#1 : À tout seigneur, tout honneur

Pour inaugurer cette série de critiques, quoi de mieux que de commencer par une figure incontournable du jeu vidéo : Mario. Super Mario Land, sorti en 1990 en France sur la Game Boy, marque une étape importante dans l’histoire de la franchise, en étant le tout premier épisode portable des aventures du plombier. Avec les moyens modernes, comme l'élégante Analogue Pocket, redécouvrons ce titre iconique, mais aussi déconcertant.

Une contrefaçon chinoise ?

Dès le départ, Super Mario Land désarçonne. Exit le Royaume Champignon et bienvenue au Royaume de Sarasaland, une terre inédite à la série. L’écran-titre silencieux donne presque une ambiance de creepypasta, et le jeu commence. La première impression ? On semble jouer à un Mario alternatif, comme si un sprite de Mario avait été inséré dans un autre jeu de plateforme.

Les différences sautent aux yeux : le bestiaire mélange des ennemis classiques (Goombas ou Koopa Troopas, ces derniers ayant des carapaces explosives ?) avec des créations uniques et étranges pour un Mario, comme des statues Moaïs volantes ou des insectes géants. Les environnements renforcent cette impression : pyramides, forêt de bambous peuplée de zombies chinois, ou encore île de Pâques... Un univers exotique, certes, mais déroutant. Même la musique diverge, à l'image du thème de l'étoile d'invincibilité, qui remplace la mélodie classique par un air de French cancan.

Enfin, c'est Daisy, et non Peach, que Mario doit sauver. Cette première apparition de la princesse Daisy ajoute à l’impression que Super Mario Land est une version parallèle de l’univers Mario que l’on connaît. Une singularité qui intrigue autant qu’elle déstabilise.

Une formule efficace

Sur le plan du gameplay, le jeu est un platformer 2D classique : simple et efficace. Mario répond bien aux commandes, bien que les contrôles soient légèrement plus rigides que dans les opus sur NES. Le jeu introduit des phases de shoot 'em up, à bord d’un sous-marin ou d’un avion, qui apportent une variation bienvenue et enrichissent le rythme. Ces segments, bien qu'assez courts, démontrent une belle inventivité pour un jeu portable de l'époque.

La bande-son, bien ancrée dans les limitations des consoles 8 bits, se démarque par des thèmes mémorables et entraînants, spécifiques à la Game Boy. Si ces morceaux ne font pas partie des grands classiques de la franchise, leur tonalité électronique rétro leur confère un charme certain. Ces mélodies ajoutent une touche d’identité propre à Super Mario Land, en adéquation avec son ambiance unique.

Trop court, trop facile

Le plus grand défaut de Super Mario Land réside dans sa durée de vie extrêmement courte. Les 12 niveaux, répartis sur 4 mondes distincts (Égypte, mer, île de Pâques, Asie), peuvent être bouclés en 30 minutes à peine, avec des boss à la fin de chaque zone et un boss final. En plus d'être court, le jeu est étonnamment facile, surtout pour une époque où les titres compensaient souvent leur brièveté par une difficulté corsée, en particulier dans la seconde moitié du jeu.

Même en tenant compte des limitations techniques de la Game Boy, cette faible durée de vie déçoit, surtout lorsqu’on la compare à des jeux plus riches sortis plus tard sur la même console : Super Mario Land 2, Kirby’s Dream Land 2, ou encore des titres d’autres genres comme The Legend of Zelda: Link’s Awakening. Si l’on prend du plaisir à parcourir cet univers original, l’absence de défi et la brièveté de l’aventure limitent grandement l’expérience.

Conclusion : Une curiosité atypique

Super Mario Land est une œuvre singulière dans l’univers de Mario. Certains apprécieront son atmosphère décalée et son charme rétro, tandis que d’autres y verront un titre à part, presque hors-série. Son gameplay simple et efficace ravira les amateurs de nostalgie, mais ses faiblesses – une durée de vie trop courte et un défi quasi inexistant – l’empêchent de rivaliser avec les autres jeux de la franchise. Super Mario Land est une expérience plaisante, mais trop éphémère.