Par Tristan Ducluzeau

Les plaines seront désertes. La lumière écrasante. Ca sera vraiment beau. Pour le joueur touché en plein coeur, c'est presque une nouvelle naissance au jeu vidéo. Pour les autres, un brouillon à la technique défaillante porté par une critique en mal de frissons. Essayez-le. Voyez s'il vous parle. Surtout, chérissez cette première fois. Ne laissez personne vous la gâcher, pas même cet article. Parce qu'il revient sur son déroulement et dévoile sa conclusion, il en dit déjà trop. Alors pas de cris d'orfraie, pas de protestations : si vous lisez ce qui suit, c'est à vos risques et périls.

Shadow of the colossus, c'est évident, n'a pas la perfection d'Ico. Ce dernier n'accusait aucune faute de rythme et trouvait son équilibre à la force de deux cutscenes, la rencontre avec la reine et la séparation des deux héros, qui chapitraient la trame principale avec une efficacité redoutable. Là , sur ce pont, Fumito Ueda épatait tout le monde par son sens de la cinématique en nous rendant les commandes au moment le plus crucial. Shadow est plus ambitieux, plus problématique, mais pas forcément plus réussi. En refusant toute progression narrative, il illustre le parcours de Wanda, un héros zombifié, condamné à ressasser les mêmes automatismes (éveil dans le temple, chevauchée jusqu'à la tanière du colosse, combat) sans trouver de répit ou de chaleur humaine. Il reprend donc la structure du conte fantastique (mise en garde, transgression, châtiment) et se contente de l'étirer sur seize combats. Le choix est franchement casse-gueule : encombré d'une structure-boulet, Shadow ne peut même pas compter sur un développement scénaristique pour poser ses enjeux. Il faudra donc peindre cet univers par touches et installer, peu à peu, une symbolique forte. A ce titre, on note quelques réminiscences, comme ces ombres omniprésentes qui se rassemblent autour de Wanda pour mieux rappeler sa filiation avec Ico. Mais on ne louera jamais assez la décomposition progressive du corps du héros, un dispositif qui souligne clairement le dilemme du joueur. Manque de chance, lorsqu'il finit par s'en rendre compte, vers le milieu de l'aventure, Wanda est déjà trop loin pour reculer. L'avatar devient notre portrait de Dorian Gray et chaque cicatrice, chaque cerne qui obscurcit son visage sera la preuve irréfutable de nos péchés. Si Shadow raconte quelque chose, c'est la longue et douloureuse naissance d'un sentiment de culpabilité. Une fuite en avant dans l'obsession, au mépris de la loi des hommes et du sentiment que ça finira mal. Parce que ça finira mal. Tout le monde le sait, instinctivement, au bout de deux colosses. (...)

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Chro
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le 7 avr. 2014

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Chro

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