Punks et paillettes

Un RPG "à l'ancienne" qui mélange elfes/trolls/orcs, punk-à-chiens-anarchistes-qui-sentent-mauvais-comme-les-vrais-qui-squattent-à-coté-du-monop', dragons, boules de feu et gros flingues. Moi qui n'y connaissait que dalle au RPG papier, qui n'y connait de toute façon pas grand chose à ce type d'univers (à part les premiers fallout), ça m'a pas mal intrigué. En plus ça se passe à Berlin, autant dire que j'avais bon espoir de zigouiller du nazi à crête.

Alors, qu'est-ce que ça donne à première vue ? La création de perso est classique pour le genre : on choisit la race et l'archétype parmi un certain nombre de choix. En dépensant nos premiers points de compétence on remarque qu'il n'y a pas de classe à proprement parler, toutes les compétences sont accessibles jusqu'à certains paliers dépendant de notre race. Sachant qu'elles sont organisées hiérarchiquement suivant diverses caractéristiques : par exemple toutes les spécialités d'arme à feu sont sous la compétence de tir à distance elle même dépendante de la vitesse. Avoir 5 points en vitesse permettra débloquer le tir à distance jusqu'à 5 points, qui permettra à son tour de débloquer les diverses spécialités (pistolet, rifle, etc.) jusqu'à 5 points, sachant que c'est dans ces spécialités qu'on acquiert la plupart des skills de combat. En vrac on a : combat à distance, combat rapproché/grenades, "decker" (une espèce de pirate informatique, je vais y revenir), contrôleur de drone, mage (du même genre que dans les jeux heroic fantasy) et chaman (guérisseur/buffeur qui peut aussi invoquer des élémentaires). Sachant qu'on peut les mixer et que dépenser tous les points de compétences acquis au long du jeu dans le même archétype est loin de tout débloquer : il y a vraiment de quoi faire ! En tout cas à première vue c'est du tout bon me dis-je. Bon vu que je débute et que je me doute que c'est essentiel, je me lance dans un sniper. J'aime exploser des crêtes.

Allez c'est parti, première mission qui fait office de didacticiel. Bon, déjà, c'est plutôt joli, sans être foufou, ça fait l'affaire. Et c'est sacrément bavard, dans un anglais pas évident de surcroît. Mais c'est putain de bien écrit et raconté, ya pas à dire. Autant je suis pas fan du tout des livres en pixels, autant là j'ai tout de suite été immergé dans ce monde bien chelou. Faut dire que cette première mission est plutôt efficace pour bien nous plonger dans le fond du bain. On joue donc un "shadowrunner" (oui c'est un nom de chiotte), une espèce de Geralt de Riv mais avec des tatouages chelous et un gros flingue. Un mercenaire du futur quoi. Très vite on va prendre le contrôle d'un groupe constitué de quelques autres gonz comme nous. Et tous sont bien développés et intéressants, bien qu'un poil caricaturaux (ça reste un jeu vidéo hein). Chaque mission, même la plus basique, est entrecoupée de nombreux dialogues, lesquels vont dépendre en partie des types qu'on a embarqué avec nous. On n'est pas non plus sur du Baldur's gate niveau écriture/interactions entre les perso hein, faut pas déconner, mais c'est d'un certain niveau et ça fait plaisir.

Niveau gameplay général on se balade sur les map et dès qu'un ennemi apparaît on passe en tour par tour pour le combat (comme les derniers divinity pour donner une idée du bordel). Une fois en combat c'est du X-com, à peu de choses près. On contrôle 4 bonhommes "lourdement armés" comme dirait BFM TV, ya une gestion des couvertures, des points d'actions communs entre mouvements et fusilleries/sorts. Ça se laisse bien jouer. Un gros kif pour les cranes qui explosent en mode Kennedy sur les coups critiques, ça fait son petit effet. Je regrette pas d'avoir pris un sniper dites donc.

Suite au didacticiel on se retrouve dans un hub qui va nous suivre une bonne partie de l'aventure : le Kreuzberg. Oui oui, ce coin où en réalité ya autant de kebabs que de hipsters sous eme des emma. Ben là c'est pareil sauf qu'à la place des kebab ya des boutiques de flingues ou de drones chelou, et des punkach' à la place des hipster. On va pouvoir tailler la bavette avec les copains, acheter du matos, bref, du classique. C'est à partir de là qu'on va enchaîner les missions pour se faire du blé ou pour tout autre prétexte scénarisé (chacune dure entre 30min et 1h), accompagné de 3 de nos acolytes (on peut choisir qui nous accompagne à chaque fois) parmi les 5 qui forment le reste de la troupe.

J'avais lu à propos de ce jeu qu'on avait plein de manières différentes de jouer les missions. Et c'est plutôt vrai. Y a généralement au moins deux possibilités à un moment donné (le plus souvent foncer dans le tas ou discutailler ou pirater l'ordinateur qui contrôle le bordel), et c'est vrai que c'est appréciable. Par contre concernant la trame principale, les seuls vrais choix n'arrivent que tout à la fin sur les deux dernières missions, qui effectivement donnent lieu à plusieurs embranchements. Mais bon, c'est les 2 ou 3 dernières heures de jeu quoi, rien de foufou.

Voilà pour un résumé global. Une fois bien plongé dedans, un des bon points pour moi, en plus de la narration très réussie, c'est l'originalité des archétypes. Ya un certain nombre de mécaniques originales et bien trouvées. Déjà, en combat, le mix magie/gros flingues c'est assez kiffant. Ya pas à dire, mais mettre à couvert son mec à fusil d'assaut pour canarder tranquilou le mage adverse, placer judicieusement son sniper pour enchainer les explosions de cretes fluo, invoquer un élémentaire avec son chaman et lancer des boules de feu/éclairs dans le bousin, ben ça change des poncifs habituels. Et ca fait grave du bien. Mais hors combat aussi. Le "decker", une espèce de pirate informatique, est essentiel pour prendre le contrôle de tourelles de défense, ouvrir des portes, pirater les caméras de surveillance et voir ce qui se trame plus loin sur la map... Quand je dis essentiel, c'est qu'il est toujours possible de s'en passer (du moins en mode "normal") mais que ça compliquerait tout et qu'à chaque mission y a des trucs à pirater. Pour ça il doit mener des combats "dans la matrice" contre les gardiens des trucs qu'il pirate. Avec des compétences spécifiques à ces combats précis, tout ça tout ça. Nan, c'est vraiment bien pensé ce truc là. J'ai pas pu tester le contrôleur de drone, qui peut parait-il aller se balader en éclaireur, mais ça a l'air assez funky aussi.

Les trucs qui fâchent maintenant. La gestion de l'équipement du groupe/inventaire. Un calvaire. On ne peut changer nos équipements qu'avant chaque mission, jamais pendant. Sachant que nos camarades ont tous un équipement spécifique et que pour changer de flingue il faut recommencer à CHAQUE PUTAIN DE MISSION. Autant dire qu'on ne se concentre bien vite que sur notre perso principal.

Deuxième truc qui fâche. La personnalisation en général, encore plus celle de nos compagnons. Autant l'évolution de notre perso est riche et bien foutue avec ce panel immense de compétences, autant pour nos copains ya juste le choix entre 2 pauvres skills durant les 6 petits niveaux qu'on peut leur faire prendre. Rien d'autre. Ouais c'est vachement léger. C'est hyper frustrant même, on peut le dire. Alors ils ont tous leur spécialité propre hein : decker, sniper, chaman, etc. Mais du coup on choisit pas grand chose de leur évolution. Et vu le bordel que c'est pour les équiper, on se contente de leurs armes de bases (et qui évoluent avec les rares skills qu'ils gagnent à chaque niveau) et puis basta. Un autre truc, c'est l'équipement. On est pas du tout sur du porte-monstre-trésor (c'est pas forcément une mauvaise chose hein), à part quelques grenade/trucs de soin/flouze on loote rien en mission. Tout s'achète au hub avec des thunes. Et autant ya pas mal de choix (on peut mettre des trucs aux jambes, aux bras, à la tête, etc.), autant ça coute une fortune et ça fait pas franchement rêver, surtout qu'avec cet inventaire de merde c'est hyper fastidieux de s'en soucier.

Un autre truc qui m'a bien gavé c'est une série de bug sur l'avant dernière mission. Je n'en ai remarqué aucun jusque là, et puis bim, plein de lags chelou et même un retour windows qui m'a obligé à recommencer cette putain de mission, qui se trouve en plus être la plus dure du jeu. Après des recherches sur internet il se trouve que cette mission est un calvaire pour la plupart des joueurs, ce qui fait quand même un peu tache. Surtout 5 ans après la sortie du jeu...

Finalement, une fois bien avancé, on se rend compte que ce à quoi affaire n'est pas aussi profond qu'escompté. Franchement ça va, ya quand même de quoi faire. Mais je l'ai fini en 19h. Pas énorme pour un rpg... Après en l'état il aurait pas fallu qu'il soit plus long, la lassitude aurait vite pointé puisqu'on ne peut pas faire évoluer nos compagnons, que l'itémisation est pas loin d'être foirée, qu'on commence à avoir fait le tour des combats, bref, que le gameplay est somme toute limité. Et qu'on se rend bien compte que l'ensemble du jeu a été calibré pour cette durée de vie assez courte.

Bref : On a des belles trouvailles de gameplay, c'est rafraichissant. La narration est excellente pour qui n'a pas peur des jeux (un peu) bavards, l'immersion très bien retranscrite dans cet univers pour le moins original, même si au final le scénario est assez classique. Mais j'aurais aimé un petit peu plus d'un peu tout. Là quand j'ai fini mon repas j'avais envie d'un dessert. Ou au moins d'un rab de frites. Bref, ça manque d'ambition et (surement ?) de moyens pour en faire un vrai grand RPG. Et l'humanité aurait apprécié qu'ils sachent faire un putain d'inventaire, bordel.