Difficile de débuter cette série de critiques autrement qu’en s’attaquant à l’une des icônes les plus marquantes de l’histoire du jeu vidéo : Mario. Super Mario Land, un platformer 2D sorti sur Game Boy en 1990 en France, arrive quelques mois après Super Mario Bros. 3 sur NES. Ce jeu marque également une rupture significative dans la saga : pour la première fois, Shigeru Miyamoto n’est pas impliqué dans la conception du titre. Ce détail, bien que discret, aura un impact sur l’essence du jeu. Dans des conditions optimales grâce à l’Analogue Pocket, le titre peut être revisité sous un jour nouveau, offrant une expérience propre à la console.
Une contrefaçon chinoise ?
Dès l'écran titre, le joueur fait face à une absence de musique qui installe une ambiance étrange. L'absence de sonorités familières semble instiller un malaise, comme si le titre n’appartenait pas tout à fait à l’univers de Mario. Le royaume Champignon est remplacé par Sarasaland, un monde à l’atmosphère déstabilisante. Les ennemis, comme les Goombas ou les Koopas Troopas, sont présents, mais sous des noms et des apparences altérées, comme les Chibibos et les Nokobons. Cette réinterprétation crée une sensation d’univers parallèle, où Mario semble évolué dans une réalité alternative. L’aspect graphique, bien que fidèle aux limitations de la Game Boy, propose des créatures originales, mais certaines, comme les mouches géantes ou les statues moaïs volantes, laissent un goût d’inachevé. Les quatre environnements, allant de l’Égypte à un monde asiatique inspiré des bambous, ne manquent pas de surprendre. À noter que la musique d’invincibilité, habituellement associée à l’étoile, laisse place à un étrange thème de French Cancan, un choix audacieux qui ne manquera pas de diviser les joueurs. Cette ambiance alternative peut intriguer, mais elle déstabilise aussi ceux qui s’attendent à une expérience Mario plus traditionnelle.
Simple et efficace
Côté gameplay, le titre reste fidèle à la simplicité et à l’efficacité qui caractérisent les meilleurs platformers. Cependant, Mario y semble un peu plus rigide que dans les opus précédents. Les commandes restent intuitives, et le personnage répond de manière correcte, bien que moins fluide que sur NES. L’expérience, bien que limitée, bénéficie d’une prise en main agréable. L’absence de mécanismes complexes et la simplicité des niveaux permettent de s’y plonger rapidement, ce qui demeure l’un des points forts du jeu. En termes de bande-son, les thèmes musicaux, bien que simples, sont plutôt réussis et évoquent les sonorités typiques des jeux 8 bits. Ces mélodies rétros rappellent une époque où les jeux vidéo dépendaient largement de l’ingéniosité sonore pour compenser les limitations techniques. Super Mario Land réussit à capturer cet esprit tout en offrant un gameplay qui, bien qu’assez court, parvient à captiver pendant sa durée de vie. Un ajout notable de ce jeu réside dans l’introduction de phases en shoot’em up, une rareté dans l’univers de Mario. Ces séquences apportent une dynamique intéressante et un changement de rythme, bien que leur présence reste anecdotique au sein de l’aventure globale. L’originalité de cette inclusion permet néanmoins de briser la monotonie des traditionnels niveaux de plateforme, bien qu'elles n'aient qu'un impact limité sur l’expérience globale du jeu.
Une durée de vie trop courte
Le principal défaut de Super Mario Land réside dans sa durée de vie. Avec seulement 12 niveaux et une aventure qui peut être terminée en une trentaine de minutes, le jeu déçoit par sa rapidité. À une époque où la difficulté et l’étendue des niveaux étaient souvent utilisées pour compenser les faibles durées de jeu, Super Mario Land choisit une approche plus accessible, mais au détriment du challenge. Alors que des jeux comme Super Mario Land 2 ou Kirby’s Dream Land 2 proposaient des aventures bien plus longues, ce titre semble étonnamment court pour un jeu de plateforme de l’époque. Comparé à des productions comme The Legend of Zelda: Link’s Awakening ou Mystic Quest, qui offraient une expérience plus riche et détaillée, Super Mario Land fait figure de petit amuse-bouche, intéressant mais insuffisant pour satisfaire les attentes d’un joueur moderne.
En somme, Super Mario Land se positionne comme une curiosité historique plutôt qu’un incontournable du genre. Loin de l’expérience Mario à laquelle les joueurs sont habitués, il propose une aventure déstabilisante, presque expérimentale, qui peut surprendre par son univers alternatif et ses choix audacieux. Malgré un gameplay simple et une ambiance rétro agréable, le manque de challenge et la durée de vie trop courte rendent l’expérience finalement un peu frustrante. Ce jeu, à la croisée des chemins entre nostalgie et expérimentation, mérite d’être exploré, mais il ne parvient pas à se hisser au niveau des autres grands classiques de la franchise.