Eh bien voici un jeu particulièrement compliqué à noter...
Pas étonnant qu'il écope ici de 2/10 comme de 10/10 : objectivement, Red Dead Redemption 2 mérite effectivement ces deux types de notes paradoxales.
Je vais essayer d'expliquer pourquoi je lui ai tout d’abord attribué un 4 au bout d'une dizaine d'heures de jeu, puis un 6 vers ma 40e heure à y glandouiller, et finalement ce 8 après ma longue balade de 95h, qui m'a finalement menée à terminer l'intrigue principale et la majorité de ses quêtes secondaires.
Tout d’abord voici ce qui (à mon sens) fait que RDR2 mérite carrément les notes "sanction" qu'il récolte à très juste titre :
Primo, le lancement de ce jeu a été absolument catastrophique (je précise que je parle ici de la version PC).
Déjà, il y a eu cette histoire d'acheteurs du jeu débités plusieurs fois par le magasin de Rockstar, suivie de grosses difficultés à se faire rembourser le trop-perçu. (Avec des tarifs entre 70 et 100 balles selon l’édition, c'est le genre de blague qui fait très mal).
( https://www.youtube.com/watch?v=9M0sMec74xE1 )
Secundo, il y a cette obligation détestable de passer par le "social Club", le launcher absolument POURRI de Rockstar, qui complique inutilement les choses à tout le monde sans RIEN apporter au joueur. La comédie rien que pour pouvoir récupérer les screenshoots pris en jeu (limités à 200 au passage) est juste aberrante : ces fichiers (une fois retrouvés dans le dédale des dossiers) nécessitent d'être renommés, puis d'en changer deux fois l'extension pour espérer être visionnables normalement sans passer par cet étron de social club. Oser imposer ce pourriciel au consommateur, c'est tout simplement MINABLE de la part de l'éditeur.
(Pour ceux qui voudraient récupérer leurs tofs, voici la marche à suivre : https://www.youtube.com/watch?v=UcE-duTOtpo )
Ensuite, il y a le lancement à part entière : je fait partie des joueurs avec une config très supérieure aux prérequis, mais que le jeu a pourtant considéré comme problématique. (GPU Nvidia + CPU au nombre de cœurs inhabituel), puisque Rockstar - développeurs de jeux consoles typique - n'est pas FOUTU sur PC d'utiliser 100% des ressources de la carte graphique (utilisée entre 60 et 80%max chez moi), et préfère tabasser à mort le processeur mis à genoux en permanence à 100% d'utilisation.
Cela occasionnait donc de très graves problèmes de perfs sur d'excellentes configs (des freezes successifs de plusieurs secondes, si bien qu'on jouait parfois littéralement en mode diaporama), mais aussi des crashs très fréquents.
Or après un an de prétendu "peaufinage" du portage PC, l'état du jeu à sa sortie et les semaines qui ont suivi était tout simplement inacceptable. (Je n'ai personnellement pu commencer à y jouer sans trop crasher qu'au bout de deux semaines après l'avoir acheté pour vous faire une idée).
À l'heure où j'écris ces lignes, les soucis de performances sont loin d'être tous réglés, malgré divers patchs correctifs de Rockstar ET des mises à jours Nvidia créées spécialement pour le "cas" RDR2 (!!!)
Pour un jeu triple A vendu à ce tarif par un éditeur au melon si surdimensionné qu'il s'autorise le caprice d'imposer son propre launcher inapte, c'est non seulement scandaleux mais même malhonnête d'avoir osé vendre et sortir le produit avec des failles techniques pareilles. (...Et en toute connaissance de cause, puisqu'une structure de l'ampleur de Rockstar se doit forcément de TESTER ce qu'il balance sur le marché - chose confirmée par les nombreuses pages entières de noms de testeurs crédités au générique de fin).
Devant l'incapacité totale de Rockstar à patcher ce code complètement pété, j'ai personnellement contourné le problème en capant le jeu à 30FPS au lieu de 60, (c'est à dire m'auto-infliger des limitations de console alors que je joue à une version PC), ce qui permet de réduire considérablement la consommation de ressources sans trop limiter la qualité graphique. Pour ça, j'ai utilisé un logiciel "RivaTuner" couplé à "MSI Afterburner", que je suis obligée de lancer à chaque fois que je démarre RDR2. Or même avec ça, le framerate se casse encore un peu la gueule à St Denis (la plus grande ville du jeu), dans certaines conditions météo "gourmandes".
Ensuite, il y a ce gameplay extrêmement daté : Red Dead Redemption 2, c'est un jeu avec des graphs de 2020, et un gameplay de 2010.
Même si on finit par s'y faire, la désagréable inertie dans les déplacements surprend pas mal au début.
Si elles constituent un petit défouloir raisonnablement divertissant, les fusillades scriptées sont loin d'êtres passionnantes, du fait que le jeu est un jeu "console" à la base (c'est à dire pensé pour le pad et la visée automatique, si bien qu'on finit par les préférer au clavier/souris, ne fut-ce que pour les innombrables déplacements à cheval). Mais c'est certain que quand on joue sur PC, on développe vite d'autres exigences en terme de gunfights - surtout en 2020.
Idem pour l'infiltration carrément médiocre, ou le système de combat à mains nue si primitif qu'il rend vite pénible les combats qui s'éternisent trop.
(notamment l'interminable baston avec Micah vers la fin...)
Et globalement, c'est toute l'ergonomie du jeu qui est discutable. Que ce soient les menus parfois mal foutus ou les assignations de touches / boutons incompréhensibles... (Pourquoi dédier un bouton de la manette à la fonction "vue cinématique" 100% inutile et impraticable alors qu'il faut 2 à 3 appuis de touche pour accéder au mode photo du jeu? Un patch a voulu "corriger" ce détail, et permet désormais d’appeler le mode photo ... mais à la place de la map dont on se sert en permanence : franchement Rockstar, vous êtes des as.
En fait, RDR se résume à une série de mini jeux qui ne se différencient souvent que par leur scénarisation généralement impeccable. Pourtant, j'aurai également des reproches à faire sur l'aspect narratif :
Le scénario de RDR2 s'est avéré très frustrant sur quasiment toute sa première moitié, tant la trame principale oblige souvent le héro à faire des choses qu'en tant que joueuse je ne souhaitais absolument PAS faire.
Rien n'est plus agaçant que de DEVOIR foncer tête baissée dans ce qu'on SAIT être un piège, d'aider quelqu'un qu'on déteste viscéralement, de commettre des actions qui vont à l'exacte encontre de ce qu'on voudrait faire, juste parce que le script du scénario a déjà tout décidé à notre place sans qu'on ait son mot à dire.
Et à une époque où les histoires à choix et embranchements multiples sont presque devenues la norme, cette construction un peu archaïque est particulièrement étrange, notamment parce que RDR2 intègre justement un système d'honneur (pour résumer, mieux on se conduit, plus on en a, alors que si on se comporte comme un pourri, on en perd, avec un système de bonus/malus à la clé).
Bien que vos choix soient relativement libres, ils redeviennent immédiatement scriptés à l'extrême dès qu'on s’atèle à la trame principale. Si bien que le joueur se retrouve trop souvent contraint d'être une ordure lors de certaines missions, alors qu'il cherche au contraire à être le plus "juste" et "bon" possible le reste du temps.
Or autant l'écriture est habile est ciselée la plupart du temps, autant cet aspect là est amené très maladroitement je trouve, puisque si on ne suit pas la trajectoire décidée par le scénario (
ordure au départ, et se racheter une conduite vers la fin
), on s'expose à incarner un personnage complètement contradictoire et illogique dans ses successions d'actions. Et dans ce jeu grandement porté par son aspect immersif et "réaliste", je trouve que ce genre de chose fait vraiment tache.
Pour toutes ces raisons, je comprends parfaitement la déception des joueurs qui attendaient précisément un bon "jeu". Et pour ce qui est justement du gameplay à proprement parler, j'estime que les mécaniques à peine passables de Red Dead Redmeption 2 en font un petit défouloir correct, mais vraiment loin d'être inoubliable, et c'est forcément décevant pour un produit présenté partout comme le "jeu de l'année".
En revanche, ce titre est extrêmement brillant sur beaucoup d'autres aspects, qui relèvent plus de la sa démesure hallucinante à bien des niveaux, de ses dialogues irréprochables, de ses personnages parfois charismatiques, mais surtout de son immense carte absolument splendide et grouillante de vie.
L'immersion est totale, et rien que chevaucher sans but précis à travers ces grandes étendues sauvages m'a souvent concédé des petites pépites de pure jouissance, tant l'atmosphérique globale est maîtrisée. Ce décorum quasi parfait et particulièrement crédible titille en permanence l'empathie et la sensibilité profonde du joueur avec un indéniable talent, tant il est rempli de choses, de gens, d'animaux, d'activités futiles, et de petits détails qui font toute la différence grâce à une mise en scène inattaquable : on s'y croit, on y est, on "ressent" les choses différemment.
Notamment la mort. Dans les derniers instants du jeu, lorsqu' Arthur à bout de forces part dans ce baroud d'honneur qu'on sent être le dernier, le jeu prend une intensité très particulière... le joueur se retrouve confronté à l'idée et la sensation de son proche trépas, et j'ai personnellement eu la gorge serrée durant toute cette mission, face à l'étrange sensation de sentir lentement venir mon ineluctable fin.
Sur ma centaine d'heures de jeu, j'en ai au moins passé la moitié à pêcher, à observer les animaux et éventuellement en chasser certains (bien que je déteste pourtant la chasse IRL), à jouer au Poker, aux dominos, au black Jack pour des clopinettes, à chevaucher sans but dans les décors pour écouter les chants d'oiseaux, voir la lumière rasante du soleil couchant, l'épaisse brume fantomatique de l'aube, essuyer des averses apocalyptiques, déambuler au clair de lune dans les bois, ou juste vagabonder d'un saloon à l'autre - juste parce que ça me détendait, et que j'y prenais un réel plaisir.
Bref...
Je conçois parfaitement qu'on lui foute 2/10 vu le contexte pitoyable de sa sortie calamiteuse, et sa ribambelle d'évidents défauts tant sur le plan technique que de ses divers systèmes de jeu archaïques, son ergonomie globale un tantinet foireuse, et surtout son éditeur bien trop capricieux et sûr de lui, alors qu'il se fout carrément du monde comme en témoigne ce lancement PC particulièrement scandaleux qui mérite clairement d'être sanctionné.
Je conçois aussi parfaitement qu'on lui foute 10/10 vu l'expérience viscérale qu'offre sa flopée d'indéniables qualités, tant sur le plan esthétique que de l'écriture / doublages, ou encore la richesse hallucinante de son open-world impeccablement maîtrisé, ou même de son scénario aux personnages parfois hyper attachants...
Pour finalement résumer mon sentiment personnel, c'est une expérience qui bizarrement s'avère nettement plus satisfaisante sur le plan passif que sur le plan actif, et qui a davantage parlé à ma sensibilité qu'il ne s'est avéré "ludique" à mes yeux.
Pour moi, RDR2 tient davantage de l'excellent film interactif. Son gameplay très paresseux se révèle heureusement suffisamment fun pour qu'on finisse par lui pardonner, et cela permet éventuellement dans un second temps de tomber sous le charme hypnotisant de ses attraits les plus séduisants. (Ce qui explique probablement les retours dithyrambiques qu'il provoque finalement chez la majorité - que je finis moi-même par rejoindre dans ma note, bien que l'attitude générale de Rockstar m'ait ici tout particulièrement déçue).