Finalement, je préfère vivre dans les années 2010 !
Aaaaaaaaah .... Souvenez-vous, c'était dans les années 1980-1990. Que ce soit dans les séries ou dans les films de l'époque, les méchants étaient tous les même, venant généralement des contrées du Moyen-Orient ou de la perfide et obscure Union Soviétique. Les scénaristes nous avaient habilement habitué à nous méfier d'un petit accent de l'Est qui était souvent synonyme de tyrannie et d'oppression, ou encore de complot derrière un joli rouge à lèvre brillant. C'était primaire, mais c'était d'époque.
Depuis, les ennemis ont un peu changé. On a arrêté, un temps, de taper sur nos voisins d'ex-URSS. On a pris de a distance. De la hauteur. On a appris ... un peu. Et - Papers, Please en est le témoin, on a appris à en rire, avec une certaine intelligence par moment.
Car Papers, Please nous met dans la peau d'un représentant éminent de ces républiques obscures et opaques de l'ex-URSS, en la personne du suspicieux et peu sympathique douanier qui accorde, ou pas, le droit d'accès à la Terre Promise. Enfin, Terre Promise ... Pas tant que ça. Quand on voit les conditions de vie de notre avatar dans le jeu, ne parvenant pas sur une même journée à payer son loyer, sa bouffe et son chauffage, et décidant de ne pas alourdir sa dette par l'achat de médicament indispensable à la survie de son fils, on se demande bien pourquoi tant de gens font la queue pour entrer dans ce beau pays.
Ce qui fait la force de P,P c'est le traitement pas forcément subtil, mais finalement assez humoristique et parodique de la mission qui vous est confié. Comme mentionné plus haut, ça transpire pas la joie dans votre coin. Votre mission vous sera précisée et évoluera au fil des jours et des évènements qui ponctueront l'actualité. Les étrangers deviennent les boucs émissaires de l'envolée du chômage ? Il conviendra de demander à tous les travailleurs entrants un Permis dument tamponné par l'administration. Une tentative d'attentat d'un pays voisin ? C'est le scanner qui vous permettra de découvrir les éventuels objets dissimulés par les immigrants.
De fait, il y a plusieurs façon d'aborder ce jeu. En respectant parfaitement les régles du jeu, ou en prenant quelques libertés permettant notamment de gagner un peu plus de sous (souvenez vous votre fils mourant) ou encore de privilégier quelques mouvements contestataires underground. Pour ma part, j'ai peu ressenti le caractère moral évoqué par d'autres joueurs dans certaines critiques. Par son traitement graphiques et son ergonomie, P,P est un jeu qui laisse peu de place à l'attachement et à la sensibilité. Peu de cas moraux en ce qui me concerne, mais différents chemins de jeu à explorer, pour voir quelle vacherie ou quel trait de caractère va s'exprimer dans la suite de notre quotidien.
P,P c'est avant tout cela : un jeu un peu fantaisiste nous permettant d'explorer avec distance et humour ce que peut être le totalitarisme. Une variation à l'image des comédies d'antan comme les "Y a-t-il ?" ou "Hot Shots", le gameplay en plus.
Le gameplay, justement, bien que présent, ne constitue pas la colonne vertébrale du jeu. Certes, il y a des automatismes à prendre et des erreurs à ne pas faire, mais sans le contexte et l'humour du jeu, je suis persuadé que nombre de joueurs auraient lâché très rapidement leur clavier et leur souris.
Un jeu léger autour d'un sujet bien lourd, un humour pas forcément novateur mais s'articulant habilement avec un gameplay pas idiot mais un peu désuet, c'est ce qui fait de Papers, Please un jeu sympathique, à jouer définitivement pour peu que vous ayez la possibilité d'acquérir le titre en solde.