Si la saga Red Dead n’est pas né avec Redemption, c’est par ce jeu que je la découvre et je l’ai davantage abordé comme un GTA au Far West, un raccourci un peu grossier mais c’est comme ça que je le voyais, plutôt que comme un épisode au sein de sa saga. N’étant pas un grand fan de Rockstar mais n’en étant pas un réfractaire non plus, adorant certains grands Westerns sans non plus être un fan inconditionnel du genre, c’est avec curiosité et quelques attentes pas non plus sensationnelles que je me suis lancé dans ce mastodonte critique et commercial de la septième génération de console. Je vous propose d’écouter pendant la lecture Compass, le thème durant lequel j’ai le plus ressenti d’émotion en appréhendant ce qui allait arriver, c’était un pétard mouillé au final mais ce n’est pas grave, la musique reste très belle.
RÉALISATION / ESTHÉTISME : 8 / 10
L’un des plus beaux mondes ouverts de son époque et sans doute très influant sur la popularisation de ces derniers au cours de sa génération, le monde de Red Dead Redemption est effectivement de grande qualité sur le plan technique comme esthétique. C’est d’abord un monde assez vaste sans temps de chargement entre ses grandes régions ou d’extérieur à intérieur, ce qui est un petit exploit technique en soit. C’est aussi un monde diversifié, immersif, vivant et cohérent où j’ai pris plaisir à simplement gambader pour profiter des panoramas qu’il nous offre, les développeurs le savait et l’ont bien mis en avant avec leur train, leurs chariots...
Qui dit monde ouvert dit quelques bugs très communs, ça peut tout de même aller jusqu’à une chaise qui n’a pas de textures pendant une cinématique dans laquelle le personnage aura l’air de faire léviter son arrière-train, c’est un bug plus amusant que gênant soyons honnêtes et ce n’est pas assez fréquent pour constituer un réel défaut. Par contre, le monde ouvert s’accompagne de défauts plus gênants : d’un 30 FPS constant sur XBOX 360 qui chute de temps en temps à 25 FPS sur PS3 et d’une distance d’affichage nette assez forte mais pas extra-ordinaire avec la végétation qui pousse d’un coup sans arrêt dès qu’on file à vive allure.
C’est là que la version supérieure sur PC manque à l’appel et c’est assez dommage, je sais bien que Rockstar n’était pas trop à l’aise sur le sujet à l’époque avec le fameux portage de GTA IV mais ça reste dommage qu’ils aient fait l’impasse là-dessus. C’est vraiment un jeu qui gagnerait à ressortir dans de meilleures conditions pour profiter pleinement de ses forces esthétiques sans être gênées par ses petites carences techniques, pourtant pas si grandes que ça vu l’époque et le support d’où la sous-note qui n’en souffre pas plus que ça.
À côté de ça, la physique du jeu est assez poussée, si je tire sur une bouteille elle va se briser, sur un château d’eau un petit écoulement se verra au lieu de l’impact, sur un carton il sera propulsée de façon cohérente... et ce soucis du détail dans le moteur de jeu est assez bien utilisé dans les mécaniques de jeu avec bien sûr le fameux lasso comme arme non létale ou l’animation des personnages selon la localisation des dégâts, très réussi avec un intérêt ludique réel et de bons feed-back. Plein de jeux des années 2010, Red Dead Redemption étant sorti en 2010, sont bien moins ambitieux sur ces points qu’ils jugent plus secondaires.
Les musiques sont souvent très discrètes, reprenant régulièrement des airs emblématiques d’OST classiques de western pour une ambiance très réussie. En revanche, je la trouve presque trop discrète à certains moments où elles pourraient accentuer l’intensité de passages qui devraient être très entraînants mais qui n’y arrivent pas toujours sur moi et je pense que c’est dû à ce retrait de la musique que je trouve un peu trop prononcé, elle sait se faire efficace et marquante à certains moments tout de même mais c’est peut-être 3 ou 4 fois en 30 heures de jeu et plus vers la fin. Sinon, le bilan technique et esthétique est très positif pour moi et c’est même là que j’ai été le plus satisfait, comme souvent chez Rockstar.
GAMEPLAY / CONTENU : 7 / 10
Une partie centrale du gameplay c’est le maniement au flingue et le sang froid, qui est donc un bullet-time, il compense merveilleusement bien la visée rigide à la manette, en combinaison de la visée assistée, qui ne marche qu’à condition de déjà viser près de la cible et qui fixe le torse plutôt que la tête, les fusillades sont un petit peu faciles mais assez plaisantes à jouer. Par contre, l’IA aurait pu être un peu mieux, là soit ils nous ont repéré et savent tout de suite où on est précisément, soit ils sont passifs, ils adoptent un comportement assez basique et prévisible tout du long... c’est ce qui limite le plus l’intérêt de ces séquences.
Une autre partie importante c’est le maniement à cheval et en chariot, qui remplace donc la traditionnelle conduite de voiture, et c’est ici très facile à prendre en main, sans grande subtilité mais c’est parfaitement efficace et ce n’est pas un mal une seconde. Ça ne me choque pas qu’on puisse faire téléporter son cheval facilement et en changer encore plus facilement que de chemise. Vu la place qu’il occupe, s’il était réticent à obéir aux ordres au début de son dressage par exemple ça serait plus gonflant qu’autre chose vu que le jeu se prête beaucoup au plaisir immédiat et non au challenge permanent gratifiant à l’arrivée.
Tir et cheval sont clairement les deux mécaniques les plus utilisées par le jeu qui peine un peu par ailleurs à renouveler ses situations de jeu avec efficacité dans la quête principale mais ce n’est pas tant un défaut que ça vu que ce qui est répété est réussi et amusant. Ça manque de challenge et de variété pour être excellent mais ça fait tout de même l’affaire. Plus réussis ce sont les objectifs secondaires pour débloquer les tenues qui incitent à découvrir chaque nouvel possibilité de jeu au fur et à mesure.
Par conséquent, quêtes principales, secondaires et tertiaires s’imbriquent assez bien avec le monde ouvert en terme de cohérence ludique, pas forcément en terme de courbe de difficulté par contre. Les mini-jeux sont ce qu’il y a de plus foireux à mon sens, eux qui sont censés apporter la diversité que je trouve un peu faible. La moitié sont moyens ou juste un copier-coller d’un jeu déjà existant, l’autre complètement nuls et exagérément frustrants en ce qui me concerne même si je sais que beaucoup ont été convaincu sur ce point, ce n’est pas mon cas.
Ce n’est pas bien grave puisqu’ils sont facultatifs si on ne compte pas finir le jeu à 100 % mais ça reste un peu une petite aberration que mes moments les plus rageants et difficiles ça n’a jamais été ailleurs que dans un mini-jeu qu’ils ont eu lieu. Mention spéciale au dernier niveau du jeu du couteau qui n’a visiblement été testé par personne d’humain dans l’équipe de développement, autrement ils auraient tout de suite vu qu’il y avait un petit problème de compatibilité entre les capacités humaines et ce qui est demandé.
Les très rares phases de plate-forme lors de la chasse au trésor, facultative, sont également bien nazes mais là on est encore sur quelque-chose d’annexe et qui en plus occupe finalement très peu de temps de jeu. Pour finir, il y a bien quelques petites fautes d’ergonomie mineures comme la vente par unité quand on en a 30 à refiler, devoir constamment fouiller le cadavre pour en récolter l’argent et non simplement passer dessus, ne pas voir clairement quel est le problème quand le jeu refuse qu’on installe un campement... mais là c’est pas grand chose, globalement le gameplay tient la route et le contenu est très honnête pour le genre, ce qui n’est peut-être pas mon avis pour la partie scénaristique du jeu.
SCENARIO / NARRATION : 6 / 10
Au début, j’ai eu l’impression d’incarner un loser sans intérêt, comme le dit Bonnie « vous êtes énigmatique pour cacher le fait que vous n’avez pas de personnalité. » Sa personnalité se développe par la suite, le bon gars qui se fait passer pour un dur à cuire, avec un certain sens de la répartie. La quête principale lui confie cependant des relents de moralisateur hypocrite, d’imbécile naïf... bon il l’assume de temps en temps, quand on lui demande s’il est honnête ou juste stupide il répond qu’il est les deux, ça n’en fait pas un protagoniste charismatique pour autant à mes yeux et là encore je sais très bien que je suis à contre-courant sur la question.
Pour être un peu plus positif, le ton est toujours aussi caricatural que dans un GTA avec un fond critique par moment assez plaisant à mon sens sur l’hypocrisie de la politique, le fanatisme religieux, le sexisme banalisé, l’appât du gain... La fin est assez audacieuse même si elle n’est pas très bien amenée mais en tant que telle, elle est plutôt réussie et marche bien. Les références aux grands classiques des Westerns sont très nombreuses et amenées par différents moyens, ce qui est très plaisant dans un jeu qui axe autant la communication sur son univers.
Il y a aussi quelques personnages féminins assez forts, ce qui est notable chez Rockstar qui peut être assez nul là-dessus. Ils restent fidèles à eux-mêmes en mettant aussi des cruches comme c’est pas permis qui ne se définissent que par leur crédulité, leur sentimentalisme, leur talent ménagère et j’en passe mais on retrouve cette caricature aussi chez les mecs et toutes les filles ne sont pas logées à la même enseigne donc ça passe. Absolument rien d’aussi aberrant que dans un GTA V par exemple.
Par contre, le monde ouvert façon Rockstar ne s’accorde toujours pas avec des quêtes annexes parfaitement intégrées, 2 heures de jeu m’ont suffi pour m’en rendre compte. Je dois demander un renseignement à un PNJ, celui me le donne contre 5 $, me disant qu’il s’est foutu de ma gueule je lui en colle une (sans le tuer), je poursuis la quête et non en fait elle est considérée comme échouée parce que je suis un peu sorti des clous 2 petites secondes et je ne pourrais jamais la finir, en débloquer le trophée... alors que j’ai l’information, le PNJ n’a plus aucun rôle à jouer dans la quête mais je l’ai tapé donc la quête est échouée. Bien sûr que c’est énervant de le constater, soit on est en mode libre sans se soucier de rien, soit on suit la quête, mais on ne peut pas faire les deux.
Maintenant, vous me direz qu’il suffit de faire uniquement ce que le jeu nous propose et ça passe on est bien d’accord, donc ce n’est pas grave. Sauf quand ce qui est imposé est l’inverse de ce qu’on veut et ça m’est arrivé au Mexique où le jeu m’a forcé pour accomplir une quête principale à tuer des hommes que je ne voulais pas tuer, ce qui m’a été très désagréable. Soit tu fais une quête linéaire et tu l’assumes tout du long en veillant à ce que le joueur affronte un ennemi diabolisé ou tu maîtrise superbement bien ta narration à la manière de Spec Ops the Line, soit tu laisse le joueur libre de choisir en jeu libre comme dans les quêtes son orientation morale. Tu ne fais pas un mélange des deux parce que t’encours ce risque de ne pas avoir la liberté de choisir au moment où tu le veux, un problème récurrent chez Rockstar mais qui n’en est pas moins un problème.
CONCLUSION : 7 / 10
Un monde ouvert magnifiquement réussi, un gameplay qui fait l’affaire dans un contenu d’une trentaine d’heures appréciable mais un scénario et une narration trop perfectible sur bien des aspects importants pour moi, Red Dead Redemption est un jeu Rockstar avec ce que j’aime y retrouver, un avis globalement positif, mais pas la claque monumentale décrite par certains à cause de reproches personnels habituels. Je suis tout de même intéressé par sa suite mais dans une moindre mesure que le reste du monde et j’ai bien l’impression qu’il en sera toujours ainsi pour un jeu Rockstar en ce qui me concerne.