Rappelons-le si besoin est : Secret of Mana est un jeu culte à plus d'un titre, surtout et avant tout parce que ce fut un jeu brillant qui lança définitivement le genre du A-RPG japonais dans les vertes contrées qui sont les nôtres grâce à sa sortie en 1993 sur Super Nintendo. Il n'est certes pas le premier (Zelda II: The Adventure of Link était notamment déjà passé par là), mais il est celui qui ouvra la porte au genre, et plus encore au J-RPG encore rare à cette époque malgré la sortie de quelques titres tel que Mystic Quest.
De fait, Square Enix, en s'attaquant à un tel monument, ne pouvait pas ne pas anticiper l'énorme attente autour du titre. Et malgré les retours catastrophiques dès les premières images, l'entreprise basée à Tokyo a mené le projet à terme. Besoin urgent de renflouer les caisses ? Qu'importe. Le jeu est là, et c'est cet événement qui m'intéresse, surtout quand on sait que Secret of Mana trône dans mon Top 10 Jeux vidéos depuis sa sortie il y a 25 ans.
Le reproche que l'on retrouve essentiellement ici et là autour de ce remake concerne l'aspect graphique daté évident. En effet, pour un jeu PS4, on aurait pu s'attendre à mieux. Pourtant, cet aspect ne m'a pas dérangé même si je comprends les critiques qu'il concentre. Après tout, ce Secret of Mana cuvée 2018 est une petite production, et il paraissait évident qu'il ne fallait pas s'attendre à un résultat tonitruant. On pourra néanmoins arguer qu'un tel jeu aurait mérité une attention (et des moyens) nettement plus importante. Et plus encore si l'on compare le niveau atteint par chacune des deux versions à leur époque respective, puisque la version 16 bits représentait le must d'antan. Mais s'il s'agit de reprocher au jeu ses graphismes enfantins, il est bon de rappeler que ceux du jeu original n'étaient pas bien différents dans l'esprit. C'est davantage du côté de la direction artistique qu'il s'agit de souligner la perte tant Secret of Mana 2018 ne tient pas la comparaison.
Autre reproche récurrent, le fait de faire un strict copier / coller : même vue, même jouabilité, même gameplay... Là encore, cela ne m'a pas dérangé. Bien sûr, on pourra critiquer le manque de prise de risques. Mais puisque le but est de faire découvrir Secret of Mana aux jeunes générations tel qu'il a été pensé à l'époque, on peut dire que la production l'a atteint. Pour l'ancienne génération comme la mienne, il est question du plaisir de s'y replonger et pourquoi pas d'y faire plonger nos propres enfants puisque le multijoueur est toujours de la partie. Montrer un classique à nos jolis têtes blondes en quelque sorte. Ajoutez à cela les quelques trophées histoire de coller à l'air du temps, et le minimum est fait. "Minimum" reste bien entendu le problème.
Mais alors, pourquoi ne pas lui coller 10/10 comme j'ai pu le faire sans l'ombre d'une hésitation avec la version SNES ? Pour une raison bien précise, en fait : passe encore que l'on se contente de faire un copier / coller, de toute façon j'adore tellement le jeu original qu'y rejouer tel quel ne nuit pas à mon plaisir ; passe encore qu'il s'agisse d'une petite production, on pourra pardonner l'aspect peu révolutionnaire de cette cuvée. Mais, qu'on se le dise : réussir à faire moins bien malgré le copier / coller, c'est à n'y rien comprendre. Quid des crashs sempiternels ? Après 20H de jeu, j'en suis déjà une dizaine. Quid des menus en anneaux qui ne gardent pas en mémoire la dernière position là où l'ancienne version le faisait, rendant leur navigation indigeste ? Quid de la gestion du comportement des personnages nous accompagnant quant à leur agressivité ? Quid de la balance de difficulté entre les monstres, déjà bancale à l'origine, ici complètement déréglée tant certains boss sont plus simples que les mobs de base et inversement ? Quel intérêt alors de copier / coller si c'est pour faire moins bien ? Et pourquoi ne pas avoir ajouté au passage un mode online, sinon ne pas s'embêter avec les limitations d'écran qu'impose le jeu dans sa forme originelle ?
Reste dans ce cas les nouveautés pouvant rattraper le coup, mais là encore, il y a de quoi être circonspect. Si la réorchestration des musiques est dans l'ensemble acceptable voire inspirée pour certains morceaux, les doublages n'ont rien de mémorable, et pire encore les quelques ajouts sont d'une part faméliques et d'autre part peu approfondis. En témoigne les encyclopédies, se contentant généralement d'un simple affichage des modèles 3D sans plus de précision. Là encore, le service "minimum". Même pas un boss supplémentaire. Même pas un donjon bonus. Rien. Et je ne parle même pas des voyages avec les frères Canon qui n'ont plus rien à voir puisqu'ici un simple fondu au noir prend le relais au voyage dans les airs avec le mode 7.
Tout n'est pas à jeter, certains changements de skins étant réussis, la carte à dos de Flammy plus claire, et... C'est tout. En somme, on aurait pu pardonner un manque de moyens, mais un tel manque de finition ? Non, clairement pas. Et plus encore quand on se permet de commercialiser ce "strict minimum" 40 € quand il paraît évident que 20 € aurait déjà été un grand maximum. D'où ma note - pourtant généreuse puisqu'elle prend en compte le fait que Secret of Mana 2018 respecte suffisamment la manière d'aborder Secret of Mana 1993 sans avoir l'impression de jouer à autre chose.
Maintenant, tremblons des genoux pour le remake de Final Fantasy VII : le pire est peut-être à venir...