Derrière ce titre énigmatique se cache la lecture d'un livre autobiographique et édifiant d'un homme qui n'a pas démérité : Patrick Sebastien's dark legacy of an untold story évoque avec force la longue vie du troubadour du PAF, entre joie, bonheur, peine et déception. Une vie riche en surprises, mais dont les affres du doute ont parfois obscurci une carrière au service de l'humour et du bon mot. Pour Patrick, tout n'a pas toujours été facile, et différents événements ont conduit l'homme à se chercher et se réinventer.
Ce qui n'est pas facile pour Pat' ne l'est visiblement pas non plus pour Capcom : alors que la plupart de leurs titres cultes ne changent pas, ou si peu en réalité (on pense à Mega Man ou Monster Hunter notamment) il s'agit pour Resident Evil d'une toute autre histoire : d'un gamedesign davantage tourné vers la tension, le progression à petits pas avec un jeu d'énigmes qui s'articulent entre plusieurs salles d'un manoir ou d'un commissariat, la licence s'est tournée vers le TPS en 2004 avec un succès certains, mais qui partagera les puristes. En schématisant, on constatera que la rupture avec les fans de la première heure s'amorce définitivement avec un RE5 décevant sur bien des points, et balayant à lui seul tout l'esprit des jeux d'origine.
Une lueur d'espoir fut permise en 2017 : après un certains nombres de spin off, de remake de remaster (ou l'inverse), la saga revient dans un épisode canonique; très déroutant lors de ses présentations à travers différents trailers, le jeu se révélera d'une mise en scène solide et d'une proposition de gameplay finalement bien plus proche des origines, en essayant d'y mêler une certaine modernité. Toujours clivant, mais finalement convaincant pour les fans et les nouveaux venus, il ne fallut qu'un jeu supplémentaire pour convaincre que Resident Evil était de retour pour le meilleur : le remake du 2, deux ans plus tard, qui a diaboliquement réussi la synthèse entre l'esprit (ou les esprits) des différentes orientations de gameplay de la saga.
Resident Evil 3 2020 s'inscrit dans cette continuité, avec une orientation action plus prononcée, exactement comme c'était le cas sur l'opus de 99 : d'entrée de jeu, après une mise en scène au top à l'échelle du médium, le tempo est donné avec une fuite en avant constante qui a l'habilité de ne pas dénaturer l'essence de la saga avec un rythme certes beaucoup plus soutenu que celui du 2R pour les besoins de l'histoire, mais aussi avec des passages beaucoup plus classiques, dont un tout bonnement excellent et très bien ficelé. Du classique, de l'efficace, une Jill superbe, quelques changements au niveau du scénario bienvenus, et un gamefeel satisfaisant qui m'a personnellement donné le sourire aux lèvres en fin de partie.
Mais alors, koikivapa ? C'est court. Trop pour être excellent. Focaliser sur ce seul défaut comme certains journalistes l'ont fait (et en jouant au très idiot mode facile, qu'ils auraient du s'abstenir de mettre, tant il vide le jeu de tout son sel et de son intérêt) est assez incongru et ne justifie pas à mon sens des critiques que j'estime beaucoup trop sévères. D'autant plus que l'argument classique qui consiste à dire qu'il n'y a pas le ver, le parc ou le beffroi est vrai sans l'être : le jeu est davantage différent du 3 99 que le 2R ne l'est de celui du 2 98 (oui, je savais pas comment mieux le dire) : grossomodo, 40% n'a rien à voir et n'était pas présent. Ou se déroulait d'une manière totalement différente (le commissariat en tête...) dans ces conditions, il est normal de voir toute la trame et l'aventure suivre un chemin différent.
Normal, sans être excusable : le beffroi aurait pu avoir parfaitement sa place. Pour rester vague, on a l'impression que le jeu a subit un immense cut (assez grossier d'ailleurs) à son deuxième combat de boss, et qu'il manque justement ce fameux beffroi où il aurait parfaitement pu s'y nicher. Et bien travaillé, il aurait pu amener le jeu à atteindre les 8 ou 9 heures de jeu en premier run et en normal (honnête dans ce genre) mais il chute malheureusement aux alentours des 6 heures dans les faits, quand ce n'est pas moins pour les plus pressés (5h30 environ pour votre serviteur, et, pour me contredire, j'étais pas spécialement pressé...)
Si on ajoute le endgame intéressant mais classique et rapidement épuisé (grossomodo : faire les différents défis comme tuer 100 zombies en lui pinçant la joue, blabla... permet de gagner des points à investir dans une boutique qui vous permet par exemple de booster votre dps via un token à garder dans l'inventaire ou de commencer avec des emplacements en plus) et l'absence très remarquée du mode Mercenaries (permettant d'incarner la milice privée d'Umbrella, un peu sur le modèle de Hank dans le 2) alors les (relatives) déceptions se comprennent. Reste deux modes de difficulté nouveau : le cauchemar et l'enfer. Si le premier demeure accessible moyennant un peu d'huile de coude et de détermination (et pourquoi pas, quelques bonus de la boutique pour alléger votre peine), il en sera très différent pour le second : réservé à une élite, avec un boss final redoutable et malheureusement souvent injuste, il faut davantage le voir comme un mode pour se faire plaisir avec l'arsenal ultime déblocable en boutique. Sans vouloir tacler une seconde fois les journalistes, on aurait aimer les voir parler de ces modes... Certains l'ont fait, mais ils sont rares.
En définitive, un jeu qui n'a pas de raison de ne pas plaire aux amoureux de la saga et à ceux qui ont aimé le travail de Capcom sur le 2 de l'année dernière, mais qui doit quand même nous maintenir vigilants pour la suite : pour l'un des meilleurs opus de la saga, à savoir Code Veronica, quelque chose de beaucoup plus consistant mais de tout aussi qualitatif serait souhaitable.
Si cela n'advient pas, on se consolera comme on pourra. Et pourquoi pas en chanson ?
... Qui s'élance et rate le plongeoir
(qui est toujours plus grave que de rater sa chute, au moins j'en mourrai pas)