Même pour un studio plein de ressources comme Capcom, se lancer dans le remake de l’un de ses plus grand succès est un exercice difficile. En 1998, Resident Evil 2 est le jeu qui a popularisé le survival-horror et a assit la notoriété de la série. Il était donc évident que les attentes des fans seraient énorme.
Pour ma part, bien qu’ayant découvert la série très jeune avec le premier épisode, c’est sur le second que, ayant vaincu ma peur, j’ai pu boucler ma première partie en solo. Resident Evil 2 a donc une place très spéciale pour moi. C’est un jeu que j’ai terminé un (trop) grand nombre de fois, et que je refais encore régulièrement, si bien que j’en connais chaque recoin, chaque secret.
Je le garde toujours très haut dans mon Top 10, non pas que je le considère forcément comme le meilleur de la série, mais parce qu’il a, dès l’enfance, façonné mes goûts d’une manière considérable. Si me suivez un peu sur le site, vous savez sans doute que je suis un adepte des jeux d’horreur. En voici donc la raison.
Quand le projet de remake fut annoncé en 2015, comme beaucoup, je restais perplexe. Il faut dire que depuis la déception de RE5 et les années d’errance qui suivirent, les fans étaient en droit de douter de la capacité de l’équipe R&D1 de Capcom à réussir leur coup.
Cependant, la firme d’Osaka n’en était pas à son premier essai en la matière. En 2002, le remake du premier Resident Evil de 1996 sortait sur Gamecube, et ce fut une véritable claque. Plus long, plus complexe, plus beau, plus immersif… Il réussit à sublimer chaque aspect de l’original, sans jamais le trahir. Il reste pour moi le meilleur épisode de toute la série, l’aboutissement de la formule originale. Entre-temps également, la sortie de Resident Evil 7, qui a su ramener la série vers le jeu d’horreur, laissait présager de bonnes choses.
Comment remettre au goût du jour un jeu qui a presque 20 ans ?
Il est évident que plus le jeu est ancien, et plus l’exercice devient délicat. Là où seulement 5 ans séparaient le premier Resident Evil de son remake, ce qui avait permit à Capcom de conserver le même gameplay en plus peaufiné, il était inconcevable de ramener les "tanks controls" en 2019. Même choses pour les caméras fixes et décors précalculés, pourtant si emblématiques de la série, qui appartiennent définitivement au passé. Dès lors, changer ces éléments impliquait donc de ré-imaginer Resident Evil 2 dans son entièreté. Et pour ce faire, réussir à inventer une nouvelle formule qui permettrait un savant équilibre entre héritage et modernité. Tout l’enjeu étant d’ouvrir le jeu à un nouveau public, ce qui oblige à le mettre au niveau des standards actuels, notamment en matière de "quality of life", tout en prenant garde à ne pas le dénaturer et décevoir les fans.
La seule bonne décision possible était d'opérer un vrai retour vers l'horreur. Après les épisodes 5 et 6 qui s'étaient beaucoup trop rapprochés d'un style action-aventure pour tenter de plaire à un public occidental, Capcom se devait d'écouter enfin les joueurs.
Pour le gameplay, le choix fut fait de reprendre la formule "caméra à l'épaule" introduite depuis Resident Evil 4, mais réadaptée pour que les mouvements soient un peu plus limités, afin de garantir une certaine fragilité du personnage nécessaire à la réussite d'un survival-horror, tout en prenant bien soin que les déplacements et la visée restent fluide et agréable afin de respecter les standards actuels. A mon avis, ce pari est largement réussi.
Parmi les autres points de gameplay, on retrouve la possibilité d'équiper des armes de défenses (couteau, grenades, etc.) pour se prémunir des attaques ennemis, une mécanique qui fut introduite dans Resident Evil Remake. Les poudres à canon à mélanger pour créer ses munitions, issues de Resident Evil 3, sont également de la partie. Comme souvent chez Capcom, on se contente ici de faire du neuf avec du vieux, mais au moins ce sont des mécaniques qui ont déjà fait leurs preuves.
Dans la grande tradition des survival-horror, la gestion des ressources (soins, munitions), l'inventaire étriqué, les objets à dénicher, les énigmes, presque tout ce qui faisait la particularité des premiers épisodes fait son grand retour. La progression est toujours rythmée par une exploration minutieuse des lieux et la recherche d'objets. Pour avancer il faut donc soit déverrouiller des portes, soit résoudre des énigmes. Capcom pousse même le fétichisme des clés et des objets encore plus loin en montrant une vue détaillé de chaque porte fermée ou élément d'interaction, accompagné d'une petite animation satisfaisante en guise de récompense lorsque l'on déverrouille la serrure ou utilise le bon objet. C'est un détail, mais qui prouve une certaine compréhension de l’identité de la série.
On a donc bel et bien un jeu à l'ancienne. En revanche c'est sur d'autres aspects qu'il était nécessaire d’effectuer un dépoussiérage et d'expérimenter de nouvelles possibilités. Les monstres ont toujours eu une place très importante dans la saga, ils en sont même en quelque sorte l'emblème.
Ce sont les zombies qui sont ici remit au goût du jour. Il faut dire que, bien qu'ils ne soient pas les seules créatures de la série, qui possède un bestiaire très varié, ils n'en restent pas moins l’ennemi le plus commun. Si comme beaucoup de vétérans, vous vous étiez habitué à descendre ces cadavres ambulants en quelques balles de flingue, pour économiser de précieuses ressources, vous allez vite déchanter. En effet, les zombies retrouvent enfin leur place sur le devant de la scène et deviennent des adversaires redoutable. Bien que toujours aussi lent, ils sont de véritables éponges à balles et se relèveront inlassablement sauf en cas de destruction du cerveau. Surtout qu'ils peuvent désormais se déplacer plus librement et pourchasser le joueur à travers les salles en défonçant les portes, vouloir se débarrasser de chacun d'entre eux, histoire d'avoir la paix, devient alors un cruel dilemme à cause des munitions en quantité limitées. La localisation des dégâts est assez jouissive, surtout grâce aux membres qui s'arrachent qui sont plus qu'un simple détail gore. Tirer dans la tête est presque inefficace dans ce remake, et il est souvent plus intéressant d'estropier les zombies pour les ralentir. Il est toujours possible de les contourner, mais lorsqu'ils apparaissent en petit groupe, se retrouver encerclé est souvent synonyme d'une mort douloureuse. Chaque rencontre, chaque affrontement devient alors un calcul mental, un compromis à faire entre gaspiller ses balles pour rester en sécurité ou prendre le risque de se faire bouffer en se forçant un passage. La limite de ce concept intervient à cause du nombre de balles requises qui semble être aléatoire suivant les zombies. Parfois une ou deux balles dans la tête suffisent pour les faire tomber, parfois ils en faudra cinq ou plus… ce qui peut générer quelque frustration pour un joueur en manque de munitions. Et avec le backtracking propre au genre, laisser trop de monstres en vie peut s'avérer fatal pour plus tard.
Les horribles lickers, monstres introduit dans RE2, font également leur retour. Plutôt que d'être uniquement des ennemis plus rapides et dangereux comme autrefois, les développeurs ont astucieusement joué sur leur cécité pour en faire des créatures qui ne réagissent qu'aux sons. Plus rares que dans le jeu d'origine, ils sont cependant bien flippants et ont vraiment leur mécanique de gameplay propre. Un bon choix, même s'ils restent un peu sous-utilisés à mon goût.
Les boss, quant à eux, ont subit une refonte totale de leur game-design et sont désormais dans le style de Resident Evil 4, avec des points faible apparents qu'il faut viser. Certains sont réussis comme William G-1 et G-3, grâce notamment à de bonnes arènes de combat qui permettent d'élaborer des stratégies. Les autres auraient mérité plus de travail pour éviter cet aspect brouillon qui apparaît surtout à cause de zones trop étriquées. Le manque d'éléments visuels ou sonores qui indiqueraient que les attaques sont vraiment efficaces rendent parfois les affrontements confus. Inflige-t-on des dégâts durant cette animation ? Les dommages sont-ils réduit sur les autres parties du corps ou est-il obligatoire de tirer sur le point faible pour en infliger (qui en général scintille en orange, subtil) ? On a parfois plus l'impression d'essayer de deviner comment fonctionnent les scripts et la logique des développeurs qu'autre chose, ce qui donne à ces boss un caractère un peu artificiel et parfois injuste. Ils restent tout de même une nette amélioration en comparaison de ceux du RE2 d'origine qui faisaient plutôt office de test de fin de niveau, pour voir si le joueur avait réussit à conserver suffisamment de munitions et de soins. La logique est donc un peu différente ici, vu que des ressources sont disponibles dans l'arène des boss pour aider les joueur qui seraient dans la dèche.
Grâce à ces améliorations, et surtout celles apportées aux zombies, on se rapproche du cœur même de ce que doit être un survival-horror. Un jeu où chaque instant peut être fatal, où il faut prendre des décisions sur le moment, s'adapter. Cette formule est en général à son paroxysme lors de la première partie découverte, lorsque le joueur est encore vierge de toutes connaissances et doit faire face à l'inconnue… pour survivre.
L'ennui avec un remake c'est qu'on doit toute de même réutiliser le matériau de base. Mais si le joueur vétéran entre directement en terrain connu, les mécaniques du survival-horror cessent de fonctionner. Pour palier à ce problème, Capcom à du opérer une refonte totale du level-design. Toute la difficulté repose ici sur comment réimaginer les lieux emblématiques sans les dénaturer, tout en proposant assez de nouveautés pour que les habitués perdent leurs repèrent. C'est ainsi que le Raccoon Polide Department (RPD), le commissariat de la ville, qui constitue la première moitié du jeu, a été remit au goût du jour. Ce que l'on constate c'est davantage d'interconnexion entre les différentes sections, et une progression légèrement différente. Avec des obstacles placés à de nouveaux endroits, des chemins alternatifs, des salles modifiées, des couloirs qui s'étendent autrement, et un troisième étage inédit, cette refonte est une réussite.
Surtout que visuellement, Capcom s'est évertué à moderniser les lieux, à les rendre plus crédibles pour coller à la nouvelle direction artistique du jeu, mais nous y reviendront plus tard.
Le level-design est une composante essentielle d'un Resident Evil, et on reconnaît ici l'une des signatures de la série, qui s'articule en deux étapes.
La première partie consiste en la découverte des lieux, où l'on explore la majeure partie du bâtiment et s'approprie peu à peu l'espace. Subsistent alors quelques salles encore inaccessibles, qui nous forcent à partir en quête de nouvelles clés ou objets dans un nouvel environnement (ici, les sous-sols).
La seconde partie, une fois ces objets en poche, oblige le joueur à retourner en arrière pour visiter les endroits restants. Elle se voit toujours accompagné par l'introduction d'un nouvel élément dangereux qui vient bousculer les habitudes fraîchement acquises et va obliger le joueur à utiliser ses connaissances des lieux pour survivre. Dans le premier RE il s'agissait de l’apparition des Hunters, ces créatures mi-humaine mi-reptiles redoutables. Pour ce remake, les game-designers ont eu une idée différente.
Le Tyran, ce colosse humanoïde habillé d'un grand imper noir, et parfois appelé Mr. X par les fans (bien que ce nom ne soit jamais cité dans aucun des jeux), devient désormais le grand élément perturbateur de cette seconde partie. Là où dans le jeu original il se contentait de faire quelques apparitions scriptés (mais marquantes) à certains moments clé, le potentiel de cet ennemi emblématique est maintenant porté à un tout autre niveau. A partir du moment de son entrée en scène il est en capacité de poursuivre le joueur dans l'ensemble du poste de police. Quasi insensible aux armes, il ne peut pas être abattu, juste stoppé temporairement au prix d'un trop grand nombres balles. Forcé à jouer au chat et à la souris face à cet adversaire implacable, le joueur n'a d'autre choix de s'essayer de le semer dans les dédales du RPD tout en continuant tant bien que mal la fouille des dernières salles inexplorées. Même en réussissant à se dérober de sa vue, le salopard continue inlassablement de tourner en rond dans tout le bâtiment. Jamais le bruit lourd d'une paire de bottes n'aura été si terrifiant.
Le Tyran en lui-même, de part sa lenteur, n'est pas une si grande menace si l'on reste aux aguets. Le vrai défi consiste à faire face aux ennemis restants dans le commissariat tout en ayant à gérer la pression supplémentaire qu’exerce un géant de plus de 2m de haut constamment à notre recherche. Autant le dire, le combo "licker + Tyran" se termine souvent par un écran de Game Over. Et les limites de cette idée se font ressentir lorsque le grand gaillard rebrousse subitement chemin face à l'embrasure de porte d'une salle de sauvegarde, qu'il ne peut pénétrer pour des raisons d'équilibrage, ce qui casse un peu l'immersion…
C'est vraiment là que le nouveau level-design prend tout son sens. L'interconnexion n'était pas qu'un gimmick de Metroidvania, mais une vraie nécessité pour que cette phase du jeu puisse fonctionner. Les développeurs prouvent qu'ils avaient de vrais idées à proposer pour ce remake, même si leur intégration reste encore faillible.
Sauf que le jeu ne s'arrête pas au RPD, et la suite s'avère être quelque peu… en demi-teinte. Disons qu'après une première moitié aussi fraîche et inventive, il était normal d'espérer que le jeu monte encore en puissance pour se finir en apothéose.
Les sections qui permettent de contrôler l'un des personnages secondaires (Sherry ou Ada) utilisent des mécaniques issues d'autres jeux hors de la licence. Mais que ce soit le mini-jeu de piratage d'Ada ou la partie de cache-cache de Sherry, ces passages peinent à convaincre surtout à cause de leur courte durée (environ 10 minutes) et se marient assez mal avec le reste du jeu.
La partie des égouts, si elle bénéficie tout de même d'un "lifting" sympa, reste bien moins intéressante à parcourir que le RPD. J'apprécie la possibilité de retourner une dernière fois au commissariat via un ascenseur caché, afin d'en obtenir les ultimes secrets, et la réutilisation des monstres "G" en ennemi plus récurrent. Mais on entre malgré tout dans une phase de plus linéaire et scriptée que précédemment et qui laisse apparaître un certain essoufflement. Le passage de l'alligator, recyclé dans une phase de QTE un peu cheap, est assez décevant. Je sais que les égouts sont une zone de transition et qu'ils étaient peu complexe dans le jeu original, mais dans ce remake ils amorcent néanmoins une baisse de qualité qui sera malheureusement graduelle.
C'est surtout la partie du laboratoire qui me semble être la plus faible du jeu. Après la suppression de la courte section de l'usine/gare de triage, qui avait quand même le mérite de faire monter le suspense avant la découverte des labos, on pouvait espérer que l'ultime morceau du jeu soit plus vaste et plus complexe. Eh bien… non. Il s'agit de la zone la plus courte, au level-design ramassé et linéaire. A titre de comparaison, le laboratoire du jeu de '98 n'étaient peut-être pas beaucoup plus vaste, mais ils avait au moins le mérite de s’étaler sur plusieurs niveaux, et de donner l'impression de s'étendre encore plus loin que ne nous pouvions le voir. Ici, seule la zone ouest ressemble un peu à quelque chose, même si elle ne consiste finalement qu'en une dizaine de petites salles et quelques corridors vite visités. Les deux autres zones sont juste des couloirs mal déguisés, et c'est tout ce que nous avons à se mettre sous la dent… La grande serre et l’apparition des plantes carnivores sous une nouvelle forme "zombiesque" sont des exemples de choses que j'ai apprécié car se sont des idées neuves qui apportent quelque chose en plus. Mais pour le reste, j'en attendais beaucoup plus des laboratoires secrets d'Umbrella que ces quelques salles banales et "l'espace détente" de Caméra Café. Il y avait tant à faire avec cette zone...
Les zones manquantes du jeu original, car elles sont nombreuses, semblent avoir été recyclées vite fait dans la toute dernière partie où il faut s'échapper avant que tout nous pète à la figure (un classique des RE). A cause de l'excuse bien pratique d'une décompte de 10 minutes, la fin du jeu (y compris les boss de fin de Léon ou Claire) donne l'impression désagréable d'être expédié, tant le jeu se termine de façon abrupte. L'ensemble du laboratoire manque d'une vraie montée en intensité, que ce soit en terme de combats ou de progression. A noter également que Tyran ne fera plus aucune apparition avant la fin, sauf une poignée très scriptées, à cause évidemment des lieux trop exiguës dans lesquels sa mécanique de jeu ne peut pas fonctionner.
L'idée ici n'est pas de faire le puriste rabat-joie, mais il me semble que l'on peut objectivement affirmer que le labo est la partie la moins inspirée et la moins intéressante à jouer, de part sa trop grande linéarité, sa petite taille, et le manque d'une vrai exploration qui aurait fait écho à la partie du RPD. On touche ici à quelque chose qui semble être symptomatique des dernières productions de Capcom depuis plusieurs années, comme Resident Evil 7. A savoir, des jeux qui proposent une première moitié bonne, voir excellente, mais qui ne parviennent jamais à tenir sur la durée et semblent avoir été bâclé sur leur seconde moitié.
Lors de ma première partie découverte avec Claire, je n'ai pas trop tenu rigueur de ces faiblesses car en tant que connaisseur du jeu original, je savais que Resident Evil 2 avait une particularité bien à lui qui me laissais espérer qu'il n'avait pas encore dévoilé toutes ses cartes. Et c'est maintenant qu'il va falloir aborder un autre sujet qui fâche : le scénario.
Le jeu de 1998 est construit autour de ce que son créateur, Hideki Kamiya, appelle le "Zapping system". Que l'on choisisse de jouer sa première partie avec Léon ou Claire, une fois la fin atteinte, apparaît alors un "scénario B" qui permet de refaire l'aventure aux mains de l'autre personnage mais avec des différences et surtout des nouveautés. Plus long et difficile, le scénario B est pensé comme un ensemble narratif cohérent avec le scénario A. Dans les faits, cela repose sur des détails subtils comme l'obligation d'appeler un monte-charge ou un téléphérique déjà utilisé par l'autre personnage (le perso du B suit toujours les traces de celui du A), ou bien le déroulement de certains évènements ou rencontres avec des personnage qui est coordonné pour ne pas causer de paradoxe. Encore mieux, certaines actions du personnage du scénario A ont une incidence sur le scénario B. Ainsi, il est possible à un certain moment de choisir parmi deux objets dans un casier lequel laisser au personnage suivant, voir même tout prendre ou tout laisser ; à un autre moment d'utiliser un gaz qui rendra un certain passage du jeu plus simple en A mais plus difficile en B ; et plein d'autres petites choses du même genre. L'autre surprise de taille était le Tyran, qui n'apparaissait que dans le scénario B, ainsi de nouveaux boss qui remplacaient ceux du A. Dans le laboratoire, des sections entières ne pouvaient être visiter que durant le second arc narratif (les niveaux inférieurs, le train). Toutes ces détails et différences donnaient vraiment au scénario B une saveur spéciale et permettaient d'avoir un jeu qui se dévoile en deux actes.
Pour résumer, il existe donc 4 scénarios possible, qui fonctionnent par pair et il est nécessaire d'en faire au moins deux d'entre eux pour atteindre la vraie fin du jeu.
Léon A – Claire B ou Claire A – Léon B, c'est selon la préférence de chacun.
Ce remake reprend donc ce principe, et c'est en pensant avoir un jeu qui n'avait pas encore dévoilé tous ses secrets que je me lançais dans le scénario B de Léon. Mais quelle déception ce fut… Hormis quelques changements mineurs sur le placement des objets au début, et l'obligation de jouer avec un pistolet alternatif, le scénario B ne change absolument rien… La progression est exactement la même, aucun contenu exclusif, aucune nouveautés qui viendrait lui donner un quelconque intérêt, si ce n'est le "vrai" boss de fin. Pire, il ampute même les 30 premières minutes, sachant que le jeu est déjà plutôt court et se termine facilement en moins de 10 heures.
Il est clair que Capcom n'a mis absolument aucun effort pour rendre ce système intéressant, à un tel point que je me demande sérieusement pourquoi ils ont prit la peine de l’implanter. Des rumeurs disent que c'est à cause de la pression des fans qu'ils auraient décidé de l'ajouter avant la sortie du jeu. Peut-être, mais cela n'excuse pas l'autre soucis que nous allons voir…
Moi je veux bien admettre que le "zapping system" est difficile à mettre en place de nos jours et qu'il aurait mieux valut se contenter d'un scénario unique pour chaque personnage. Le problème est que dans ce remake même le choix entre Léon et Claire ne fait finalement que peu de différences, et encore moins que dans le jeu original. La progression est la même, les énigmes sont les même (franchement...), les trois boss ne changent pas... Donc hormis les cinématiques, les armes, deux courts passages exclusifs et le boss final, tout est à l'identique.
Narrativement, le jeu n'a plus aucun sens, tant les scénarios ne s’emboîtent plus du tout entre eux. Et je ne parle pas ici de quelques détails sans importances, mais de pans entiers de l'intrigue qui se répètent à l'identique entre le scénario A et B ou Léon et Claire (qu'importe). En guise d'exemple, dans les égouts Sherry doit être secourue exactement au même endroit qu'Ada en résolvant la même énigme. Pire encore, le troisième boss du jeu que l'on doit de tuer au même endroit, presque au même moment. On se demande donc comment un certain personnage a pu ressusciter, la salle se réparer d'elle-même et le monstre réapparaître comme par magie… On en est vraiment à ce point d'incohérence scénaristique. Et je le répète, bien qu'il n'était pas parfait, le jeu d'origine faisait un gros effort pour proposer un ensemble narratif qui permettait de faire accepter la simultanéité de l'aventure de Claire et de celle Léon. Pour moi c'est évident que Capcom n'a même pas essayé.
En témoignent également la qualité des documents à lire dans le jeu qui ont sûrement été écrit par un stagiaire tellement ils sont insipides et n'apportent aucun éclairage sur l'histoire. Cette dernière qui d'ailleurs semble beaucoup plus obscure, la faute à des choix scénaristiques douteux qui au final laissent de trop grandes zones d'ombre sur des éléments qui étaient pourtant expliqués dans jeu original (la fille du maire ; comment Tyran est arrivé ? ; pourquoi l’hélicoptère s'est crashé ? ; le médaillon de Sherry ; etc.)
Parmi les bon points tout de même, la plus grande place laissé à certains personnages secondaire dont le "background" est un peu plus étoffé, bien qu'encore superficiel. Mais dans l'ensemble c'est faible scénaristiquement et un effort aurait pu être fait pour donner un peu plus de consistance à ce qui reste encore une bonne grosse série B.
Alors peut être est-ce par manque de temps, à cause d'un budget restreint, la flemme, ou que sais-je encore. Mais toujours est-il que ce remake de Resident Evil 2 n'a clairement pas eu le même soucis apporté aux détails que l'original. Je sais que beaucoup de gens font la distinction entre la démarche du Resident Evil de 2002, celle d'un pur remake qui se doit d'être une amélioration en tout point, avec celle de Resident Evil 2 parfois appelé "réimagination". Et j'aimerai que ce soit clair que je n'ai aucun problème avec ça. J'apprécie la grande majorité des changements qui ont été fait sur ce remake. Et quitte à tout réimaginer, j'aurais finalement préféré que les développeurs s’éloignent encore davantage du jeu original, pour proposer encore plus de passages inédits. En revanche, cela ne justifiera jamais à mes yeux les défauts que j'ai développé plus haut et qui son vraiment selon moi le résultat d'un manque de peaufinage du projet.
D'ailleurs à propos des changements esthétique, j'ai bien sûr mon propre avis sur chaque petit détail, mais que je vous épargnerai ici. Disons que globalement je suis satisfait par les modifications apportées dans ce remake, qui sont cohérentes avec la démarche de Capcom de vouloir proposer une version plus moderne et "réaliste". Cette vision est d'ailleurs portée avec brio grâce au RE Engine qui permet d'avoir un jeu au visuel magnifique et riche en détails. C'est un des points fort d'ailleurs, surtout dans le RPD où l'on peut vraiment admirer le travail qui a été fournit. On sent également une volonté de coller à un nouvel imaginaire de film d'horreurs plus actuels. Les jeux de la série ayant toujours été énormément influencé par le cinéma. Le retour vers le gore est également très prononcé et le design des monstres toujours aussi fascinant.
L'ambiance sonore n'est pas en reste, et même si elle se fait plutôt discrète, réserve de très bon moments. L'absence de vrais musiques se fait sentir, mais c'est en accord avec la nouvelle direction artistique. Par contre, vendre les musiques du jeu d'origine en DLC dès la sortie est vraiment une pratique commercial dégueulasse, surtout qu'elles n'ont même pas été remixés et s’intègrent finalement assez mal. Capcom joue avec la nostalgie des fans pour espérer grappiller quelques deniers.
Le mode "The 4th Survivor" fait son grand retour et permet d'expérimenter de plus grands défis dans la peau de Hunk ou de Tofu, un clin d’œil sympathique au contenu annexe du jeu de 1998, qui vient rajouter une heure ou deux à la durée de vie bien courte du titre.
Il existe aussi quelques DLCs gratuits (heureusement), appelés "The Ghost Survivors", mais qui sont des trucs très arcade sans intérêt autre que le scoring… Je me demande parfois si les gens de chez Capcom ont la moindre idée de ce que veulent vraiment les joueurs.
Pour conclure donc, Resident Evil 2 est un bon jeu qui parvient à remettre au goût du jour la série dans sa forme originelle. Et ce n'est pas rien tout de même. Le plus important selon moi, c'est qu'il démontre qu'il est encore possible de faire un survival-horror moderne qui se repose en partie sur les mécaniques d'antan. D'ailleurs, pour ceux qui seraient ennuyé par le surplus d'information que délivre la carte ou les sauvegardes automatiques, il existe un mode hardcore qui offre une expérience "à l'ancienne".
Tout de même, je pense sincèrement que Capcom aurait à gagner à prendre plus de temps ou mieux diriger ses équipes pour délivrer des jeux plus aboutis. Je sais que cette critique ne fera pas l'unanimité, surtout au vu des incroyables retours qu'a eu ce jeu, qu'il agisse de la presse ou des joueurs. Mais je persiste dans l'idée que le projet a été bouclé à la va-vite. Je sais que cette assertion est subjective, mais j'espère que ceux liront cette critique essaieront de comprendre mon point de vue et de prendre en considération les points que j'ai relevés précédemment. Je me souviens de Resident Evil 4 qui proposait trois longs chapitres de qualité, qui totalisaient une durée de 15-16 heures. Pourquoi Resident Evil 2 semble si court et inégal après quatre années de développement ? Pourquoi tant d'éléments sont-ils recyclés ou manquants ? Pourquoi la durée de vie repose uniquement sur un artifice ? Pourquoi le scénario échoue à être cohérent ? Suis-je juste un vieux fan aigri et insatisfait ou mes reproches sont-ils justifiés ?
Capcom est une entreprise de renommée mondiale qui possède les moyens techniques et financiers de réaliser ses projets. Même le talent semble être présent vu que la première partie du jeu est excellente. Et c'est ça qui me frustre d'autant plus, car j'ai vraiment l'impression qu'on avait ici un jeu à très gros potentiel et qui aurait pu être encore bien meilleur. Beaucoup s'en contente très bien et considèrent Resident Evil 2 comme le remake parfait. Pas moi. Je reste sur ma faim.
Pour moi, Capcom c'est un peu cet élève qui à la capacité d'être brillant, mais qui ne se donne pas la peine de bosser à fond et se contente de livrer une copie correcte, mais inaboutie.