La simple association du Far-West et de Rockstar faisait déjà sacrément saliver. Vu le passif du studio, nul doute qu'ils allaient davantage chercher l'inspiration du côté du Western Spaghetti, sale et rugueux, plutôt que du côté du cinéma américain, plus propre sur lui et moraliste.
Et c'est exactement ça : le héros est usé, sale, doté d'une morale à géométrie variable (tout en restant crédible), taciturne, sarcastique à l'extrême. Bref Niko Bellic peut aller se rhabiller, on a sans doute ici le héros de jeu Rockstar le plus charismatique depuis Tommy Vercetti. Et ça ça fait méchamment plaisir !
L'ambiance du jeu est tout simplement exceptionnelle, que l'on soit en mode explorateur d'une contrée sauvage au début du jeu ou bien en mode témoin de la disparition d'un univers à la fin du jeu.
Et c'est cette fin de jeu qui donne au jeu toute sa dimension crépusculaire. Car si on perçoit dès le début du jeu des indices annonciateurs de la civilisation (téléphone, pistolets semi-automatiques,...) qui viendra à bout de l'Ouest sauvage, c'est lors du dernier acte du jeu que l’incompatibilité du héros de far-west avec le monde moderne nous frappe le plus. Et les musiques lugubres et très réussies qui accompagneront vos chevauchées à ce moment-là renforceront cette ambiance de fin d'un monde.
Si je devais oser une comparaison, je dirais que c'est un peu l'ambiance qu'on trouve chez Tolkien : c'est un univers dans lequel il est encore possible de vivre des aventures épiques, mais qui n'est plus que l'ombre de ce qu'il a été, et qui est voué à la disparition. Et ce parfum de nostalgie domine Red Dead Redemption tout autant qu'il a pu dominer le Seigneur des Anneaux. On vit des choses formidables, mais on a comme un goût de cendres dans la bouche, car le soleil est couchant et n'a pas vocation à se relever.
Bon et sinon, quid du jeu lui-même ? Ben c'est du GTA pur et dur. Si vous n'aimez pas GTA, passez votre chemin. Si vous aimez GTA, vous aimerez Red Dead Redemption. Il y a bien quelques modification mineures de gameplay (le maniement du cheval en tête), mais rien qui brise la formule qui marche si bien !
Seul petit défaut pénible : la mort. Dans un GTA, lorsqu'on meurt, on a une petite pénalité financière et on "respawn" à l'hopital, sans que la continuité du jeu soit interrompue. Dans RDR, quand on meurt, la dernière sauvegarde est chargée automatiquement, et vous perdez les objets accumulés (et les stats augmentées) depuis cette dernières sauvegarde. En soit c'est pas trop dérangeant, cela incite le joueur à être plus prudent et à sauvegarder régulièrement, mais le jeu ne prévient pas le joueur de ce changement de fonctionnement, et les habitués de GTA risque de ne pas comprendre tout de suite ce qui leur arrive. Moi par exemple, j'avais l'impression que le jeu buguait et faisait des rollbacks, car je me souvenais avoir fait telle ou telle chose qui n'apparaissaient pas dans mes stats.
Quand on parle de jeu en monde ouvert, le monde en question est au moins aussi important pour le ressenti qu'on a du jeu que les missions qu'on y accomplit. Et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il est formidable le monde de RDR. Déjà artistiquement c'est très réussi, des villes fantômes aux déserts bondés de cactus, même si graphiquement jouer sur 360 après avoir fait GTA IV sur PC ça choque un peu. Les routes sont souvent le théâtre de rencontre fortuites, les forêt, déserts et plaines du jeu sont jonchés d'animaux sauvages pacifiques ou belliqueux, bref c'est vivant, ça bouge ! On prend un plaisir fou à parcourir les étendues du jeu, et je ne me suis presque pas servi de la fonction "trajet rapide" de tout le jeu, préférant chevaucher mon fidèle destrier au travers de contrées plus ou moins hospitalières.
La trame principale, si elle n'est pas exceptionnelle (l'épisode mexicain m'a un peu fatigué au bout d'un moment), se laisse suivre jusqu'à sa conclusion extraordinairement maîtrisée.
Seul l'épilogue est un peu maladroit, choisissant la voie du déterminisme social, et éradiquant les efforts de John Marston pour éloigner son fils de cet univers dont il a lui-même voulu s'extraire.
Enfin bref, Red Dead Redemption est un très grand jeu, maîtrisé de bout en bout par un Rockstar plus en forme que sur GTA IV.
18/20