L'objectif de Stasis, c'est de nous faire passer la pire journée possible, une journée qui nous rendrais heureux ne ne pas être à la place de John Maracheck, protagoniste infortuné du jeu. Car tout ce que l'on trouvera, dans les couloirs autrefois aseptisés du vaisseau abandonné où se déroule l'intrigue, c'est le sang, la solitude et la mort. La noirceur complète de l'aventure donne à Stasis un côté unique (et malsain). Cependant, on se rend assez vite compte de la direction du scénario. Si bien que les quelques twists tombent à plat, et les moments qui devaient susciter l'effroi ne provoqueront qu'un léger haussement d'épaules accompagné d'un "forcément". Dommage également que les antagonistes soient aussi caricaturaux, parce que des vilains avec des accents pétés qui sortent tout droit d'une parodie, ça flingue un peu l'immersion. Par exemple, sachez que grand vilain se prend pour Dieu,... littéralement. Genre il le dit, avant de rigoler comme un couillon. On a aussi droit au bon vieux cliché de la compagnie sans scrupule, on s'en lasse pas. Heureusement, tout ce qui trait au personnage principal est autrement plus réussi, dont l'écriture est soulignée par un très bon doublage qui nous plonge directement dans l'ambiance.
Une ambiance qui doit beaucoup aux décors. Tout est sombre, mort, dégueulasse, rouillé, où les seules choses en mouvement ne devraient clairement pas l'être, et on est au final assez content de ne pas voir de trop près des détails échappant à la vue isométrique. Les musiques étant complètement absentes, seuls les sons lointains et inquiétants, les bruits de pas métalliques et les entrées de journal du personnel de la station seront là pour vous tenir compagnie, faisant peser sur vous un sentiment de solitude total. On est pas venu pour rigoler, et Stasis nous le rend bien. D'ailleurs, les journaux que vous trouverez sont écrits avec plus de finesse que pas mal des dialogues. Vous y verrez un véritable petit portait de la nature humaine, où la jalousie, la bêtise, la cruauté et la bravoure se côtoient dans les pensées de ceux gisant désormais à vos pieds. Ces journaux participent donc encore à une atmosphère décidément impeccable.
Cependant, le sombre tableau dépeint par Stasis n'est pas dénué de tâches. Niveau gameplay, on est dans un jeu d'aventure à l'ancienne, avec des énigmes à résoudre, des objets à ramasser, à combiner,... Je ne suis pas un grand amateur du genre, alors peut être que c'est par manque d'habitude, mais j'ai trouvé une partie des puzzles peu claire, avec des conclusions parfois assez tirées par les cheveux. On est pas dans un jeu avec des règles consistantes réutilisées le long de l'aventure, ici, c'est une énigme = une solution particulière. Dans ce cas, la seule alliée est la logique, et lorsque cette dernière ne fonctionne pas, on se met à cliquer un peu partout pour voir si on a pas manqué une merdouille traînant par terre (ce qui arrive, les environnements peuvent être assez sombres) ou une interaction pétée quelque part. Alors toutes les énigmes ne sont pas comme ça et certaines sont très réussies, mais j'ai quand même du aller voir une ou deux fois la soluce pour repérer la solution un peu fumée voulue par les développeurs. Ça peut être assez frustrant, surtout quand on avait une solution de prime abord tout à fait sensée, avant de devoir combiner un ventilateur avec une ampoule électrique, parce que c'est comme ça qu'on fait et pas autrement. Mais bon, apparemment, les habitués du genre trouvent le jeu facile, alors allez savoir. Au final, et même si les puzzles étaient plus clairs, je trouve que passer et repasser dans les pièces du vaisseau pour jouer les professeur Layton a un peu tendance à casser l'ambiance, principal intérêt du jeu. Leur seul atout à ce niveau, c'est que le protagoniste sera parfois amené à accomplir des tâches assez insoutenables pour résoudre un problème, contribuant à l'atmosphère générale et au développement du personnage.
Stasis est donc un jeu d'horreur très sympathique, misant tout sur une ambiance malsaine plutôt que sur l'épouvante (d'ailleurs quasi inexistante, là n'est pas le but), où le jusqu'au-boutisme de la proposition donne à l'expérience une aura toute particulière. Si la déprime vous branche et que le style des jeux d'aventure d'il y a 30 ans ne vous rebute pas, Stasis est tout à fait recommandable.