Sekiro : Shadows Die Twice débarque en ce début d'année, et relance encore une fois le débat de la difficulté et l'accessibilité des jeux vidéos, comme à chaque sortie d'un jeu issu du studio d'Hidetaka Miyazaki, From Software. Succédant à la série qui à rendue célèbre le studio au yeux du grand public, - Dark Souls - et à un Bloodborne sorti sur PS4 uniquement, Sekiro à la lourde de tâche de contenter les fans des jeux From Software tout en proposant un rafraîchissement du gameplay et en sortant ces derniers de leur zone de confort.
Fine lame.
Il faudra une trentaine d'heure (32h ici) pour atteindre la (vraie) fin de Sekiro. Une trentaine d'heures de souffrance et de rage que viendront sublimer chaque obstacle passé. Car oui, pas la peine de tergiverser plus longtemps, Sekiro est difficile, vraiment. Cette difficulté vient tout d'abord du gameplay, et surtout du renouveau qu'il apporte comparé à la série des SoulsBorne. Si ces derniers nous avaient habitués à plusieurs styles de jeu possible, afin de permettre au joueur d'opter pour un style qui lui sied le mieux, le nouveau jeu de Miyazaki propose un système de jeu radicalement différent : exit les possibilité de personnalisation de son avatar, exit les différents armes et armures permettant de build son personnage comme on le souhaite. Sekiro se jouera uniquement avec un katana, dans des joutes basées sur la parades, les contres et les esquives. Pour remplacer les magies, Loup - le protagoniste du jeu - est équipé d'un bras prothétique lui permettant d'équiper différents outils pour faciliter les combats : jets de flamme, pétards aveuglants ou lancer de shurikens. Ces outils s'améliorent à travers un arbre de craft classique, nécessitant or et matériaux. A cela vient s'ajouter des "arts de combats", compétences qui se débloquent en dépensant ses points de compétences durement acquis. On y trouve des compétences passives et des compétences actives, ces dernières devant être équipées pour être utilisées, une seule à la fois. Il faudra donc faire un choix et choisir la meilleur technique lors de tel ou tel affrontement. La touche finale est l'ajout d'un grappin à l'attirail de Loup, qu'il peut lancer sur des points précis et prédéterminés sur les niveaux, ce qui permet à From Software de proposer un level design beaucoup plus vertical qu'à l'accoutumée. En revanche, l'habitué des jeux de Mitazaki se sentira comme à la maison vis à vis de l’agencement des niveaux, tant ceux-ci démontrent d'un classicisme rassurant : les idoles du Sculpteur remplacent les feux de camps et offrent la même fonction (voyages rapides, repop des ennemis, etc...), de nombreux raccourcis parsèment les niveau et un hub débloqué en début de jeu concentre la plupart des fonction primaires : upgrades de la prothèse, marchands ou encore poteau (vivant) d'entraînement. Seule la mort, élément prédominant des jeux From Software, tranche avec les SoulsBorne et est en grande partie responsable de la difficulté du jeu : quand Loup meurt, il laisse avec lui la moitié de son or et de sa barre d'expérience (les points acquis sont conservés), sans possibilité de les récupérer. Cette double punition est contrebalancée par la grande nouveauté du titre : la résurrection. En effet, Loup peut repasser une fois de trépas à vie lorsqu'il tombe au combat. Et si l'on s'attend à ce que cette mécanique soit punitive (vis à vis du passif du studio), il n'en est rien. Seule la mort l'est. en revanche, mourir trop souvent diffusera une maladie qui touchera les nombreux PNJ et fera baisser les chances de bénéficier de l'Aide Divine (de base à 30%), qui supprime la perte d'or et d'expérience en cas de mort.
Ninja Gadin
Tous ces ingrédients accouchent d'un titre exigeant et qui ne pardonne que peu d'erreurs. En effet, la plupart des nombreux combats de boss s'articuleront de la même manière : phase d'apprentissage des pattern du boss, puis calage des réflexes sur la rythmique des combats, et enfin cassage de mâchoire de l'ennemi. Car contrairement aux habitudes, il ne sera pas forcément question de grignoter la barre de vie d'un adversaire pour le tuer. En effet, Loup et la plupart des ennemis qu'il rencontrera sont doté d'une barre de vie classique et d'une barre de posture. Faire monter la barre de posture d'un adversaire à son maximum résultera en un coup fatal, éliminant l'une des barres de vie de l'ennemi. En revanche, si c'est la posture de Loup qui flanche en premier, il subira de très longues secondes d'étourdissement. Il y a plusieurs moyens de faire monter la barre de posture d'un adversaire : dévier ses attaques (parer juste avant qu'elle ne vous touche), taper directement dans sa barre de vie (s'il ne garde pas) ou encore utiliser des coups spéciaux. C'est la déviation qui primera dans la plupart des affrontements, car tous les coups peuvent être parés, à l'exceptions de coups spéciaux indiqués à l'écran par un gros kanji rouge. Ceux-ci seront à esquiver d'un saut ou d'un pas de côté ou à parer avec un contre spécial. Il faudra donc apprendre à différencier les nombreuses attaques d'estoc, de balayage ou de choppe. Il en résulte des affrontement rythmés par le son des lames qui s'entrechoquent, où la moindre erreur se paiera via la perte d'une fraction importante de la barre de vie de Loup. Le plaisir de maîtriser tous les coups des ennemis est inqualifiable, et c'est un vrai sentiment de joie et de soulagement qui accompagnera chaque victoire. Les combats de boss sont d'autant plus très nombreux, bien plus que dans les SoulsBorne. On distinguera tout de même deux catégories : les vrai boss uniques (obligatoires, pour la plupart), souvent en fin de niveau et les boss secondaires (parfois optionnels) disséminés sur toute la map mais aussi difficiles que leurs homologues. Il faudra néanmoins se faire violence, car chaque affrontement remporté permettra de décrocher une précieuse perle, composant qui sert à augmenter la barre de vie de Loup lorsque 4 sont collectées.
Tenchouille
Sekiro propose une aventure assez linéaire, malgré la possibilité d'explorer les zones du second tiers du jeu dans l'ordre souhaité. En revanche, les environnements traversés font preuve d'assez de variété pour ne pas engendrer de sentiment de lassitude. On passe du château fort japonais au temple montagneux reculé en passant par des zones pourries et hantées par la corruption ,que ne renierait absolument pas un Dark Souls. Pas de doutes, côté level design, on est chez Miyazaki. On regrettera malgré tout un bestiaire assez peu varié, même s'il est très cohérent avec l'univers dépeint. L'exploration aussi subit le système de jeu établi, empêchant le joueur de découvrir de nouvelles armes ou armures au fil des détours du chemin. A la place, les cachettes sont remplies d'objets banals, assez peu utiles in fine. La narration, nébuleuse au possible dans les précédents titres de From Software, avait forgée une réputation de jeux à wiki, où la plupart des éléments du scénario étaient dévoilés via des descriptions d'objets ou des indices disséminés ça et là. Sekiro s'écarte un peu de cette formule, dotant Loup d'une voix, petite révolution. A noter d'ailleurs que le jeu proposer plusieurs localisation, dont la japonaise, à préférer pour favoriser l'immersion. Le scénario n'est plus si obscur, laissant moins de place à l'imagination du joueur, mais permettant une plus grande accessibilité à son histoire. Ça à le mérite de proposer au joueur de vrais enjeux, au lieu de le laisser affronter des boss qui paraissent complètement aléatoires. En revanche, comme d'habitude, l'obtention de la vraie fin se fera via un enchaînement de choix et action obscures, qu'il sera difficile de découvrir dans un premier run sans l'aide de wikis. Il existe au total 4 fins, dont l'une pointera le bout de son nez assez vite si le joueur effectue les mauvais choix. Petit point rapide sur la technique : si le jeu ne brille pas au travers de ses graphismes, qui commencent à accuser de l'âge du moteur, le travail abattu sur les environnements et le bestiaire force le respect. Sur un PC qui commence à vieillir (GTX970 8Go et i5-6600K), le jeu n'a jamais affiché moins de 60 images par secondes.
Sekiro : Shadows Die Twice délivre toutes les promesses qu'il faisait miroiter au travers de sa campagne promotionnelle. Le jeu est un titre issu de From Software, aucun doutes là-dessus, pour le plus grand plaisir des joueurs souhaitant retrouver l'essence si particulière des jeux de Miyazaki. Il se permet même de sortir les habitués de leur zone de confort en proposant un gameplay tout frais, au sacrifice d'une certaine rejouabilité. Mais tous les ingrédients sont là : l'univers, le gameplay, et la difficulté. Ce mélange est un délice, dont il serait dommage de se priver pour tous les aficionados des jeux de From Software. Même les néophytes trouveront leur compte, s'ils arrivent à surmonter la difficulté un brin relevée. Toujours pas de faux pas pour From Software donc, force est de constater qu'ils maîtrisent leur sujet et arrivent à magnifier une formule déjà très bonne au fil de leurs sorties.