Si parmi les jeux d’horreur au gameplay épuré il ne fallait retenir qu’un seul studio ce serait Frictional Games. Ces pionniers, qui faisaient déjà du walking simulator d’horreur avant même que l’appellation existe (Penumbra), ont perfectionné leur savoir-faire au fil du temps. SOMA est à la lisière entre le simulateur de marche avec ses passages contemplatifs ; du jeu d’aventure avec de l’exploration, mais qui s’affranchit de la progression classique a base de recherche d’objets et résolution d’énigme pour quelque chose de plus intradiégétique ; et de l’expérience horrifique, avec des séquences d’infiltration "cache-cache", en proie a de pertubantes créatures. Ce qu’il vise c’est une expérience immersive avant tout, mais sans pour autant garrotter le joueur dans une accumulation de scripts et de cinématiques. SOMA est linéaire mais non dirigiste. Très souvent, seule une directive est donnée au joueur et pour le reste c’est à lui de se débrouiller seul. Cela est d’ailleurs intelligemment justifié dans l’univers du jeu. C’est grâce à cet équilibre que la formule fonctionne aussi bien et permet d’être plongé totalement dans l’aventure.
En tant que jeu d’horreur SOMA n’est pas à première vue des plus effrayants, même si son ambiance sous-marine claustrophobique ou ses monstres étranges pourront créer un certain malaise (le talent des développeurs pour créer des situations angoissantes est toujours intact depuis Amnesia The Dark Descent). Il ne faut pas pour autant juger le jeu sur comment il essaye de nous effrayer, mais plutôt sur ce qu’il nous offre au delà de cette couche d’inconfort. SOMA nous demande de réfléchir, il cherche à nous faire questionner nos actions et leurs conséquences en rendant toute moralité ambiguë. Il veut nous faire reconsidérer notre façon de penser, ce que cela implique d’être conscient de soi-même, jusqu’à peut-être remettre en cause notre propre existence… C’est la toute la subtilité du jeu, la vraie horreur se trouve dans la réalisation de ce que les évènements impliquent : c’est un jeu d’horreur métaphysique.
Je trouve particulièrement gratifiant que bon nombre d’éléments importants à la compréhension soient laissé à la découverte du joueur via des terminaux, des documents ou des images. La narration environnementale va aussi très loin, jusqu’à permettre d’échafauder des théories qui changent toute la perception de l’œuvre. SOMA n’est aussi percutant que parce qu’il est un jeu vidéo.
Commentaire vu sur internet : "I came for the scares but ended up with existential anxiety."
(critique rédigée en Janvier 2023)