Ne vous laissez pas intimider par sa réputation : Sekiro est un jeu d'aventure difficile, certes, mais c'est d'abord un jeu nerveux, ouvert, aux décors somptueux, aux rencontres énigmatiques, à l'exploration verticale et non linéaire, au gameplay inégalé.


Réputée pour ses jeux infernaux, From Software nous plonge à l'âge des shinobis dans un jeu découpé entre phases de combat, d'exploration et d'infiltration.


Le combat d'abord. Jusque là, les jeux du studio m'avaient hérissés le poil : fabuleux par leurs univers noirs, leur maniabilité était lente, poussive, avec du farming et des améliorations de personnages obscures, surtout, ils étaient sadiques dans l'échec. Avec Sekiro (et Bloodborne, il semblerait, pas encore essayé) le studio mise sur des contrôles nerveux, l'échec rôde, mais il ne s'agit plus de faire une roulade pour passer au travers d'un coup d'épée, mais de parer les coups au moment opportun.


Les combats sont difficiles, mais l'essentiel du gameplay est présenté clairement, un « maître d'armes » propose même de pratiquer les coups avec lui. Chaque rencontre est sidérante. Les coups pleuvent, étincellent, mais au fil des échecs, il est possible de tester, puis de construire des stratégies. Rares sont les jeux aux approches aussi variées, ou l'observation de l'ennemi et la vitesse comptent tant.


Ce général bascule son épée dans sa main gauche, il prépare un coup d'estoc (un plongé), ce haut gradé prend sa lance à deux mains, il compte balayer le champ de bataille. Après une roulade, ce noble lance toujours quatre flèches. Rares sont les combats invraisemblables ou une aide ne se niche pas dans les alentours, tel conseil ici, tel arme à vendre là.


Les ennemis sont variés, très peu répétitifs, les zones de combats larges pour la plupart (certaines sont petites et la difficulté explose à cause de la caméra, mais c'est plutôt rare), et, surtout, on sent l'influence forte de Nioh : des points de respawn pavent chaque lieu. Ainsi, après être tombé au combat, il est très rapide d'aller se confronter à nouveau (les chargements courts aident aussi).


Attention, certaines rencontres sont des murs de difficulté, forme de rites de passage. Elles sont peu nombreuses, mais certaines batailles demandent d'être recommencées des dizaines, voir une centaine de fois. À ces étapes, le jeu attend souvent du joueur une maîtrise totale d'un des aspects du combat, le contre, l'esquive, la parade, la vitesse, la patience, l'observation ou la force. Parfois de plusieurs.


On peut, bien entendu, s'aider d'internet, mais j'avoue avoir trouvé une joie immense dans les essais répétés, variant à chaque fois de technique, d'approche, pour, à un moment, avoir ce déclic, comme prendre d'un coup complètement le dessus. Tout s'éclaire, rentre en rythme, tel mouvement déclenchant parade, parade, parade, attaque, parade, saut, attaque.


L'exploration ensuite. Le premier tiers du jeu se concentre sur le combat, puis les différentes voies d'exploration s'ouvrent davantage, le scénario aussi. À la nervosité des commandes s'ajoute un grappin, exploité de façon magistrale dans des décors très verticaux. En contreplongée, ou dans le lointain, s'égrènent des décors d'un Japon féodal rêvé, champs de batailles en ruine, villes en feu, désertées ou enneigées, gouffres, ravins, lacs, cols de montagne, villes englouties ou sommeillent bêtes et secrets.


Très lumineux au départ, crépusculaire par moment, les décors sont magnifiques. On y observe l'animation des troupes qui déambulent, des bêtes qui rôdent. On y cherche les voies d'accès, les passages. Chaque zones peut être abordée comme une saynète, d'abord à pas de loup, dissimulé derrière un fourré, ôtant au passage la vie à un garde un peu trop en retrait du groupe. Puis, parcourue avec plus d'assurance.


Chaque zone communique de façon surprenante avec les autres, et on se prend à se demander si, en débutant à nouveau le jeu, on ne les parcourrait pas totalement différemment, et ce que cela changerait sur la course du jeu.


L'infiltration enfin. C'est une nouveauté pour le studio, il est désormais possible de décimer une partie élevée des troupes adverses en se faufilant entre elles à couvert. Cela maintient une tension élevée, et fini souvent par un combat lorsque l'on est pris. Aucune des approches de force ou de furtivité ne semble privilégiée, et il est tentant de varier au fil des décors. Certains combats, ceci dit, sont contraints.


Sekiro est un jeu envoutant, magnifique, mystérieux, au gameplay vif, précis, aux rencontres mystiques, aux combats épiques. Le sadisme passé du studio, laisse sa place aux décors, à l'observation, au scénario brumeux, à la variété d'approches. On tremble et on en redemande. Sekiro est un chef d'oeuvre, probablement le plus grand jeu d'aventure de dark fantasy.

yamsellem
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le 22 juin 2019

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yves a.

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