Encore une fois, je ressors -un peu- déçu de l’expérience proposée par un jeu bénéficiant d’une certaine aura auprès de nombreux puristes. En effet, si les bonnes idées sont là, elles sont parfois mises en œuvre de façon bien maladroite, amenant leurs lots de frustrations et/ou d’énervements. À titre d’exemple, je n’avais que 107 étoiles à la fin de ma partie, parce que cet idiot de jeu a cru bon de confier à la même personne (Mathiu) la gestion de l’équipe ET la pourvoyance des missions… En résulta ainsi un duel maître-élève se terminant par une défaite écrasante, faute d’entraînement (ceux qui ont fait le jeu auront compris de quoi je parle)…


La gestion vraiment bancale de l’équipe est à mon sens LE truc loupé du jeu : car bien qu’on finisse par recruter à tours de bras, on nous imposera pendant les trois quarts du jeu 3, 4, voire tous les combattants sur les 6 devant composant la team ; pire, il arrivera à intervalle régulier qu’un nouveau compagnon vienne se joindre au groupe, nous obligeant alors à lui faire de la place, sans même connaître ses capacités… Résultat, le système de combat gérant les distances et beaucoup de persos n’étant vraiment à l’aise qu’au corps à corps, on se retrouve parfois à devoir en mettre un (voire deux) en retrait, qui deviennent ainsi de vrais boulets, car ne pouvant alors rien d’autre que de se défendre ou utiliser un objet…


Ce système de combat est très classique, puisqu’il s’agit de ce bon vieux tour par tour. Mais si, vous savez, le système "nul à chier car pas assez dynamique" ; c’est pas moi qui le dit, ce sont les RPGamers d’aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, les possibilités se révèlent assez complètes : on peut déjà engager le combat, soudoyer l’ennemi (à déconseiller car très onéreux), le laisser s’enfuir ou fuir nous-même (commande bien évidemment impossible avec les combats importants), voire même laisser le CPU jouer à notre place (à nos risques et périls!).


Si combat il y a, on peut attaquer directement, se mettre sur la défensive, utiliser un objet…ou encore utiliser les commandes "Unite" ou "Rune" (quand elles sont dispo). Unite, c’est grosso-modo similaire aux attaques combinées de Chrono Trigger : quand 2/3/4 héros ayant une certaine affinité se côtoient dans l’équipe, ils peuvent balancer une grosse technique à plusieurs qui déboîte du péronné. Quant aux runes, que l’on doit équiper au préalable dans les boutiques dédiées, elles permettent d’accéder soit à des magies plus ou moins puissantes, soit à des techniques spéciales plutôt efficaces. Il est en revanche dommage de ne pouvoir connaître leurs effets avant utilisation, mais surtout de ne pouvoir s’équiper que d’une seule à la fois. En contrepartie, elles évoluent par paliers proportionnels à notre niveau, et peuvent revêtir un aspect tactique intéressant, certaines ont un nombre défini d’utilisation alors que d’autres sont illimitées mais font perdre un tour…


Petit aparté à la sauvage pour évoquer brièvement le principe très chouette des armes à devoir faire forger pour gagner en puissance d’attaque, qui pour le coup rend la progression beaucoup plus crédible que des héros skillés dans toutes les disciplines. J’aurais d’ailleurs bien aimé que l’équipement défensif fonctionne (au moins en partie) sur ce même principe, ou encore que les différents échelons ne s’obtiennent pas QUE contre toujours plus d’espèces sonnantes et trébuchantes (par l’obtention de matériaux plus résistants par exemple). Mais bon, on ne peut pas toujours avoir le beurre, l’argent du beurre et le croupion de la bonne sœur… Comment ça, c’est pas ça qu’on dit ? Là au moins ça rime, c’est plus logique…


Pour terminer sur les combats, viennent enfin les duels et les batailles, que personnellement je redoutais, ne sachant pas trop à quoi m’attendre… J’en ressors globalement assez circonspect, celles-ci fonctionnant sur un mélange un peu chelou de tactical ultra simplifié et de shifumi géant. Pour synthétiser, magie > infanterie > archerie > magie, auxquelles s’ajoutera plus tard la cavalerie. En fonction des persos déjà recrutés, de leurs niveaux et de leurs attributions, on a accès à plus ou moins de possibilités tactiques, comme par exemple espionner l’ennemi pour prévoir sa prochaine action…Attention cependant, une recrue qui meurt sur le champ de bataille est définitivement perdue


C’est à peu près le même principe du côté des duels, pendant lesquels les paroles prononcées par l’opposant avant d’agir permettent souvent de deviner assez intuitivement (mais pas toujours!) l’action qu’il va entreprendre ; ainsi, un "montre-moi ce que tu sais faire!" laisse fortement entendre qu’il va se mettre en position défensive, tandis qu’un "cette fois-ci, tu vas la sentir passer" est logiquement signe d’une attaque future donnée à pleine puissance…


Quant au recrutement des étoiles, il se passe tranquillou la plupart du temps, à base de "je suis le nouveau chef de la Liberation’s Army et tes capacités m’intéressent beaucoup. Ça te dirait de nous rejoindre? -Ouais! -Ok, alors sois le bienvenu!", et c’est plutôt cool. Mais parfois, le jeu semble s’amuser à se foutre de ta gueule. Lorelei par exemple, nous rembarre au niveau 21, car nous jugeant "trop faible", puis, quand on revient un peu mieux armé, elle accepte, et on apprend finalement qu’elle n’est que niveau 18… Esmeralda veut un "opale" en échange de sa coopération ; objet que l’on drop sur les Nightmare (merci Internet), que je n’ai obtenu qu’après 1h30 de farming ! Le pire, c’est que je suis finalement resté un quart d’heure de plus dans la zone (généreuse en pognon), et ils m’en ont refilé deux autres (inutiles) ! Tu me cherches, jeu, c’est ça ?


Et encore, je n’ai pas évoqué la séquence du vol de l’épée, ceci afin de recruter Lepant, avec cette espèce de foutue roue de la fortune me séparant du précieux sésame, qui m’a bien fait perdre presque une heure supplémentaire de ma précieuse vie… Quand j’y pense, mon étoile de la destinée à moi, elle est vraiment merdique !


Niveau scénaristique, je ressors également assez mitigé. On m’avait promis de l’exceptionnel, et je n’y ai simplement vu "que" du bon. J’ai bien aimé le ton du jeu, globalement très sérieux, très "mature", mais parsemé de petites touches humoristiques, comme le font si bien un FFVI ou la série des DraQue. Suikoden prend le temps de développer son intrigue, de placer ses enjeux, de montrer un monde vivant et ses conflits sous-jacents (oppositions impériaux/"rebelles", père/fils, nains/elfes, humains/autres peuples), du moins au début. C’est certes assez classique et manichéen, mais pas dénué de charme. D’ailleurs, par une amusante coïncidence, j’ai appelé le protagoniste Dai, et la structure du récit fait parfois furieusement penser au manga Fly…


D’un autre côté, j’ai été assez stupéfait que le jeu se finisse aussi vite (20-25h de jeu, en prenant son temps) : en effet, hors principaux (Viktor, personnage le plus cool du J-RPG?), la plupart des recrues ont un background souvent expédié à la va-vite, et le scénario semble attraper un syndrome phantompainien dans son dernier tiers, rushant les évènements et leur résolution… Dans le même genre, on repère étonnamment très vite qui va passer l’arme à gauche dans la demie heure suivante, les développeurs usant de ficelles grosses comme des diplodocus dans une 2 CV : confession soudaine, personnage mélancolique…remarquez, c’est pratique, on peut récupérer leur équipement juste à temps… #vous-savez-qui


D’un point de vue graphique, Suikoden arbore une 2D agréable à l’œil, à défaut de mieux. Les sprites sont tout de même très détaillés, leurs animations sont juste parfaites, et le tout profite d’effets de zooms très sympathiques. Mais la Super Ni...pardon la PS1 ne semble vraiment pas poussée dans ses retranchements, même pour un jeu datant de 1995. Le jeu pèse certes tout de même 322 MB (sur le PS Store), mais il y a fort à parier qu’une grosse partie des données est due à la musique qualité CD… Des thèmes qui sont par ailleurs souvent très bons, mais également parfois un peu redondants…


Bref, je concluerai concisément cette critique de Suikoden un peu de la même manière que la précédente (aka celle de Borderlands) : le jeu ne m’a pas convaincu plus que cela, mais les bonnes idées sont bel et bien là, et, si bien exploitées, me donnent l’espoir d’une suite beaucoup mieux pensée et calibrée. Ce qui devrait apparemment être le cas si l’on se réfère à l’avis général…

Wyzargo
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le 28 juil. 2017

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