Malgré quelques hésitations dues au genre du jeu (a priori en grande partie D-RPG) et à son esthétique manga, j'ai acheté Persona 4 Golden sur Vita dès sa sortie histoire de m'occuper un peu, ayant peu de jeux à ma disposition à cette époque. Finalement, le jeu s'est avéré bien plus qu'un simple bouche-trou au point même que je l'ai fini une deuxième fois pour faire ce que je n'avais pas pu faire dans ma première partie. Qu'est ce qui a finalement réussi à me plaire dans ce jeu qui partait avec, de mon point de vue, beaucoup de handicaps sur le papier ? Nous allons le voir.
Une histoire immersive et dense malgré une narration un peu lancinante
Voyant ses parents partir à l'étranger du fait de leur activité professionnelle, un jeune lycéen delà ville part vivre chez son oncle Dojima durant une année à Inaba, petite bourgade fermière du Japon. Si le monde dans lequel vit notre héros s'avère tout à fait réaliste, il va vite rêver d'un homme mystérieux lui annonçant qu'il devra découvrir la vérité durant cette année très spéciale. D'ailleurs, il va vitre être mis au fait d'étranges rumeurs concernant l'apparition à minuit, les jours de pluie, sur les écrans de télévision du visage de l'âme sœur des téléspectateurs. Evidemment curieux, il va, avec d'autres nouveaux camarades de classes, vouloir vérifier ladite rumeur. Evidemment, puisque l'on est bien dans un jeu vidéo, les rumeurs étaient vraies et emmèneront même le jeune homme à découvrir sa capacité à entrer dans le monde de la TV, une espèce d'endroit environné de brouillard habité par des ombres mornes. Quelques jours plus tard, il découvrira encore un autre de ses pouvoirs, celui d'invoquer un Persona, sorte d'avatar capable de lancer des sorts et compagnie (un peu à la Blue Dragon). Parallèlement à cela, il devra enquêter sur une série de crimes mystérieux en lien, bien entendu, avec ce monde parallèle.
Assez original dans son speech initial, Persona 4 Golden tire majoritairement sa force dans son apposition de deux univers qui induisent deux axes de narration parfois concourants, mais aussi, et nous le verrons plus tard, deux modalités de gameplay qui apportent de la variété à ce qui serait, si l'on prenait chacun des axes de façon séparés, très répétitif et lassant isolément.
Ainsi, dans le monde réel, le joueur est amené à augmenter des "social links", c'est à dire ses relations avec son entourage que sont ses camarades de classe, sa famille d'accueil, ses collègues de travail, etc. Concrètement, cette activité consiste en dialogues interactifs (des choix interviennent et jouent sur la rapidité de l'évolution du social-link qui s'étale sur dix rangs et sur sa nature (par exemple petite amie)) centrés sur les problèmes des personnages concernés. Assez bien écrits et variés dans leur déroulement, ces phases permettent au jour de vraiment s'immerger dans son personnage et dans l'univers du jeu en renforçant son attachement à ces derniers. Dans le fond cependant, on retrouve toujours un peu la même tonalité et la même progression psychologique centrée sur le "vrai moi".
D'ailleurs, cette thématique du "vrai moi" et de la vérité en général sont des notions transverses à l'ensemble de la trame narrative du jeu qui s'avère parfois un peu, il faut le dire, casse-bonbons. En effet, Persona 4 Golden a cette fâcheuse tendance japonaise à marteler ses idées comme pour être sûr que le joueur ait finalement retenu la leçon la dixième fois (les ajouts de la vraie fin sont d'ailleurs presque des redites de tout ce qui a déjà été dit cinquante fois au cours du jeu), sans oublier cette manie d'énoncer ce qui était une évidence (voire quelque chose de déjà dit) comme une grande découverte. D'ailleurs, sans spoiler, des faits majeurs étaient relativement prévisibles tellement le jeu en fait des caisses.
Outre les social-links, de nombreux évènements de la vie étudiante ou de la vie en général (fêtes, vacances, cours etc.) ponctuent le jeu et apportent un grand bol d'air après de longs donjons tout en renforçant l'aspect RPG et l'immersion. Jouant sur la dynamique de groupe et de ses archétypes le composant, le jeu offre un large panel de tonalités pour un résultat ultra-addictif.
Autour du monde de la TV, la tonalité sera bien entendu plus grave et consistera à traverser les donjons pour aller secourir les victimes qui ont été poussées dedans. Presque à chaque fois, le donjon permettra de découvrir les pensées les plus profondes d'un de ses futurs coéquipiers qui acquerra son propre Persona (et donc sa capacité à combattre), symbole de l'acceptation de sa face cachée. Là encore, les thématiques abordées sont un peu redondantes et la profondeur assez faible, mais certaines révélations peuvent surprendre.
Au final, malgré une certaine redondance et un côté un peu simpliste dans le scénario (même dans la fin assez allégorique mais tout de même convenue) , malgré une narration qui en fait un peu trop, Persona 4 Golden s'avère être une expérience narrative très plaisante grâce à des personnages de qualité, une dynamique de groupe réussie, une écriture à la hauteur, des situations variées alternant entre vie normale et vie "magique" et une bonne densité narrative (le jeu est très bavard, j'adore).
Un mélange astucieux d'activités pas forcément toutes géniales prises isolément
A l'image de la narration, le gameplay de Persona 4 tire sa grande force de sa variété articulée autour des deux univers très différents.
Nous faisant vivre (presque) chaque jour d'une année entière, Persona 4 Golden laisse au joueur le choix d'organiser (du moins en partie, forcément quand l'on parle d'un jeu qui raconte une histoire) son emploi du temps. Une journée se divise en deux ou trois temps. En semaine, la journée commencera par des cours qui seront régulièrement l'occasion de répondre à des questions de culture générale permettant de gagner des points d'intelligence, une des cinq compétences de la vie réelle à développer. Ces compétences, que l'on peut acquérir dans les activités du jeu, permettent de débloquer certains dialogues (dont certains de S-link) ou jobs et sont donc assez importantes. Ensuite, le joueur sera libre de faire une activité de son choix comme développer rn S-Link, faire un petit boulot (ce qui permet de gagner de l'argent, des compétences de la vraie vie et, dans certains jobs, des S-link), aller au cinéma (permet de leveler ses Persona), participer à un club (un peu comme les jobs sans l’argent), etc. D’autres activités peuvent être pratiquées sans faire avancer le temps comme la pêche ou le jardinage (qui fournissent des objets). Enfin, le soir, vous pourrez faire des jobs de nuit (chez vous ou dehors) ou augmenter un peu vos S-link. Le dimanche et les vacances ont un déroulement similaire sans cours. Des gens pourront cependant vous appeler pour sortir.
En somme, le monde de la vie réelle s’apparente à une espèce de simulateur de vie un peu comme un Shenmue ou un Yakuza (même si cela reste différent dans la forme). Si aucune de ces activités ne propose un gameplay très profond, la quantité de ces dernières ainsi que la liberté accordée (même si la surface géographique est, de fait faible) constituent finalement une expérience agréable et dramatiquement addictive. De plus, là encore, l’enchaînement entre les deux mondes fait oublier la répétitivité et offre deux visions complémentaires qui peuvent se résumer : après le boulot (les combats, le repos (la vie étudiante qui est un vrai régal après de longs donjons).
De fait, les donjons constituent effectivement des corvées parfois un peu gonflantes de mon point de vue. Grosso modo, tous les donjons, excepté dans les textures des couloirs (de qualité hétérogène je dois dire), se ressemblent puisque générés en grande partie aléatoirement dynamiquement (les étages de boss et mini-boss ne changent pas) avec des formes types raccordées entre elles (le long couloir en angle, la disjonction en T, la pièce carrée avec cercle central, etc.). Dans la progression également, vous serez accueilli à chaque étage pas une ou deux phrases narratives et devrez-vous faufiler jusqu’au prochain escalier en vous débarrassant des ombres qui vous barreront le passage, un vrai D-RPG quoi.
Heureusement, les développeurs sont arrivés à faire passer la pilule même à un type comme moi qui perd de plus en plus patience devant ce genre de choses avec l’âge. Outre la motivation de voir la scène de la confrontation avec l’ « autre moi » des différents protagonistes, le jeu propose tout un tas d’éléments de confort appréciables. Le premier est la possibilité de sortir du donjon avec un objet ou une technique, de sauvegarder et/ou de retourner dans la vie réelle et de reprendre le donjon quand on veut (avant une certaine échéance de fait, mais c’est quand même assez large) à l’étage où on l’avait arrêté. Même si personnellement je préférais rapidement finir le donjon pour être tranquille, cette flexibilité s’avère appréciable pour un rythme adaptatif et permet de se soigner. Le deuxième point positif est que les ennemis apparaissent sur la carte et ne lancent un combat qu’une fois touchés (on peut même les attaquer par derrière, ce qui est très simple, pour avoir un tour d’avance et rapidement finir le combat). Avec des combats aléatoires, je sens que j’aurais rapidement perdu patience. Ensuite, les étages sont de fait assez courts et l’on ne peut vraiment pas s’y perdre grâce à une carte et une absence de pièges et compagnie. Certains n’aimeront pas, mais personnellement je ne vois pas l’intérêt de parcourir des kilomètres de couloirs ultra-répétitifs, ça suffit comme ça dans Persona 4. Enfin, les combats offrent des options assez dynamiques que je vasi détailler ci-dessous.
De fait, le cœur de la partie « TV » du jeu s’incarne dans les combats. Au tour par tour, ces derniers sont centrés sur les faiblesses (ou résistances) des ennemis (et des alliés) qui peuvent être de 8 types. Frapper une faiblesse de l’ennemi fait chuter ce dernier à terre et octroie une frappe supplémentaire. Une fois tous les ennemis à terre (et donc plus vulnérable, le groupe a la possibilité de lancer une attaque groupée relativement puissante. Ainsi, les combats consisteront à frapper avec les éléments qu’il faut pour mettre tous les ennemis à terre tout en veillant à protéger ses propres faiblesses. De plus, de nombreux éléments dynamiques interviendront au fur et à mesure que vous augmenterez vos S-Link comme par exemple un équipier qui vient relever un autre, lui donner une gifle pour le sortir de sa confusion, enchaîner sur un de vos coups qui a mis à terre un ennemi en faisant la même chose sur un autre, buffer toute l’équipe, etc. Enfin, exploiter les faiblesses permet d’augmenter les chances de rencontrer un « shuffle time », une sélection de cartes qui permet d’obtenir des bonus divers (augmentation permanente de statistiques, de l’expérience gagnée, acquisition de Persona, etc.). Là encore, le côté combo des combats s’incarne dans cette partie cartes puisque des malus permettront e tirer plus de cartes et ainsi, si vous arirvez à prendre toute sles cartes proposées, vous permettre d’avoir à coup sûr un shuffle time au combat suivant avec des avantages supplémentaires pour maintenir la chaîne. Ainsi, cette partie consistera à chaque fois à tirer les cartes dans le bon ordre pour entretenir l’apparition de l’évènement.
L’autre grande force du titre s’incarne dans les Persona. En assez grand nombre, ces derniers pourront être équipés par le héros principal (on ne peut pas changer les Persona des autres même s’ils peuvent évoluer avec les S-Link) et « tunés » avec des cartes de compétences. En plus de cela, les Persona récupérés sous forme de cartes peuvent être fusionnés pour compléter le compendium (sorte de Pokédex) et ainsi en obtenir de meilleurs. Concrètement, beaucoup de Persona se ressemblent et seuls quelques-uns sortent du lot. Je ne vais pas trop présenter cette fonctionnalité qui est assez centrale puisque ce serait assez long et que je ne l’ai pas énormément utilisée tout simplement parce que le jeu est rapidement très facile avec n’importe quel Persona (je n’ai changé qu’une fois pour un combat) et que se focaliser sur un seul permet d’avoir de hautes statistiques (grâce aux bonus accumulés avec le Shuffle Time) et compétences tout en couvrant ses faiblesses. De fait, la collectionnite ou la volonté d’avoir la stratégie parfaite (utilisation de techniques particulières ou choix de bonnes résistances).
Mis à part ces éléments dynamiques et les Persona qui rendent el jeu assez plaisant malgré une très grande pauvreté des donjons dans leur level-design, le système de combat s’avère somme toute classique voire caduc du fait de la trop grande facilité des combats. Si certains boss sortent du lot, beaucoup sont assez bourrins et la technique classique du heal/protection/frappe suffira.
En conclusion, Persona 4 Golden tire sa puissance de la recette dans laquelle il injecte tous ses ingrédients articulés autour de deux mondes complémentaires narrativement et ludiquement. Très addictif grâce à sa variété et son côté simulateur de vie, très immersif grâce à sa galerie de personnages variés et très attachants, sa dynamique de groupe et sa narration d’assez bonne qualité, Persona 4 Golden demeure une aventure marquante , tantôt drôle, tantôt touchante, de laquelle on ressort un peu triste comme notre héros qui doit repartir chez lui. La maîtrise de la recette fait presque oublier des défauts gênants comme une certaine pauvreté dans la plupart des éléments pris séparément et dans sa narration qui en fait parfois des caisses, ressassant certains disques en boucle et affichant des évidences comme des révélations. Je lui mets un bon 8, pas si loin que ça du 9, du fait de l’absence de vrai moment transcendant même si le jeu propose une aventure très riche, originale avec un rythme soutenu pour une qualité relativement bonne tout le long.