Sur plein d'aspects, le jeu est presque un copié collé du premier volet. On a donc encore droit à l'histoire d'Ori qui doit encore sauver une forêt sur le déclin en allant encore récupérer des fragments de son essence, encore accompagné par un feu follet, faisant encore une fois face à la quasi-mort d'un membre de sa famille et devant encore une fois triompher d'une chouette maléfique au passé tragique. C'est vraiment du réchauffé, le pire étant la séquence de fin du moulin qui est presque un auto plagiat de celle de l'arbre ginso.
Idem concernant les graphismes et la musique, qui sont toujours au top mais pas spécialement plus beaux ou plus inventifs que ceux du premier jeu. Dans bien des cas je serais incapable de dire si tel ou tel environnement/mélodie vient de Blind Foret ou de Will of the Wisps.
La seconde tentation se résume à deux mots : Hollow Knight. Le chef d'oeuvre du genre, sorti en 2017, a manifestement beaucoup impressionné à Moon Studios, au point qu'on y retrouve de nombreux éléments... mais qui ont perdu beaucoup de leur intérêt au passage !
- le système de combat est beaucoup plus proche, avec notamment la présence de quelques bosses mais les points de respawn omniprésents annulent toute forme de difficulté
- un système de fragments inspiré des charmes d'Hollow Knight, sauf que la plupart ne sont pas bien utiles et tous prennent exactement la même place, il y a beaucoup moins de réflexion dans les builds... qu'on peut changer à n'importe quel moment, et pas seulement aux points de sauvegarde...
- un cartographe itinérant qu'il faudra retrouver dans chaque niveau pour lui acheter sa carte, sans la subtilité de la complétion aux bancs ou de la boussole...
- le système hybride xp/argent, mais vu qu'on ne perd rien à sa mort, pas d'enjeu.
En fait, il y a une différence de philosophie entre ces deux jeux : HK est plus lent, plus réfléchi, là où Ori est plus basé sur la fluidité et la vitesse (d'ailleurs ses meilleurs moments sont les courses poursuites où l'on bash dans les airs comme un fou). C'est un peu la différence entre Mario et Sonic, version metroidvania. Du coup ces "emprunts" dispersent plus Ori qu'ils ne jouent sur ses points forts, et c'est bien dommage.
À noter un portage moyen sur Switch, qui peut ramer voire planter.
Bref, Ori and the Will of the Wisps est un bon jeu, peut-être même supérieur à son prédécesseur. Mais c'est paradoxalement une mauvaise suite, dispersée et en panne d'inspiration. Espérons que Team Cherry ne fasse pas les mêmes erreurs pour la suite d'Hollow Knight, Silksong, dont j'attends avec impatience la sortie.
Fini à 96% en 17h