A la base pensé comme un nouvel épisode de la franchise, le futur Prince of Persia sensé prendre la relève de la trilogie des Sables du Temps s'est finalement vu devenir une toute nouvelle licence : Assassin's Creed.
Après un premier épisode certes perfectible mais ambitieux, et avant un second ayant dépassé toutes les attentes, Ubisoft Montréal nous ressort pourtant de ses cartons le prince de Perse par l'intermédiaire d'un reboot.
Changement de look, de décor et même de prince, on repart sur de toutes nouvelles bases cette fois-ci. De fait, on retrouve notre nouveau héros égaré dans le désert suite à une tempête de sable, à la recherche de Farah...qui n'est nul autre que son âne ! Sa mésaventure l'amènera à croiser la route (et le destin) d'Elika, jeune princesse d'un royaume perdue; dont le père a tenté de libérer Ahriman, étendant sa Corruption à travers tout le royaume.
Une fois n'est pas coutume, notre bon prince se voit donc amener à lutter contre une malédiction, hors d'un palais cette fois-ci. Mais la première nouveauté qui frappe le joueur, c'est la toute nouvelle direction artistique qui embellit le titre. Bénéficiant du rendu d'un cell shading du plus bel effet, le soft présente un véritable aspect d'artworks animés (tant et si bien que, même plus de 10 ans après, il affiche toujours un très beau rendu, en dépit d'animations faciales datées). Le tout confère une véritable ambiance et embarque le joueur dans un sombre univers qui n'aura de cesse de révéler ses couleurs au fil de l'aventure.
Car en effet, la lourde tâche ici sera de libérer la carte de la présence obscur de la Corruption, symbolisant l'étendue du pouvoir du Dieu Ahriman. Pour cela, chaque Terre Fertile se verra purifier par notre couple de héros afin de restaurer la Lumière. Ainsi, 4 importantes ères composes la carte, chacune composées de 6 zones en leur sein. Toutes étant reliées entre elles, le titre s'écarte de son principe de base pour nous offrir un monde bien plus vaste, qu'on qualifierait quasiment d'open world (aucun temps de chargement ne se voyant imposé d'une zone à l'autre). Chacune de ces zones présente son petit passage de plateforme, de quoi mettre en avant le parkour du prince ayant fait toute sa renommée sur la génération de consoles précédentes. Aussi, de nouveau la course sur les murs est de mise, tout comme les sauts d'une plateforme à l'autre, corniches et autres barres suspendues répondant également présente. Affublé d'un gant semblable à une griffe, le prince pourra l'utiliser pour réfréner sa chute lors d'une descente contre une paroi et atteindre de nouveaux lieux. Le tout s'avère des plus simples et instinctifs, ne demandant jamais plus qu'une combinaison de deux touches pour progresser.
Nouveauté de cet épisode et qui a su faire couler beaucoup d'encre : l'absence pure et simple de game over. En effet, en cas de chute malencontreuse, Elika usera de ses pouvoirs pour rattraper son compagnon et le ramener automatiquement en lieu sûr. Une facilité de gameplay des plus surprenantes qui, si elle anéantit tout aspect de challenge, permet au moins de reprendre l'action sans interruption d'écran de chargement. Tout de même, la progression s'en voit fortement atteinte dans son rythme, puisque l'erreur n'est pour ainsi dire jamais punie. Au final, seules les quelques énigmes (toujours à base de leviers et de mécanismes) pourront éventuellement en ralentir certains, le temps de comprendre le bon principe à suivre.
Chaque zone étant émaillée d'orbes bleus redonnant sa puissance à Elika, ceux-ci pourront tous être récupérés en purifiant les zones (certaines s'avérant un peu plus difficile à atteindre, demandant au joueur d'emprunter le bon chemin en fonction des capacités du héros pour les obtenir). Un certain nombre d'entre eux est requis pour débloquer de nouveaux pouvoirs d'Elika, hélas trop similaires, permettant ainsi d'atteindre de nouvelles zones et progresser dans l'histoire. On regrettera tout de même que récolter tous ces orbes ne soit aucunement récompensé, rendant ainsi complètement caduc la volonté de compléter le titre à 100%.
Au terme de chaque séquence de plateforme, avant purification de la zone, le boss de la région fait son apparition. Reléguant l'action au second plan pour mettre d'avantage en avant l'exploration, Ubisoft le fait également sentir dans le gameplay. Si chaque affrontement jouit d'une petite mise en scène assez séductrice au début, ils s'avèrent hélas vite redondants car limités en possibilités. Les quelques QTE mettant l'action en exergue s'avèrent identiques et bien courts, et la panoplie de mouvements du prince est des plus limitée. Fini les interactions avec le décor et autres acrobaties en tout genre, tout comme le système de combos ayant fait son apparition dans L'Ame du Guerrier et Les Deux Royaumes. Seuls quelques coups d'épée, une choppe grâce au gantelet et le recours aux attaques magiques d'Elika pour compléter la palette de coups est à disposition du joueur. L'absence d'échec possible mentionné précédemment retire également toute tension des affrontements, et on finit par surtout attendre la fin pour passer à autre chose. D'autant plus que chaque boss devant être affronté à cinq reprises avant d'être défait alourdit la formule. Les autres ennemis, apparaissant en quelques rares occasions, peuvent aussi être rapidement occis (voir même éliminés avant leur apparition en agissant assez vite, poussant encore plus loin l'idée des développeurs de reléguer l'action à une importante minorité du jeu).
Sans rechercher le challenge absolu, on ne peut toutefois que rester dubitatif face à cette volonté acharnée d'Ubisoft à édulcorer le gameplay à ce point. Une ambition de rendre la formule plus accessible au grand public d'après le studio, alors même que les trois titres précédents ne se démarquaient pas vraiment par une difficulté très poussée.
Cette progression entre phases de grimpettes assistées et combats poussif s'avère au final assez vite linéaire, en dépit d'une ouverture des zones sensée palier à ce ressenti. Pour rythmer tout cela, on profitera de l'échange verbal entre le prince et Elika, renvoyant dans le style aux petites piques et sous entendus avec Farah dans Les Sables du Temps. Ces quelques lignes de dialogue permettent d'instaurer une petite relation entre les deux, et confère une certaine personnalité au prince, en dépit d'un background laissé volontairement sous silence à plusieurs reprises. A contrario, on regrettera une Elika au final assez lisse dans sa personnalité, ce qui ne rendra pas le duo mémorable aux yeux des joueurs. Si ces dialogues s'avèrent assez sympathiques, leur mise en scène laisse à désirer, ne s'illustrant que par le prince et Elika se faisant face, sans réelle animation. Surprenant quant on constate à l'inverse comme celles-ci ont été détaillées lors du parkour, lorsque le prince tend la main pour aider Elika, ou que celle-ci le rattrapa en plein vol pour prolonger la distance de son saut.
Là ou le titre, en revanche, se distingue de manière très positive, c'est au-niveau de sa bande son. Les différents thèmes s'adaptent parfaitement à la situation et participent à l'atmosphère et rendu global du jeu. De fait, malgré un level design se répétant trop souvent d'un lieu à l'autre et un système de combat famélique, Prince of Persia assure une ambiance ne trahissant aucunement ses origines, et accompagnant ainsi plaisamment le joueur.
Renverser les bases d'une licence pour redéfinir ses codes lorsque ceux-ci ont été bien éculés sera toujours une bonne chose. Avec Prince of Persia, Ubisoft Montréal a semble-t-il eu à cœur de renouveler sa formule et de proposer autre chose. Cela passe ainsi par une direction artistique splendide et un usage plus qu'efficace du cell shading pour conférer une véritable identité visuelle à ce nouvel épisode. Une bande son de grande qualité couplée à un scénario reprenant des airs de conte des Milles et une Nuit participe également à l'originalité de cette nouvelle mouture.
Toutefois, l'obsession à rendre le tout plus accessible en dénaturant complètement tout aspect de challenge et de profondeur de gameplay (notamment au niveau des combats) se retourne finalement contre le titre, le privant d'une réelle dynamique et; fatalement, faisant ressentir une certaine lassitude pour une durée de vie qui ne s'avère pourtant pas bien conséquente (comptez 8 à 10h). La fin, d’ailleurs, s’avère des plus surprenantes et assez frustrante au regard de sa spontanéité dans son dénouement. Peut-être ambitionnait-elle un autre développement dans une hypothétique suite qui ne verra au final jamais le jour. Dommage, le changement de formule et la toute nouvelle proposition artistique s'avérant pourtant des plus prometteurs à première vue.
LES PLUS :
- Direction artistique de très bonne facture
- OST de qualité
- Tentative de changement...
LES MOINS :
- ...plombée par un gameplay trop superficiel
- Combats redondants
- Répétitif pour une durée de vie bien courte