Pyre m'aura plus que surpris et j'en ressors totalement bouleversé.
Avant d'entrer dans le cœur de la critique, laissez-moi vous parler de l'amour que j'ai pour ces créateurs.
Supergiant Games est une compagnie que je suis depuis sa création avec leur premier jeu, Bastion, que j'avais pris à sa sortie il y a neuf ans. Ce jeu m'avait beaucoup impressionné à l'époque, et j'avais même rédigé une critique qui conserve l'amour que je lui portais.
Bastion était un jeu très beau, avec sa qualité graphique et ses musiques envoûtantes qui n'ont jamais quitté ma playlist d'OST.
C'était un action RPG simple à prendre en main mais terriblement efficace. Malgré son passage relativement inaperçu, il nous livrait un scénario intriguant pour ceux qui prenaient le temps de s'y intéresser.
Suite à cela, j'ai suivi toutes les nouvelles concernant leur second jeu, Transistor. Je l'attendais comme le messie, et il m'a de nouveau étonné, cette fois avec une histoire riche et un univers fantastique et mystérieux. Les graphismes et musiques montaient encore d'un cran, ce qui m'avait déjà conquis. Bien que certaines critiques mentionnaient un gameplay difficile à appréhender, j'ai persévéré et malgré les défis, j'en ai retiré une expérience extrêmement positive.
Puis vint l'attente pour leur prochain jeu.
Mes attentes étaient élevées, et j'étais prêt à être exigeant. Quand on produit de la qualité, le public s'attend à ce que cela continue.
La narration dans leurs jeux avait toujours été cryptique, mais elle récompensait les joueurs curieux. C'est dans cet état d'esprit que j'ai entendu parler de Pyre. Et là, douche froide...
Un jeu de sport avec une large composante narrative, sorti exclusivement en anglais, avec un langage soutenu. J'ai détourné les yeux.
J'ai fini par oublier Pyre, jusqu'à ce que j'entende parler de Hades, leur prochaine production. Sans même m'y pencher, cela m'a rappelé Pyre et sa traduction française arrivée dans un DLC gratuit. Alors, sans hésiter, je me suis dit qu'il fallait que je l'essaie, malgré mes réticences initiales. Ils m'avaient convaincu deux fois, alors peut-être réussiraient-ils à me faire adhérer à ce concept étrange.
Adhérer est un mot faible.
Comme je l'ai mentionné au début, cette expérience m'a vraiment bouleversé. On incarne une inconnue, laissée pour morte dans un désert étrange, retrouvée par trois personnages hauts en couleur. Leur apparence initiale, masques et habits cérémoniels, laisse penser à une hostilité. Puis, ils se dévoilent : un humain, une démone et un chien-humanoïde.
Ce triste monde s'ouvre à nous, et nous découvrons notre capacité rare, celle de la lecture, nous valant le titre de "lectrice". Rapidement, nous comprenons que ce monde est un exil pour les criminels et opposants au régime politique en place, et que nous avons un rôle à jouer dans des "rites" qui promettent aux vainqueurs la rédemption.
L'univers de Pyre est à la fois riche et complexe, car Supergiant Games a su corriger ses erreurs passées.
Le jeu propose un lexique interactif pour définir chaque mot clé, facilitant ainsi l'immersion. Cette petite astuce évite l'inconfort de ne pas comprendre un terme lors de la première lecture, un sentiment que beaucoup ont déjà éprouvé avec des romans de science-fiction ou d'heroic fantasy. Grâce à ce système, Pyre invite le joueur à s'intéresser davantage à son univers sans frustration.
Sur le plan narratif, Pyre raconte une magnifique histoire d'amitié, de lutte pour la liberté, et de révolte contre un système oppressif.
Transistor m'avait déjà captivé par son histoire, mais ici, les scénaristes vont encore plus loin, nous livrant une utopie qui s'effondre, pleine de personnages attachants et de choix difficiles. Ce monde m'a fasciné, et chaque décision pour mes compagnons et pour l'avenir du groupe était empreinte de gravité. Je pourrais en dire beaucoup plus, mais révéler davantage serait criminel.
D'un point de vue scénaristique, Pyre mérite un 10/10. Le jeu m'a tellement impliqué émotionnellement que même les personnages qui m'indifféraient au départ ont fini par me toucher, notamment à travers leurs prières et pensées. Les adieux avec certains d'entre eux étaient d'une intensité émotionnelle rare.
Mais parlons maintenant des "rites".
Ces matchs de handball modifiés, en 3 contre 3, sur des terrains tortueux et avec l'usage de pouvoirs, sont étranges mais fascinants. J'étais réticent au début, mais j'ai vite accroché à la simplicité du gameplay en temps réel, avec ses quelques actions et la composante RPG qui enrichit considérablement l'expérience. Le système de progression et d'équipements a rappelé Bastion et ses subtilités.
Au fil des matchs, j'ai été pris par une fougue de supporter, criant de joie à chaque victoire, et me relevant de mes échecs avec une détermination nouvelle. Cela faisait des années qu'un jeu ne m'avait pas procuré de telles sensations. Le gameplay peut sembler simple, mais les adversaires vous surprennent par des stratégies imprévues.
Le jeu vous empêche de vous reposer sur vos lauriers. Même si vous pensez avoir trouvé la meilleure combinaison de personnages, Pyre vous force à jouer avec tout le monde, introduisant la fatigue et la nécessité de se séparer de compagnons.
Bien entendu, l'habillage musical et graphique, d'une qualité exceptionnelle, sublime l'expérience. Les environnements et les personnages sont variés, et certaines musiques, chantées par des voix familières aux fans du studio, sont tout simplement magiques. Le rythme peut sembler lent par moments, mais difficile de ne pas rester ébahi devant la beauté de certains décors.
La chanson finale, qui raconte le destin de vos compagnons, est un moment fort qui couronne une aventure marquée par des choix aux conséquences multiples.
Si je pouvais, je prendrais plaisir à rejouer aux productions de Supergiant Games sur ma Switch. Même après avoir terminé Bastion quatre fois, Transistor deux fois, et Pyre en difficile, je m'y replongerais avec joie.
C'est le jeu que je voudrais oublier pour pouvoir m'y replonger avec le plaisir de la découverte, s'il ne devait n'y en avoir qu'un, se serait vraiment celui-ci!
Cependant, deux points m'empêchent de donner la note maximale.
L'affrontement final, émotionnellement intense, manquait de complexité. J'aurais aimé un combat plus difficile ou inattendu, même si le jeu permet d'ajouter des handicaps pour augmenter le défi. Le second point concerne la quantité de dialogues. Si cela ne m'a pas dérangé pendant l'aventure, à la fin, cela devient excessif. Chaque personnage y passe, et cela ralentit le rythme de manière frustrante.
Malgré cela, le brasier allumé par ce jeu en moi n'est pas prêt de s'éteindre. Je reviendrai avec plaisir pour vivre de nouvelles aventures et faire d'autres choix.
Pyre a été une épopée vers la liberté qui m'a profondément marqué. Ce jeu ne se résume pas en quelques mots, et c'est peut-être là ce qui fait la grandeur des grands jeux. Il vous faut l'essayer pour comprendre, et peut-être que chez vous aussi, ce brasier s'allumera.
Se battre aux côtés de gens qui détestent et finir par au moins avoir du respect pour ces derniers avant des adieux déchirant... Je n'ai jamais vécu quelque chose de scénaristiquement aussi fort dans un jeu.
Faites moi confiance et jouez y!