Persona 5: Royal
8.9
Persona 5: Royal

Jeu de Atlus (2019PlayStation 4)

Bas les masques Atlus, ô grand roi du soft power.

Au travers de ces dernières décennies, le Japon a su parfaitement saisir la puissance d’exporter sa culture pour gagner une place sur la scène internationale. Grâce à de nombreuses œuvres littéraires, cinématographiques ou les jeux vidéo, le Japon a su rendre sa culture attirante de par le monde et créer un imaginaire collectif qui n’a que des yeux doux au regard de l’archipel. Il serait bien inutile de faire une liste exhaustive, mais encore aujourd’hui et malgré un affaiblissement de sa prestance en Asie, avec l'émergence des autres géants, il reste au Japon cette chose qui fait que nous, grands amateurs de jeux vidéo, sommes des cibles faciles face au petit plus indéchiffrable des artistes japonais, qui en dehors des carcans de codes éditoriaux peuvent nous offrir des œuvres intemporelles.


Première victime ici n’est autre que l’auteur de cette critique, près de 7 ans auparavant, je me suis décidé avec des amis à venir vivre ici même, et si en ce temps la série des Persona n’était pas dans mon esprit, c’est bien au travers d'autres œuvres Japonaises que mon attirance s’est vu matérialisée dans le cœur d’un enfant et au fur et à mesure dans l'inconscient d’un adolescent. Ce n’est qu'arrivé à l'âge adulte que j’ai réalisé la force de ses outils de soft power¹.


Si je pourrai me qualifier de "patient gamer", Persona 5 ne fait clairement pas partie des œuvres dont j'ai fait le choix consciemment d’attendre, mais bien une contrainte.


Compléter un Persona, c'est une ritournelle que je me répète à moi-même depuis bien des années. Sans mauvaise volonté ou choix personnel d’esquiver la série, c'est le mur du temps libre qui se dressait contre moi qui m’en a empêché. Persona 5 demande un investissement important ou d'entrée celui-ci nous aborde en nous demanda explicitement de prendre notre temps, l’esprit gaman japonais, la patience, attendre dans une file 3 heures pour un ramen si vous voulez, si on n'adhère pas à cette formule ou que l'on ne peut pas, alors simplement Persona 5 vous tombera des main, c'est pour cela qu'il est alors important d’attendre le moment propice, le jeu vous le rappel sans cesse durant les chargements “take your time”.


Puis vint la fin de l’année 2022, pour diverses raisons personnelles et du temps libre plus présent qu'à l'accoutumé, j’ai décidé de franchir le pas. Me voilà un mois et demi et à la lisière des 120 heures au compteur plus tard à devoir vous narrer mon ressenti sur Persona 5 et cela ne va pas être un exercice facile, loin s'en faut.


Depuis mon expatriation au Japon, je suis de moins en moins sensible aux œuvres de JRPG de manière générale, mon expérience en tant que joueur évoluant au fil des années et cette constante imprégnation dans la société japonaise fait que certaines ficelles me paraissent bien trop grosses et répétitives pour que je puisse trouver quelque sorte d’exotisme dans la majorité de ces œuvres modernes, souvent bien trop scolaires et formatées pour l’export en désignant un public majoritairement jeune et sensible aux codes appliqués dans les shonen et toutes autres œuvres visant un public profane.


Mais, si je raconte tout cela c’est pour en venir vous vous en doutez à Persona 5, car au delà de tout ce que j’ai pu formuler plus haut Persona 5 ne rentre pas dans cette case, avec celui-ci j’ai retrouvé une âme d’enfant, un plaisir que je n’avais pas ressenti depuis FFX (même si entre temps, j’ai fait d'autres très bons JRPG ndlr…), ici j’ai trouvé une sorte de capsule réconfortante, bien écrite dans l’essentiel, une oeuvre qui comprend tous les codes de l'archipel dans ses moindres nœuds, des recoins sombres aux choses de la vie quotidienne, des clichés établis aux codes de la société, Persona 5 se joue de tout avec intelligence.


Si on n'échappe pas à des tics d’écriture propre aux relations sociales japonaises, j’ai trouvé dans son ensemble le jeu être une perle de condensé de la culture nippone, à la manière que Yakuza Zero est une capsule des années 80/90, avec un humour plus présent certes.


Persona 5, c’est un peu le Witcher 2 ² japonais vous voyez, celui ci que feu Shinzo Abe aurait dû donner à Obama lors d'une visite à la maison blanche.


S’inscrivant dans la catégorie des bombes culturelles que le Japon aura lâché au cours de ces 50 dernières années, est ce qu’on en parlera dans des dizaines d’années à la manière qu’on aborde un Berserk, un Mon voisin Totoro ou un Metal Gear ? Surement.


Oui, on peut affirmer que j’ai réellement apprécié le temps passé sur Persona 5, tout comme j’ai adoré dévorer la lecture de chaque dialogue, mais est ce que cela en fait une œuvre parfaite ? Malheureusement non, car si j’ai eu face à moi un jeu au gameplay incomparablement profond, peut être le plus profond que j’ai vu à ma connaissance dans un JRPG, une écriture solide, j’ai vu aussi un jeu qui ne m’a pas présenté un niveau de qualité stable tout au long de l’aventure, car simplement, Persona 5 est trop long, beaucoup trop long. Ce qui pourrait tout aussi porter préjudice à réellement transmettre cette œuvre à tous, du moins aux personnes qui le souhaiteraient, mais ne possèdent pas 120 ou 130 heures de lecture (majoritairement) devant elles.


Je vais vous épargner les formules habituelles, car comme souvent, j'arrive bien après que la moitié du globe ait fait le jeu, mais qu'importe, on va survoler rapidement le pitch d'entrée.


Après une introduction des plus énigmatiques dont je laisse la surprise à chacun d’entre vous, le jeu entreprend un retour dans le passé qui nous amène à contrôler le protagoniste aperçu plus tôt. Cet étudiant au passé trouble se voit transféré dans un nouveau lycée suite à ses soucis avec la justice (retenez bien ça.), ce point régira tout le reste du récit, il est donc important d'écouter et de regarder attentivement chaque "scénette" à partir de cet instant pour évaluer la direction prise par l'histoire. Notre protagoniste se voyant être hébergé dans un café par son nouveau tuteur propriétaire des lieux, on comprend rapidement qu'on va diriger notre personnage tout au long d'une année scolaire japonaise (qui commence en avril), et non pas un jour sur deux, mais bel et bien durant les deux semestres complets. Parsemé à de rares exceptions par des vacances, jours fériés et autres évènements concernant l’histoire.


Dès le début de l’aventure, on se verra confronté à un fait étrange qui nous emmènera dans un lieu entre les rêves ou une personne nous confie une mission, la réhabilitation. Sans en dire plus, on continuera rapidement notre journée au lycée et ce n'est que là qu'une deuxième manifestation louche apparaîtra.


Après avoir fait la connaissance de notre premier partenaire et un de nos professeurs, on se retrouve face à ce qui semble être un monde parallèle alors qu'on était censé marcher jusqu'à l'école. Ce monde semble être régi par des lois différentes et aux "habitants" des plus excentriques. Ici, on fera la connaissance du concept de Persona qu'on abordera plus bas et je n’ai pas besoin d’aller plus loin pour le moment, cette parenthèse étrange se fermera rapidement, nous laissant pantois face à ce qui vient de se passer et dans l'expectative face à la suite du récit.


De retour dans le monde réel, vous devez bien entendu rejoindre votre classe de cours, celles-ci sont parfois ponctuées de questions (plutôt très instructives d’ailleurs) des professeurs, de rapides dialogues et des examens, ou par moment le temps défilera simplement, automatiquement pour vous amener après les cours.


En plus de l'école, votre vie quotidienne sera constituée d’activités hebdomadaires à entreprendre au bon vouloir du joueur durant la très large majorité du calendrier, certains jours étant scriptés. Les activités vont du simple cinéma, au jeu de fléchettes, en passant par un club de jazz, ou au restaurant. La diversité des tâches est très appréciable et se renouvèlent tout au long de l’aventure ce qui fait que même arrivé au bout du jeu, on n'a pas trop la sensation de répéter en boucle les même actions.


La force principale de Persona 5, c’est de lier toutes les strates du jeu entre elles, nos activités quotidiennes et la consolidation de nos relations, ou non, influent directement sur le gameplay. De plus, le temps limité nous imposera une réflexion poussée sur ce qu’on décidera d’entreprendre dans la vraie vie pour nous aider dans cet autre monde (abordé rapidement plus haut), qualifié de metaverse (non Zuckerberg n’est pas le boss final).


Comme vous vous en doutez, je ne vais pas pouvoir soigneusement expliquer tout en détails vu la taille du jeu, mais ce qui apparaîtra rapidement aux regards de chacun, c’est que Persona 5 propose ici une formule assez unique. Plus proche d’un visual novel qu’un vrai action RPG, on passera la vaste majorité du temps à flaner dans la ville, mais aussi à construire nos relations avec nos camarades de classe et tout autres protagonistes croisés au fil de l’aventure.


Malgré un gameplay qu’on pourrait qualifier de puits sans fond tant celui-ci est riche et passionnant, les dialogues restent quand même la colonne vertébrale de l'œuvre. Écrit avec un recul et une intelligence rarement vus ces dernières années au Japon, on trouvera nombre de sujets passionnants. La critique qui est faite de la société japonaise bien sûr, positive ou négative d’ailleurs, est un point majeur et sans être gêné par les clichés habituels, j’ai trouvé ici une écriture maîtrisée qui a su me surprendre et se jouer de moi, tout en maniant avec la manière l’art de l’humour malgré la sévérité de certains thèmes abordés. Société japonaise oblige, on échappera pas à certains sujets bien sombres que l'après-guerre et la rapide expansion de l'économie japonaise à créer, en soit proche de ce que Tezuka a pu faire dans les années 70/80 mais ici avec plus de légèreté, du moins à première vue.


Mais si un point ressort particulièrement dans l’immensité du récit, c’est bien entendu celui qui dicte l'histoire principale, la philosophie et le concept de Persona.


Directement lié au gameplay du jeu, Persona est un concept de psychologie analytique proposé par Carl Gustav Jung qui se réfère directement à la personnalité de chacun.


Si le choix de jouer un étudiant peut paraître surprenant au premier abord, il prend tout son sens en relation avec ce concept, en particulier dans une société japonaise qui par sa dureté impose souvent des codes sociaux lourds et une pression sociale qui demande à chacun de jouer un rôle dans cette société où vous n'avez pas réellement droit de véto, ce qui requiert souvent de se cacher derrière un voile, un masque…


D'autant que comme vu plus haut, notre protagoniste s'est vu attribuer un casier judiciaire, chose qui plus qu'ailleurs, au Japon vous empêche littéralement de vivre une vie normale, pas besoin de points social à la Black Mirror le bouche à oreille fera l'affaire.


C’est pour cela que le jeu n’existe pas que dans ses combats, mais bien principalement via ses interactions sociales, et c’est en particulier vrai avec ce groupe de jeunes qui grandira au fil de l’aventure. Ici, le message s’adresse en toute logique à une jeunesse japonaise inerte, en plein conflit générationnel, qui doit prendre son futur en main pour remodeler une société créée par des adultes qui semblent tous avoir des ombres bien malveillantes dans leurs sillages. Cet outil de socialisation sonne aussi comme un rappel à l’ordre dans un pays où le nombre de personnes seuls devient un danger pour l’existence même du territoire (c’est aussi un phénomène globalisé), que l’aventure prenne place dans une mégalopole tentaculaire comme Tokyo et non pas dans la campagne similaire à Persona 4 n'est pas vide de sens. C'est clairement un choix assumé à la signification et résonance particulière ou progresser ne peut se faire que grâce à vos relations sociales, bien loin de la norme réelle établie sur Tokyo et ses alentours.


Ce sera à l'équipe des voleurs fantômes de remodeler l'esprits des adultes en infiltrant leurs têtes tout en se servant de leur pouvoir de Persona dans un metaverse où ils peuvent exprimer réellement ce que leur cœur leur dit et souhaite, dans un monde sans codes à respecter, libérés de leurs cordes que la société japonaise a noué autour d'eux.


Chaque retour dans le monde réel en faisant face à cette foule dans le métro, tous avec des modèles 3D identiques au passage, se déversant dans les rues de Shibuya, ne sera que plus compliqué. Un retour à la réalité qui fait mal et qui forgera l'émotion de fin de récit. Persona 5 est simplement le jeu le plus Japonais que j’ai eu la chance de faire, car ce pays compose naturellement avec le concept de Persona plus que toute autre société moderne.


Pour Altus, il suffisait certainement que de se pencher à la fenêtre de leur immeuble à Tokyo et observer les gens en contrebas pour visualiser cela, une imagerie qu'on retrouve bien sûr dans le jeu avec le directeur de la police se contentant de rigoler et d'observer les pâtés de maison 50 étages plus bas dans un rire cliché, mais au sens profond.


Rien n'est du au hasard dans Persona et chaque protagoniste ami comme ennemi à un rôle majeur dans la compréhension des évènements. Et si parfois les premières interactions avec des personnages mènent à des codes déjà vus, c'est pour mieux rouler le joueur dans la farine au fur et à mesure qu'il renforcera le lien avec les personnes en question, démontrant parfaitement qu'il ne faut jamais juger un homme ou une femme trop vite et encore moins via son apparence. Et ce ne sont certainement pas tous les boss du jeu, qui sont de parfaites extrapolations de cas réels, qui viendront contrebalancer ce fait. Grace à un confucianisme latent, les adultes (boss du jeu) essayent de continuer dans le monde réel d'imposer leur dictat qui existe toujours dans une société et dans une langue profondément marquée par son histoire de hiérarchie.


Encore une fois Persona 5 s'adresse à tous, mais est bel et bien une vitrine exposant à la vue du monde entier tout un pan de la culture Japonaise ratissant des années et années d'histoire par le simple médium qu'est le jeu vidéo, mais entendons nous, bon nombre des sujets traités par Persona 5 peuvent très bien être transposé dans d'autres pays plus ou moins facilement et c'est aussi pour ça que cette œuvre reste un pilier du soft power japonais, “la manière douce”.


C’est cette pensée et ce lien entre les deux mondes du jeu qui pour moi donne toute la saveur de Persona 5 et le place au-dessus de la masse générique de JRPG récents. Forgé par des centaines de détails et influences entre les deux mondes, Persona 5 se libère très sensiblement de la façon de progresser des jeux de rôles en général, ici, il ne s’agit pas qu'uniquement de se battre pour progresser, mais bien renforcer ses interactions sociales avec son équipe ou autres personnes extérieures pour avancer dans le récit et construire notre équipe via des compétences déblocables suivant le niveau de lien, sans oublier la transposition de tous les aspects de la vie quotidienne dans des systèmes ludiques impactant le gameplay.


C'est pour cela que je déconseille aussi toute difficulté en dessous de normal, cela perturbant fortement la balance parfaite entre monde virtuel (aka combats) et monde réel (aka sociabilisation et récit) car la difficulté sera aussi présente via cette gestion du temps et les choix cornéliens à faire quant à prioriser une personne à une autre.


Bien entendu, il y aurait bien plus à dire sur ces sujets, mais ne voulant pas faire trop long, j’aimerai aborder le gameplay de manière plus rapproché, car si on a vu plus haut que celui-ci n'est pas nécessairement le cœur du jeu il n’en reste pas moins une part importante, d’autant plus par sa complexité.


Le gameplay prend essentiellement place (mais pas toujours, mais je reste vague volontairement.) dans des donjons, qualifier de palais, qui sont comme on l'a vu plus haut la projection des désirs issus de la psyché des personnes qu'on aura décidé d'infiltrer.


Ceux-ci sont en nombres limités au cours de l'aventure et en étant directement liés au récit, la date d'invasion et butoir pour les compléter restent identiques pour chaque joueur.


Dans ces palais, notre équipe fera face aux ombres qui protègent la personne envahie d'être remodelé, si le but premier dans Persona 5 est d'infiltrer les lieux, les mécaniques d'infiltration restent sommaires et suivant le niveau de difficulté, il reste quand même important de se servir de ses rares moments de combats pour engranger de l'expérience pour chacun de nos personnages.


Les combats se présentent sous la forme d'un tour par tour dynamique, et il est très facile de se perdre dans les mécaniques au départ tant, le nombre de stratégies possibles est important.


Pouvant être capturé à la manière de Pokémon (Persona est arrivé en premier...), chaque Persona adverse possède ses points forts, ses faiblesses, son niveau (améliorable) et ses attaques propres. Tout au long de l'aventure, le jeu nous offrira un nombre prolifique de fonctionnalités pour pouvoir créer, capturer ou améliorer ces Persona. Et ce n'est qu'après des dizaines d'heures de jeu qu'on ne possèdera réellement que toutes les possibilités offertes. Vous êtes le seul protagoniste pouvant changer de Persona comme bon lui semble, suivant les ennemis à affronter, le reste de l'équipe gardera plus ou moins leurs Persona respectives tout au long de l'aventure même si de légères subtilités peuvent être trouvées en renforçant les liens sociaux, il est important de bien choisir parmi son équipe les 3 équipiers qu'on prendra avec nous lors des affrontements, même si là encore il y a des possibilités offertes pour changer suivant vos actions.


Vos équipiers possèdent eux aussi leurs forces et faiblesses et des affinités tant qu'au pouvoir d'utiliser, un schéma proche à un pierre feuille ciseau est mis en place, mais ici avec bien plus variantes, permettant d'enchaîner les attaques avec des bonus en transférant le tour suivant à un coéquipier si la précédente attaque a touché un point sensible de l'ennemi.


C'est aussi pour cela que capturer des Persona ou les combattre est important, vous permettant d'en apprendre plus sur celles-ci et donc de comprendre avec quelle attaque frapper.


Visuellement, les combats sont superbes avec des effets "magiques" ou d'attaques physiques plutôt très cool, avec même au fil de l'aventure et des liens tissés avec nos coéquipiers des finish move animés à tomber par terre tant l'animation est superbe.


Il est bien difficile encore une fois d'aborder chaque point de gameplay, car ici aussi, les possibilités sont bien trop nombreuses et évolutives, qu'il est parfois mieux de ne rien dévoiler et simplement vous dire que le système de combat de Persona 5 reste unique en son genre, tout en utilisant des outils du JRPG tour par tour, ici le dynamisme passe un cap supplémentaire.


Malheureusement j'aimerai aborder aussi un des rares points négatifs du jeu, mais non négligeable, qui n'est autre que le level design des donjons et le système d'infiltration qui à certains moments semble désuet et rappelle que Persona 5 reste un jeu conçu sur PS3 au départ.


Si le premier donjon possède un level design tout à fait intéressant, il semble que Persona 5 s'essouffle assez profondément sur le milieu de l'aventure avec deux ou trois donjons qui deviennent presque de vulgaires couloirs et possédant nombre de puzzles qui sont là pour simplement rallonger la durée de ceux-ci. Tout cela est dommageable, mais c'est malheureusement en lien avec un autre point négatif du jeu qui vient plomber l’ambiance, la longueur de l’aventure elle-même.


Cependant, je comprends le message d’Atlus et c’est un mal nécessaire, mais j'aurai été le premier à souhaiter une œuvre autour des 80 heures plus tôt que 120, il était peut-être difficile, hormis repenser le calendrier dans son entièreté. Forcément comme tout jeu de cette taille, certains contenus en pâtissent, et même d'autres cadors du jeu vidéo souffrent encore de cela, Elden Ring en 2022 est un autre exemple.


Persona 5 demande de prendre son temps et le jeu ne nous le rappelle constamment, mais à trop vouloir s’étaler, j’ai eu des gros coups de mous par moment, le visual novel prenant le pas trop fortement sur la partie gameplay qui est pourtant oh combien incroyable. Tout ceci est d’autant plus frustrant qu’on aimerait par moments vite se retrouver dans un donjon, pour découvrir de nouvelles Persona et combattre sans contrainte de temps. C'est un choix plus qu'une faute d’Atlus, on adhère ou non, dans mon cas, c’était à la limite par moment et j'ai simplement fait des pauses avant de retrouver l'envie de retourner dans le monde instinctivement.


Sinon comment ne pas aborder le style graphique de cet épisode, qui n’est autre qu’un prolongement abouti du quatrième. Que cela passe par le travail sur l'interface utilisateur qui transpire le talent de manière insolente ou même du chara design des personnages principaux comme secondaires, sans oublier le bestiaire iconique, j'ai trouvé sincèrement que Persona 5 frôle le sans-faute et trouve sa voie en créant une identité propre qui marque et surtout ne semble ne pas prendre une ride après déjà plusieurs années bien qu'objectivement, celui-ci reste clairement un jeu de génération 360 et PS3. Je n'ai jamais ressenti quoi que ce soit qui m'a rappelé l'âge du jeu et son "retard" technologique. Bien au contraire la finition du jeu semble exemplaire, tout est fluide et les chargements durent un battement de cils sans oublier que Persona 5 semble totalement exempts de bug.


On pourrait même regretter que les rares cinématiques animées, pourtant concoctées par Production IG, n'aient pas bénéficié d'autant de soin que celles à partir du moteur du jeu.


Devrais-je aussi parler de l'ost du jeu ? Non pas vraiment, celle-ci devrait déjà être dans votre playlist de favoris, sinon réparez cette faute maintenant, mais lisez la conclusion au moins avant de partir.


Il est temps de conclure, je m’étais promis de faire court et c’est encore raté, Persona 5 est bien trop riche pour expédier cela facilement et malgré tout ce qu’on abordé, j’ai le sentiment de louper bien des choses, alors je vous encourage à lire d’autre critiques sur le site ou fouiller sur YouTube qui regorge d’études profondes sur la série.


Au bilan, cela a été une aventure longue, peut être trop, mais enrichissante car étant un superbe exercice de style sur la société japonaise, tout en combinant des concepts philosophiques qui demanderaient bien des centaines de pages à eux seuls et un gameplay abouti sans défauts.


Persona 5 est définitivement une œuvre qui marque par son identité et ses choix tranchés de mêler les genres, provoquant une résonance particulière en moi au vu de ma situation personnelle, comme expliqué en introduction, et par certains égards, je vois ce jeu comme un outil scolaire assez puissant. Et si l’univers créé par Atlus est certainement né dans la tête d’hommes adultes uniquement il n’en est pas moins que le résultat est solide, personnages féminins comme masculins, l'écriture à quelques tics, mais ne sombre pas dans le cliché sans once de réflexion.


Je n’en attendais pas moins des auteurs de Catherine, et je souhaite simplement que pour une suite un équilibre plus sain soit trouvé pour empêcher un étalement trop long de l’aventure qui lui porterait préjudice.


C’est encore un échec et mat d’Atlus, qui laisse une marque dans mon cœur de joueur…


¹ Soft Power


https://fr.wikipedia.org/wiki/Soft_power#:~:text=Le%20soft%20power%20(traduisible%20en,par%20de%20nombreux%20dirigeants%20politiques.


² Lors d’une visite aux USA le président polonais avait offert un exemplaire de The Witcher 2 au président Obama alors en exercice. https://www.businessinsider.com/the-witcher-2015-7

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le 9 janv. 2023

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