La première fois que j'ai joué à Sunshine, étant enfant, j'avais été un peu déçu. Pas à cause de la caméra récalcitrante dans certaines situations, mais simplement par l'univers justifiant le gameplay. Pensez donc, je gardais le souvenir de mon frère incarnant Mario distribuant des tatanes à ses adversaires et parcourant des lieux tous plus mystérieux les uns que les autres sur N64 (le manoir, le labyrinthe toxique, la pyramide...). Et je me retrouve avec un plombier qui doit travailler pendant les vacances à arroser des tags sur une île paradisiaque. Où est passé mon Mario badass?
Mais quand on est enfant, on passe plus simplement outre la déception (peut-être parce que l'esprit critique est moins développé). Alors j'ai persisté, et j'ai appris à aimer ce jeu que je n'ai pourtant jamais fini, je ne m'explique pas pourquoi. J'ai dû décrocher lors d'une quête des pièces rouges...
Mais dernièrement, j'ai décidé de régler mes comptes avec ma jeunesse. J'ai retrouvé Sunshine et je l'ai relancé sur écran plat, pour constater d'abord que le jeu était loin d'être vilain : l'eau est jolie et les décors rendent bien compte du caractère paradisiaque de l'île Delphino, à tel point que je me suis pris à rêver de vacances d'été alors que je ne supporte le plein soleil que pendant l'hiver. Cet univers qui m'avait déçu et qui continuera d'en décevoir certains est, tout simplement, sympathique. Le thème musical principal remixé et décliné dans chaque niveau, la mer, les villages avec leurs habitants que l'on croise partout, les oiseaux, la nature, la vie quoi. Sunshine est plein de vie.
La prise en main se fait sans trop d'accrocs, malgré ce qu'on peut en lire ici ou là. En fait, le problème vient de certains passages-clefs du soft où les sauts muraux et la caméra montrent leurs limites (on se souvient de l'ignoble niveau secret en forme de flipper où il fallait trouver les pièces rouges) ; ces passages marquent les esprits, mais globalement le soft s'en tire bien. Pas facile de faire un jeu de plates-formes 3D à la fois exigeant et maniable, surtout lorsque l'on intègre un canon à eau portatif multifonction respectant les lois de la physique et venant se loger à la base du gameplay. Avec le recul, J.E.T. (ledit canon à eau) était une idée assez osée.
Sunshine, c'est aussi le premier Mario doublé pendant les cinématiques, et la transition est plutôt réussie (sauf pour Bowser, là l'idée même de le doubler m'a laissé perplexe). C'est encore une tentative d'amorcer un scénario allant au-delà du simple "Va sauver la princesse!", avec un certain suspens quant à l'identité d'Anti-Mario... tentative malheureusement avortée pour retrouver le schéma traditionnel. D'autant plus que la fin est particulièrement expédiée : un dernier niveau court et pauvre, un rapide combat, la question MAJEURE du titre (Peach est-elle la mère de Jr? Ne me dites pas que ça ne vous a pas torturé l'esprit!) à peine traitée. Le générique sympa peine à compenser.
L'aventure elle-même est relativement courte, avec le recul, mais cela ne se ressent pas trop en plein jeu grâce à une certaine dose de challenge vraiment bienvenue (en dehors du challenge lié aux problèmes de caméra qui est très malvenu). On saluera aussi les niveaux de pure plates-formes avec leur bande-son a capella en clin d'œil aux origines de la série.
L'ombre au tableau, ce sont ces quelques problèmes techniques déjà cités et cette fin peu mémorable. On regrettera aussi la part bien moindre accordée aux mystères par rapport à l'opus 64. Tout l'univers du jeu est assez gentillet, même les ennemis n'ont pas l'air bien méchant. Le niveau avec les Boo, par exemple, laisse un arrière goût amer. On dirait qu'ils ont de la fièvre.