First Person Ethics game.

On connaissait les FPS, voilà le premier FPE : le first person ethics. Un concept qui a bien du faire sourire sur papier mais qui est mis en oeuvre avec une dextérité sans pareille (ce n'est qu'une expression, ne vous emballez pas). "Alors tu vois mon jeu c'est incarner un garde frontière dans un pays communiste, tu tamponnes les passeports et tout".

Et c'est juste totalement excellent. Pourquoi pourquoi, eh bien parce que le jeu vous offre (pour de vrai ou pas) une liberté éthique, voire un poids éthique (ce qui est quasi la même chose) sur chacun des citoyens acceptés et refusés.

Au premier chef de votre expérience : le rapport à la norme. En tant que fonctionnaire par définition zélé et amoureux de votre patrie, votre rôle est de respecter et de faire respecter la norme. Mais avec quelles conséquences pour vous et vos proches ? Élément discret mais prenant, vous avez une famille qui se les gèle dans votre appartement de fonction tout pourri, et que vous ne pouvez pas nourrir ni soigner avec votre paie de merde.

Alors vient la deuxième étape : une fois le rapport à la norme établi (respect ou défiance, et dans quelles largeurs), comment abordez vous les conséquences du choix premier ? Plusieurs possibilités s'offrent à vous. Elles renvoient aux trois grandes branches de l'éthique classique.

Soit vous faites le conséquentialiste : je fais ce dont je pense qu'il me sera le plus profitable, ou le plus profitable à la nation, ou au révolutionnaires etc. En anticipant sur les effets des actions, vous les jugez préférables ou non.

Autre possibilité, l'éthique déontologique : vous respectez les règles le plus à la lettre possible et puis c'est tout. Être un bon garde frontière = faire respecter la loi au mieux de vos capacités, peu importe les conséquences. Vous verrez bien ce qu'il se passe.

Mais peu-être serez-vous tentez par une éthique de la vertu personnelle, ou vous essayerez de comprendre ce qu'il faut faire pour faire le Bien. Vous tenterez alors, depuis le pouvoir que vous donne votre job minable, de faire "la bonne chose à faire", en dépit de ce que disent les lois, et en dépit des conséquences pour votre famille.

Devant ses airs de jeu minimaliste, Papers, Please offre en fait un terrain de jeu méta-virtuel (du virtuel dans le virtuel) sur le plan éthique. Le plus terrifiant étant peut-être que l'ambiance communiste totalitaire est vraiment bien rendue et que tout ça est à la limite du documentaire social. Un coup de maître.